III.2.2.2.1. Simulation des données empiriques enregistrées sur les mots en référence à l’hypothèse de l’acquisition précoce d’une connaissance exhaustive du fonctionnement de la langue.

Le premier volet des simulations des courbes d’effet de position du regard établies sur le traitement des mots a été réalisé en référence à la situation idéale où les exemples rencontrés dans les premières phases de l’apprentissage de la lecture seraient suffisamment nombreux et diversifiés pour que les enfants puissent en déduire une représentation exhaustive des principes organisateurs de leur langue. Ces circonstances autoriseraient les items tardifs à bénéficier pleinement des connaissances acquises en référence aux premiers items assimilés, en vertu des recouvrements de structures existant entre les éléments constitutifs des deux ensembles de mots. Dans ces conditions, tout mot écrit, indépendamment du moment de son introduction dans l’apprentissage de la lecture, est supposé posséder au moins un voisin parmi les mots assimilés précocement. Soulignons encore qu’il s’agit de conditions idéales, qui ne font pas intervenir les mots précédemment sélectionnés pour représenter de manière réaliste le savoir lexical précoce des enfants. Les simulations actuelles respectent scrupuleusement la démarche développée par Benboutayab (2004) pour la modélisation des données enregistrées auprès des adultes. Conformément à cette démarche, donc, l’adoption du principe d’association systématique d’un mot présenté avec un voisin connu (au moins) autorise à élever la probabilité de réaliser une inférence lexicale (correcte ou incorrecte) sur la base d’un CLIP partiel dérivé de ces mots à sa valeur maximale de 1. En conséquence, la probabilité d’accepter correctement un mot partiellement reconnu correspond ici à la simple somme des probabilités d’occurrence des différents CLIPs pouvant être construits sur la base du percept rencontré.

Les graphiques de la Figure 51 présentent les proportions de réponses correctes théoriques (courbes roses) et observées (courbes bleues) auprès des élèves du Cycle 3, suivant la position de fixation imposée. Les résultats sont présentés séparément pour chaque liste expérimentale considérée, de la Liste 1 (i.e. premiers mots acquis) à la Liste 4 (i.e. derniers mots acquis). La distance séparant les courbes théoriques et empiriques a été mesurée au moyen de la RMSD, dont les valeurs ont été reportées sur chaque graphique. Les valeurs théoriques calculées pour la Liste 1 approchaient de manière très satisfaisante les résultats obtenus pour les mots appartenant à cette liste, tant sur le plan de la hauteur que de la forme de la courbe d’effet de la position du regard. Les prédictions théoriques restaient cependant moins précises en regard des mots acquis après la première année de scolarité. En particulier, la distance entre les courbes empiriques et théoriques tendait à s’accentuer à mesure que les mots considérés ont été introduits tardivement dans l’apprentissage des enfants. Cette tendance est attestée par l’augmentation progressive des valeurs de RMSD.

Figure 51. Proportion de réponse correctes observées auprès des élèves du Cycle 3 (courbes bleues) et calculées (courbes roses) pour les mots inclus dans les Listes 1, 2 et 4 suivant la position de fixation imposée.

Les courbes théoriques ont été calculées avec une probabilité d’identification de la lettre fixée a de 1, un ratio d’asymétrie de .16 et un taux de diminution de la lisibilité des lettres bright estimé à .11. Ces résultats s’entendaient pour des conditions idéales où tous les mots présentés possédaient au moins 1 voisin parmi les mots précoces. La distance séparant les deux courbes, mesurée par l’écart quadratique moyen (RMSD), a été reportée sur chaque graphique.