Les aspects de la dollarisation de l’économie libanaise

Dans les développements qui suivent, nous relevons, à l’aide de tableaux et statistiques monétaires, les principales caractéristiques de la dollarisation de l’économie libanaise : comptes de la banque centrale, dépôts du secteur privé, crédits accordés au secteur privé, dette publique, chèques compensés, etc.

Ces tableaux et graphiques montrent l’ampleur du phénomène de dollarisation, phénomène dont témoigne la double circulation monétaire. Tous les Libanais le savent, les visiteurs étrangers s’en rendent tout de suite compte, les paiements au comptant peuvent se faire, soit en livres libanaises, soit en dollars ; de même pour les paiements par cartes bancaires, pour l’émission de factures commerciales, etc. Il est fréquent au Liban d’avoir à la fois dans sa poche des dollars et des livres. Il est même fréquent de régler les achats en payant une partie en livres, une autre en dollars.

Tableau (22) : Les comptes de la banque centrale, fin d’année
En millions de $ 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Avoirs extérieurs en devises 7 595 5 748 4 361 5 070 10 197 9 494
Or 2 677 2 524 2 561 3 216 3 833 4 006
Actif total 11 433 11 390 12 823 12 957 24 823 26 289
Avoirs en devises/Actif 66,43% 50,47% 34,01% 39,13% 41,08% 36,11%
Avoirs en devises et or /Actif 89,85% 72,63% 53,98% 63,95% 56,52% 51,35%

Sources : Publications de la Banque du Liban, du Ministère des Finances, du FMI, etc.

Les avoirs extérieurs en devises représentent une partie importante des actifs de la banque centrale. Si nous ajoutons à ces avoirs la valeur des réserves en or du Liban, la valeur des actifs de la banque centrale libellés en devises s’accroîtrait davantage.

Graphique (51) : L’évolution de l'or et des avoirs extérieurs en devises de la BDL entre 1999 et 2004
Tableau (23) : Les dépôts bancaires du secteur privé
En millions de $ 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Dépôts en livres libanaises 12 463 11 896 10 591 12 661 15 682 15 482
Dépôts en devises 16 253 19 657 23 661 24 110 25 293 29 788
Total dépôts 28 716 31 553 34 252 36 771 40 975 45 270
Dépôts en devises/Total dépôts 56,60% 62,30% 60,08% 65,57% 61,73% 65,80%

Sources : Publications de la Banque du Liban, du Ministère des Finances, du FMI, etc.

La part des dépôts en devises du secteur privé est très importante et représente plus que la moitié des dépôts de la clientèle. La dollarisation des dépôts s’accroît en période de crise, comme par exemple suite à l’assassinat du Président Hariri en février 2005. Les dépôts bancaires en devises sont passés de 66,41% du total des dépôts en janvier 2005 à 69,46% du total des dépôts en février 2005.

Selon Bhattacharya (2003), « à peu près 90% des prêts bancaires accordés au secteur privé sont en devises étrangères » 393 . Ce chiffre, correspondant aux estimations des institutions internationales, n’est pas tout à fait exact d’après le tableau (24).

Graphique (52) : L’évolution des dépôts bancaires en devises et livres
Tableau (24) : Les créances sur le secteur privé des banques commerciales
En millions de $ 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Créances en LL 1 639 1 916 2 178 2 744 2 556 2 830
Créances en devises 12 281 12 834 12 648 12 459 12 587 13 099
Total créances sur le secteur privé 13 920 14 750 14 826 15 203 15 143 15 929
Créances en devises/Total créances 88,22% 87,01% 85,31% 81,95% 83,12% 82,23%

Sources : Publications de l’Association des Banques

Graphique (53) : L’évolution des créances des banques commerciales
Tableau (25) : La dette publique
En milliards de $ 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Dette publique 19,7 23,3 28,0 30,0 32,0 35,0

Sources : Publications de la Banque du Liban, du Ministère des Finances, du FMI, etc.

A la fin du premier trimestre de 2004, la dette publique s’élevait à 33,62 milliards de dollars, soit 185% du PIB. A cette date, la dette était libellée à 44,9% en devises étrangères, et le reste en livres libanaises. Ces chiffres témoignent du taux de dollarisation de la dette publique et fournissent un indicateur de plus sur la dollarisation de l’économie libanaise.

Tableau (26) : La structure de la dette publique au 30 novembre 2003
Dette publique En %
Dette interne 52,8%
Dette externe 47,2%
Total 100,0%

Sources : Publications de la Banque du Liban, du Ministère des Finances, du FMI, etc.

Tableau (27) : Les chèques compensés
Chèques compensés 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Montant de chèques en devises/Montant total de chèques
73,83%

71,03%

74,16%

72,81%

51,55%

72,19%
Nombre de chèques en devises/Nombre total de chèques
70,81%

69,22%

68,13%

67,91%

67,61%

66,70%

Sources : Publications de la Banque du Liban

Tableau (28) : Les cartes bancaires
En %, fin d’année 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Paiements :
En livres libanaises
En dollars

11,76%
88,24%

10,47%
89,53%

9,48%
90,52%

9,57%
90,43%

8,00%
92,00%

11,96%
88,04%
Retraits :
En livres libanaises
En dollars

49,14%
50,86%

55,98%
44,02%

58,28%
41,72%

68,31%
31,69%

72,47%
27,53%

72,74%
27,26%

Sources : Publications de la Banque du Liban

Les paiements par cartes bancaires se font en grande partie en dollars. En revanche, les retraits se font plus en livres libanaises, avec une tendance exprimée à la hausse. Mais les retraits ne représentent que la moitié des paiements en valeur. D’où l’importance de la dollarisation des moyens de paiements.

Tableau (29) : Les autres aspects de la dollarisation de l’économie libanaise
Aspects Exemples
Transactions de titres sur la bourse de Beyrouth Les prix sont fixés en dollars dans tous les secteurs.


Transactions immobilières
Très fréquemment, les ventes, donations, successions, hypothèques foncières, saisies, etc. sont évaluées en dollars. De même, les jugements des tribunaux sont fondés sur des estimations en dollars, quoique mentionnant les valeurs à régler par les uns et les autres en livres libanaises.


Dollarisation externe
Les échanges commerciaux (importations et exportations) se font en devises. Comme la livre n’est pas une monnaie internationale, les importateurs échangent la monnaie nationale contre des devises pour régler leurs fournisseurs étrangers. De même, les exportateurs sont réglés en devises pour leurs achats.
Notes
393.

Bhattacharya (2003), page 5.