4.2. Les pratiques d’évaluation des enseignants

L’évaluation tient un rôle central dans les pratiques des enseignants. Comme nous l’avons signalé, nous nous intéressons à l’évaluation écrite (devoir surveillé) pratiquée par les enseignants pour évaluer les connaissances des élèves. Cette évaluation est faite à partir des productions écrites des élèves à des exercices choisis par l’enseignant. L’enseignant va évaluer ces productions. Il en découle plusieurs actions :

il fait un bilan de l'acquisition par l'élève des concepts enseignés et donne un jugement sous forme de note et éventuellement d’appréciation sur la valeur du travail de l'élève à un moment donné, par rapport à un référent qu'il a lui-même déterminé explicitement ou implicitement ;

il l'utilise pour aider l’élève à modifier son apprentissage, dans un premier temps sous la forme d’un constat (rendu des copies qui vont éventuellement permettre à l'élève de prendre conscience de ses erreurs) et d’informations sur ce constat (commentaires présents sur les copies qui peuvent permettre à l'élève de mieux comprendre ses erreurs, de voir comment il peut s'améliorer), puis par des rétroactions sur l'enseignement (correction en classe du devoir, retour sur certains points de l'enseignement qui ont été manifestement mal acquis par certains élèves, etc.) ;

il l’utilise éventuellement pour adapter l’enseignement qui suit cette évaluation en prenant en compte les connaissances acquises et les difficultés des élèves.

Nous avons donc pris le point de vue de considérer que, lors de ses pratiques traditionnelles d’évaluation en classe, l’enseignant est amené à faire un bilan des connaissances des élèves afin de leur donner une note communicable à l’institution établissement scolaire et aux parents (ce qui correspond à une fonction sommative) puis, lors du rendu de la copie et de la correction faite en classe, à rétroagir sur l’apprentissage des élèves à partir de ces mêmes informations (ce qui correspond à une fonction formative). Cette double fonction est d’ailleurs celle de l’enseignant qui doit à la fois former ses élèves et les évaluer, et par leur évaluation évaluer la qualité de son enseignement. La difficulté de gérer cette dualité a déjà été soulignée (Cardinet, 1988).

Pour produire des outils pour les enseignants, il est fondamental de tenir compte de leur pratique tout en conservant un regard critique. Il s’agit pour nous de proposer aux enseignants un outil d’évaluation plutôt tourné vers la compréhension des élèves mais acceptable par l’enseignant. En ce sens, notre travail se rapproche de celui de Millar et Hames (2001a, 2001b, à paraître). Dans le but d’élaborer des outils pour les enseignants basés sur les résultats de la recherche en didactique, ces deux auteurs proposent un ensemble de questions « diagnostiques » qui peuvent être l’objet d’une utilisation formative ou sommative. Leur usage de « diagnostique » est très différent de ce que nous avons présenté ci-dessus. Voici un extrait de Millar et Hames (2001a) qui permet de bien saisir l’approche retenue dans ce travail :

« Here, a ‘diagnostic question’ is one which can provide evidence of a learner’s understanding of a specific point or idea. A good diagnostic question […] should tell us how they think about [a particular ‘piece’ of understanding], and not just whether or not they can provide the expected answer. » (Millar et Hames, 2001a, pp.1-2)

C’est précisément ce type d’évaluation qui nous intéresse, une évaluation centrée sur la compréhension de l’élève, où chaque question interroge la compréhension d’un point précis de l’enseignement et où la réponse de l’élève peut permettre d’analyser ses difficultés. Ces questions peuvent alors servir à l’enseignant pour évaluer les acquis de ses élèves mais sont en même temps riches d’informations pour lui permettre de rétroagir sur l’apprentissage des élèves.