On peut soutenir que l’apparition des modèles de croissance endogène, dans la deuxième moitié des années 1980, a redonné un rôle clef au capital humain. Cependant, l’importance du capital humain, envisagé comme facteur critique pour le développement économique, n’est pas une nouveauté. En effet, déjà dans les années 1960, Schultz (1961), Becker (1962), Mincer (1969) et Nelson et Phelps (1966) soulignaient la grande importance de l’«investissement dans les personnes». Les nouveaux modèles de croissance endogène, nés des contributions pionnières de Romer (1986) et Lucas (1988), en surmontant les restrictions du progrès technologique, implicites dans le modèle de Solow, mettent l’accent sur l’accumulation du capital humain comme source déterminante de la croissance économique.
D’après les contributions de Becker (1962) et les développements de Lucas (1988), à propos de la théorie de la croissance endogène, le capital humain est envisagé comme un input productif, comme que le capital physique et le travail. La croissance économique résulte des contributions de cet input, et les différents taux de croissance entre les pays s’expliquent, fondamentalement, par les différences au rythme de l’accumulation du capital humain. Une autre face du capital humain, initialement citée par Nelson et Phelps (1966) et, postérieurement, reformulée par les nouvelles théories de croissance, se réfère à l’impact positif qu’il a sur la capacité d’innover de l’économie. L’éducation, comme élément du capital humain, surgit de cette façon, comme intimement associée au processus d’innovation. En effet, une population avec un niveau de scolarité élevé, en plus d’augmenter la probabilité d’occurrence d’innovations, tend à absorber avec une plus grande facilité les innovations technologiques. Ceci, à son tour, fait apparaître une accélération du processus de diffusion technologique, à l’intérieur de l’économie, qui se traduit par une augmentation de la croissance économique.
L’éducation formelle (ou niveau de la scolarité) est habituellement considérée comme la composante la plus significative du capital humain (Schultz, 1961, 1963, 1993 ; Becker, 1962). Pour cela, beaucoup d’études utilisent ces deux concepts indistinctement. Il existe déjà certaine évidence empirique montrent que c’est, essentiellement, à travers l’impact sur la capacité d’innovation et de diffusion technologique que le capital humain (plus concrètement l’éducation) influence le taux de croissance des économies (voir par exemple, Benhabib et Spiegel, 1994).
Ainsi on considère l’importance de l’interaction du capital humain au niveau de la capacité d’innovation et pas tellement comme simple facteur de production (perspective ancienne de Nelson et Phelps, 1996).
Les relations éducation/croissance sont fondées sur trois hypothèses :
De ce qui est exposé en 1 et 2, on peut déduire qu’entre le capital humain et le progrès technologique, il existe une interaction réciproque. 17
La troisième prédiction souligne un aspect essentiel dans l’analyse des questions du capital humain, notamment sa complémentarité avec les activités de R&D et le capital physique. Elle suggère que les politiques macroéconomiques qui ont affecté les taux d’innovation et l’investissement (en capital physique) tendent à influencer la recherche relative des travailleurs en fonction de leur niveau de qualification. De cette façon, les gouvernements pourront augmenter le niveau moyen de scolarité de leurs populations, non seulement au moyen des politiques éducatives mais, de manière indirecte et complémentaire, grâce à l’appui des activités de R&D. De façon additionnelle, les subventions publiques à l’éducation, en contribuant à l’augmentation de la rentabilité des activités de R&D, pourront accélérer le progrès technologique 18 . Bertel et Lichtenberg (1987) présentent des observations concordantes avec la première prévision; ils constatent que la recherche relative des travailleurs qualifiés diminue au fur et à mesure que le stock de capital physique vieillit, quand on est dans un processus de « dégénération technologique » et/ou faible innovation. D’un autre côté, le travail de Benhabib et Spiegel (1994) soutient empiriquement la troisième prévision.
« Hirshleifer (1996) élargit le cadre de cette fonction de capital humain en avançant que celui-ci sera critique, dans la mesure où augmente la capacité de réaction des personnes, non seulement envers les situations de constants changements technologiques, mais aussi face à des situations de grand doute, notamment des crises économiques non-prévues. » (cf. Aurora Teixeira, 1997, p. 31).
«Scherer et Huh (1992) mettent en évidence l’existence d’une corrélation positive, signifiante d’un point de vue statistique, entre le niveau de qualification (technique) des gérants/entrepreneurs et les dépenses des entreprises en R&D. (cf. Aurora Teixeira, 1997, p. 31)