§ 2 - Les cercles de jeu au XIXème siècle, de la tolérance à l’autorisation

En raison de leur caractère privé, les cercles, associations de plus de vingt individus formées dans des buts souvent austères, échappaient aux pénalités de l’article 410 du Code pénal. Par contre ils ne pouvaient se former qu’avec l’agrément du gouvernement, conformément aux prescriptions des articles 291 et 292 du même code et de la loi du 10 avril 1834 qui instauraient un régime d’autorisation préalable 235 . En effet, de manière parfaitement discrétionnaire, l’administration pouvait autoriser ou non la constitution d’un cercle, autoriser ou non la tenue de jeux de hasard (en plus des jeux de commerce) dans la salle de jeux et tolérer ou non l’admission plus ou moins libre du public dans ces établissements. Certes, l’article 410 du Code pénal interdisait toujours la tenue publique de jeux de hasard et les tribunaux pouvaient toujours essayer de poursuivre les établissements un peu trop ouverts au public, ce qui arriva parfois, mais l’incertitude liée à la positivité de l’article 4 du décret du 24 juin 1806 et les apparences d’intimité et de fermeture que se donnaient toujours ces établissements leur conféraient une protection relative vis-à-vis des tribunaux.

Leur soumission à l’administration, par contre, était bien réelle. Cette situation permit à la puissance publique de contrôler étroitement la création et le fonctionnement de ces établissements et d’établir une distinction entre les cercles des villes non thermales – également appelés « cercles de ville » – (A) et les cercles annexés aux casinos des villes d’eaux, ancêtres des casinos (B). Bien qu’il n’existât légalement qu’une seule catégorie de cercles, ces derniers bénéficiaient d’une tolérance plus large. Prévenons le lecteur que s’il cherche dans les lignes suivantes l’exposé d’un dispositif juridique logique et rigoureux, il risque d’être déçu.

Notes
235.

Article 291 du Code pénal : « Nulle association de plus de vingt personnes, dont le but sera de se réunir tous les jours ou à certains jours marqués pour s’occuper d’objets religieux, littéraires, politiques ou autres, ne pourra se former qu’avec l’agrément du Gouvernement, et sous les conditions qu’il plaira à l’autorité publique d’imposer à la société ». L’article 292 prévoit quant à lui les sanctions relatives à la violation de ces dispositions (C-A. Delest, Le jeu et le régime des jeux,op. cit., pp. 170-171). La loi du 10 avril 1834 (Duv., t. XXXIV, p. 58) étendit ces prescriptions à toutes les associations alors même qu’elles ne se réuniraient pas tous les jours ou à certains jours marqués.