Section (II) : L’identification des chocs monétaires américains

Introduction

L’étude des chocs monétaires à partir de l’histoire de la politique monétaire doit son succès aux travaux de Friedman et Schwartz (1963) et de Romer et Romer (1989, 1994, 1997, 2000, 2002, 2003, 2004). Ces 4 chercheurs préfèrent la méthode « narrative » aux approches statistiques, qui biaisent selon eux les résultats et ne permettent pas d’évaluer pertinemment les choix des autorités monétaires américaines. Friedman et Schwartz se concentrent sur les évènements de l’avant deuxième guerre. Romer et Romer se concentrent, quant à eux, sur les chocs monétaires de l’après deuxième guerre.

Dans leur « histoire monétaire », Friedman et Schwartz étudient les chocs monétaires importants et exogènes. Ainsi, un épisode comprend un choc si les actes monétaires sont « inhabituels » par rapport aux évènements se produisant du côté de l’économie réelle. Pour eux, les chocs monétaires exercent des effets importants sur l’activité économique. C’est le cas, par exemple, de la politique désinflationniste mise en place par le nouveau Président de la Réserve fédérale, M. Paul Volcker, en 1979. Cherchant à contrôler l’inflation, les mesures prises par la Fed ont provoqué une forte récession économique peu connue aux Etats-Unis depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Les chocs identifiés par Friedman et Schwartz (1963, page 688) comme étant les plus importants et significatifs après 1919 sont au nombre de quatre 346  : janvier – juin 1920, octobre 1931, et juin 1936 – janvier 1937. Le quatrième choc est celui de l’inaction des autorités monétaires américaines face aux difficultés rencontrées par l’économie américaine entre 1929 et 1931 347 .

A leur tour, Romer et Romer étudient les chocs monétaires à partir de l’histoire de la politique monétaire et des comptes-rendus des délibérations de la Fed. Ils délimitent leur champ d’action à la recherche des épisodes où la Réserve fédérale essaye de provoquer une « contraction » de l’économie dans le but de réduire l’inflation. Leur travail exclut ainsi les contractions monétaires ne résultant pas d’une politique anti-inflationniste, ainsi que les expansions monétaires. Le travail de Romer et Romer (qui porte sur l’après deuxième guerre mondiale) complète celui de Friedman et Schwarz (portant sur l’avant deuxième guerre mondiale). C’est pourquoi nous nous concentrons dans le Chapitre (3) sur le travail de Romer et Romer (chocs monétaires postérieurs à 1945).

Les travaux de Friedman et Schwartz (1963) et de Romer et Romer, quoique incomplets dans certains de leurs aspects (peu d’attention accordée aux chocs ne résultant pas d’une mesure de politique monétaire), mettent les bases de l’étude des chocs monétaires en économie internationale.

Dans cette Section, nous étudions les chocs monétaires américains en vue d’étudier plus loin leurs effets sur l’économie libanaise. Nous présentons en premier lieu la méthode d’identification des chocs. Nous étudions en deuxième lieu le choc monétaire américain de mai 1966. Nous développons en troisième lieu le choc monétaire américain de janvier 2001.

Notes
346.

Les chocs identifiés par Friedman et Schwarz (1963) pour l’avant première guerre mondiale sont, sans aucune exception, liés aux « paniques » financières, et non pas à des chocs monétaires proprement dits (tels que définis par eux).

347.

Friedman et Schwarz (1963) identifient d’autres chocs « mineurs » pour la période en question (après 1919). D’après eux, ces chocs sont marginaux. Leur identification permet simplement de fournir des arguments supplémentaires sur l’importance des distorsions monétaires dans l’histoire économique des Etats-Unis.