Université Lumière Lyon 2
Institut des Sciences et des Pratiques d’Education et de Formation
Ecole Doctorale « Sciences des Sociétés et du Droit »
Evaluer la compréhension des concepts de mécanique chez des élèves de seconde :
Développement d’outils pour les enseignants
pour obtenir le grade de Docteur
en Sciences de l’Education
préparée sous la direction d’Andrée Tiberghien
au sein de l’équipe ADIS-lst (groupe COAST) de l’UMR ICAR (UMR 5191)
JURY :
Martine Méheut Rapportrice
Jean-Louis Closset Rapporteur
Robin Millar
Andrée Tiberghien Directrice

Préface

‘J’ai toujours été dans ma scolarité ce qu’il est convenu d’appeler une « bonne élève ». J’ai eu la chance d’avoir des notes suffisamment bonnes pour me permettre de franchir aisément les différentes étapes de mon cursus. Il n’était alors aucunement question de remettre en cause mes aptitudes dans les différentes disciplines. Cependant, je gardais toujours en moi cette impression d’être un imposteur, avec la peur que quelqu’un voie clair dans mon jeu. J’avais l’impression que j’avais compris les règles de l’évaluation scolaire, que je savais ce qu’on attendait de moi et que je savais le donner. Mais lorsque je me demandais si je maîtrisais vraiment les contenus en jeu, si j’étais capable de les appliquer à ma vie de tous les jours, je savais que ce n’était pas le cas. Je pouvais par exemple avoir une excellente note sur un devoir sur les circuits RLC et être complètement incapable d’expliquer simplement ce qu’était l’électricité et pourquoi cette lampe électrique s’allumait quand j’appuyais sur ce bouton. C’est d’ailleurs plus souvent face à mes amis et proches que j’ai perdu la face que face à mes professeurs. J’étais capable de réciter toutes les formules parfaitement, de mener à bout des calculs compliqués et de refaire les exercices les plus difficiles. Je pouvais même expliquer à mes camarades ce qu’ils ne comprenaient pas, voire les aider à avoir de meilleures notes. Mais lorsque mes amis me demandaient « Tiens, toi qui fais de la physique, est-ce que tu peux m’expliquer pourquoi le rideau de douche vient toujours se coller à moi ? », j’en étais tout simplement incapable.’

‘Je parlais tout à l’heure d’imposture mais je me rendais bien compte que mon enseignant de physique ne me demandait pas d’être capable d’expliquer tous ces « phénomènes de la vie quotidienne », que mon cours n’était pas fait pour que je les comprenne. J’étais en quelque sorte en règle avec ce système. La physique n’était pour moi qu’un jeu, qu’un monde de théories, de modèles, de calculs, où je devais appliquer des algorithmes. Elle était déconnectée du champ expérimental (j’étais d’ailleurs ce type de bonne élève totalement effrayée par les travaux pratiques). Et cela ne m’a manifestement jamais empêché de réussir.’

‘Une année d’étude à Montréal m’a aidé à comprendre que la théorie n’était pas au centre de toute la physique et que celle-ci se nourrissait d’expériences et de « réalités ». Mon passage à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon m’a montré que la connaissance des formules et la maîtrise des calculs n’étaient pas suffisantes pour comprendre et interpréter les phénomènes. Avoir une maîtrise de physique sans aucun « sens physique » était devenu suffisamment déroutant pour que je me décide à me pencher sur le sujet. J’aurais pu tenter de préparer l’agrégation et espérer que cette formation me « remette à niveau », me donne les bases nécessaires pour comprendre le véritable intérêt de la physique. J’ai préféré m’orienter vers la didactique afin de mieux comprendre le fonctionnement de l’enseignement de la physique.’

‘Lorsque le moment de choisir mon sujet de thèse arriva, je saisis l’opportunité de travailler sur l’évaluation pour les raisons évoquées plus-haut. Le financement que j’ai eu la chance d’obtenir (bourse BDI –CNRS) nécessitait un projet concret, ayant des applications. Nous avons donc choisi un sujet de recherche qui aboutirait à une production d’outils pour les enseignants.’

‘Ces trois années furent pour moi une très belle expérience, où je pus réfléchir à toutes ces questions. Le meilleur souvenir que j’en garde reste les rencontres avec les élèves, tous si différents et grâce auxquels j’ai pu comprendre les multiples façons de fonctionner dans ce système scolaire. Je me suis retrouvée dans certains, j’ai été admirative face à d’autres. Tous m’ont laissé un très beau souvenir, et je les en remercie. Quelle chance j’ai eu de pouvoir passer ces trois années à tenter de comprendre quelques aspects de la complexité des fonctionnements humains.’

‘Je finis aujourd’hui cette thèse avec un sentiment partagé, entre satisfaction et sentiment de n’avoir pas terminé ce que j’avais commencé. Je crois que c’est le lot de tout chercheur (sinon nous nous appellerions des trouveurs). J’espère sincèrement que mon travail pourra aider les enseignants et qu’il permettra aux élèves de montrer plus simplement ce qu’ils ont compris.’