Section 1 - Les conditions préalables à l’habilitation, ou l’organisation du marché des jeux

Les textes qui réglementent l’autorisation du jeu imposent un certain nombre de conditions aux candidats à l’habilitation, et si l’on pouvait en ce domaine parler de service public, nous dirions volontiers que ces conditions déterminent le mode de gestion du service. Mais au moins peut-on dire qu’elles ont pour effet d’organiser le marché des jeux. En effet, les textes législatifs et réglementaires non seulement « cloisonnent » le marché des jeux en différents secteurs (casinos, courses de chevaux, courses de lévriers, paris sur les parties de pelote basque, loteries locales et jeux de La Française des jeux), mais il peut leur arriver, en plus, de déterminer la nature juridique des organismes bénéficiaires de l’habilitation et de fixer, éventuellement, leur composition, leur fonctionnement et leurs pouvoirs. Certes les titulaires de l’autorisation sont également soumis à un ensemble de contrôles postérieurement à l’acquisition de leur privilège, et dont l’acceptation conditionne l’habilitation, mais, pour des raisons de clarté, nous ne les considérons pas comme des conditions « préalables », et leur étude sera faite dans le chapitre II consacré au contrôle des opérations de jeu.

D’un secteur de jeu à l’autre, les conditions préalables à l’habilitation peuvent se révéler plus ou moins nombreuses. Ainsi les secteurs des casinos et cercles de jeu (§ 1) ou encore celui des paris sur les courses apparaissent-ils de ce point de vue comme les plus réglementés (§ 2). A l’inverse, il ne semble pas nécessaire d’évoquer dans cette section les cas des paris sur les parties de pelote basque, des loteries locales et des jeux de La Française des jeux. Les premiers sont confiés aux sociétés de courses de chevaux autorisées à organiser le pari mutuel dans les conditions fixées par la loi du 2 juin 1891 ; les conditions préalables à leur habilitation sont donc les mêmes qu’en matière de paris sur les courses de chevaux. Pour ce qui est des loteries locales, régies par les articles 5 à 7 de la loi du 21 mai 1836, leur organisation n’est soumise à aucune condition préalable. Enfin, le cas des jeux de La Française des jeux est plus délicat. Alors que dans les autres secteurs le gouvernement fut amené à préciser les conditions de l’habilitation des opérateurs que la loi désigne, en ce domaine, le gouvernement détermine avec une liberté totale les conditions d’exploitation des jeux pour lesquels il a reçu une habilitation de la loi. Ainsi la Loterie nationale fut-elle, de 1933 à 1978, exploitée en régie. De plus, La Française des jeux est le seul opérateur bénéficiant d’une habilitation générale et intemporelle, octroyée par décret, pour créer des jeux et en fixer les conditions de fonctionnement. Ce système, qui n’empêche cependant pas l’autorité de tutelle de contrôler la quantité d’offre de jeu émise par la société, doit être analysé comme un tout 1202 , à défaut de quoi, nous risquerions de compromettre la clarté sa présentation. Aussi l’aborderons-nous dans la seconde section de ce chapitre.

Notes
1202.

En effet, les deux questions qui se posent en ce domaine, à savoir l’étendue de l’habilitation législative donnée au gouvernement pour déroger à la prohibition légale des loteries et celle de l’étendue de la compétence de La Française des jeux concernant la création de jeux nouveaux, se trouvent étroitement mêlées.