Les leçons théoriques

Après avoir défini les « chocs monétaires », nous avons dressé un cadre théorique pour l’étude de leur transmission internationale. Ce travail essaye de compléter les résultats sur le sujet en finance internationale, et tente de comprendre précisément de quel type de choc il s’agit dans une longue série de publications de recherche sur la transmission internationale des chocs monétaires. Il ressort de notre travail une distinction entre les chocs de politique monétaire (qui sont l’œuvre des autorités monétaires et qui sont généralement anticipés par les agents économiques) et les chocs monétaires (qui proviennent rarement des autorités monétaires et sont plus le fait des agents privés, du système bancaire, etc.). Il ressort également de ce travail que, pour être qualifiés de chocs, les changements dans la quantité de monnaie doivent être non-anticipés et exogènes.

Notre revue de littérature nous a permis de rendre compte de l’évolution des mécanismes de transmission internationale des chocs monétaires depuis l’intégration du commerce international et de l’accès aux marchés financiers dans le modèle de l’économie fermée, jusqu’à l’incorporation de l’asymétrie des méthodes de fixation de prix à l’international dans l’étude des effets des chocs monétaires sur les variables nationales et étrangères. Cette revue nous a permis de constater des dissemblances profondes dans les hypothèses et des écarts importants dans les résultats obtenus. Les effets des chocs varient substantiellement entre les modèles Mundell–Fleming, les modèles de concurrence monopolistique, et les modèles PtM. Le modèle de la concurrence monopolistique avec optimisation inter-temporelle est certes la grande rupture dans l’étude de la transmission internationale des chocs monétaires durant les dix dernières années. Cependant, ses conclusions ne correspondent pas toujours à la réalité. D’autres raisonnements, plus traditionnels et davantage empiriques, comme le modèle de Kim (2001), permettent d’obtenir des résultats mieux adaptés à la réalité.

Notre documentation des méthodes de fixation de prix à l’international nous a permis de montrer que tous les pays n’adoptent pas les mêmes mécanismes de « pricing », même si le PCP et le PtM coexistent dans chaque pays. Nous avons décelé des tendances nationales au niveau des pratiques de vente, ce qui nous a permis de classer les pays en fonction de leur mode de fixation de prix. Ce classement permet de mieux comprendre les effets des chocs monétaires de ces pays sur le reste du monde, ainsi que l’effet des chocs monétaires étrangers sur ces pays. En tenant compte du PtM et de l’asymétrie des modes de fixation de prix, nous avons pu relever les différents effets des chocs monétaires sur les variables étrangères, nominales et réelles. La documentation nous a permis également d’intégrer la discrimination endogène de prix dans l’étude de la transmission internationale des chocs monétaires, et d’examiner l’optimalité d’une union monétaire lorsque certains pays adoptent le PtM.

Plusieurs résultats ressortent de notre travail de recherche. En PCP, nos résultats contredisent les avancées théoriques selon lesquelles la balance commerciale joue un rôle considérable dans le mécanisme de transmission internationale des chocs monétaires. Nos conclusions insistent en revanche sur le rôle du taux d’intérêt, qui provoque une hausse des revenus des deux pays, Nation et Etranger. En concurrence monopolistique, l’approche inter-temporelle de la balance courante n’explique pas tous les aspects de la transmission internationale des chocs monétaires. La prise en compte des régimes de production, nationaux et étrangers, s’impose. Enfin, en PtM, comme les modes de fixation de prix dans Nation et Etranger ne sont pas homogènes, l’asymétrie des modes de « pricing » modifie dans certains cas les effets de la transmission internationale des chocs monétaires.

Pour mieux comprendre les effets de la transmission internationale des chocs monétaires, les économistes et les autorités monétaires doivent accorder suffisamment d’attention aux comportements de fixation de prix des entreprises nationales et étrangères. Le PtM est devenu une pratique commune au niveau international, et la littérature ne peut plus se concentrer uniquement sur l’étude du cas classique de la vente dans la monnaie du pays du producteur. Cela ne signifie pas que les résultats en PCP ne sont pas utiles. Les nouvelles versions du modèle Mundell–Fleming et les modèles VaR expliquent convenablement les effets internes et externes d’un choc monétaire dans une grande économie ouverte lorsque la plupart des entreprises de cette économie facturent leurs ventes à l’étranger dans leur propre monnaie (PCP). Cependant, avec l’accroissement du nombre d’entreprises adoptant le PtM, une nouvelle démarche d’analyse de la transmission internationale des chocs monétaires s’impose. Cette démarche doit faire appel à la concurrence monopolistique (cadre théorique du PtM) et au PtM. Les retombées de ce nouveau raisonnement vont au-delà de l’étude des effets des chocs monétaires sur les variables réelles et nominales, nationales et étrangères. Elles touchent aussi au choix du régime de change et à la politique monétaire à mettre en place dans un pays.