Annexe 3. Caractéristiques des stimuli utilisés dans la seconde étude.

Remarque préliminaire :

Au moment de la construction de la présente expérience, la base de données informatisée Lexique (New, Pallier, Ferrand et Matos, 2001) n'avait pas encore été publiée. Alors que les informations lexicales présentées dans BRULEX avaient été établies sur la base d'un corpus de textes littéraires publiés entre 1919 et 1964, comprenant 23,5 millions de mots, les normes correspondantes dans LEXIQUE ont été obtenues à partir d'un ensemble de texte plus récent, parus entre les années 1950 et 2000, et comprenant 31 million de formes orthographiques. Le traitement de ces textes, extraits de la base FRANTEXT, a débouché sur la sélection de 130 000 entrées distinctes, comprenant notamment des déclinaisons verbales et formes de pluriel non répertoriées parmi les 35 746 items du Micro Robert (Robert, 1986) retenues par les auteurs de BRULEX. Cela considéré, il nous a semblé nécessaire de réévaluer la validité de notre sélection initiale en tenant compte de ces normes plus actuelles.

Variables contrôlées :

1. Fréquence lexicale :

• Fréquence Formelle : la présente mesure correspond à une évaluation de la fréquence relative associée aux différentes formes orthographiques, toutes classes syntaxiques et significations confondues. Les estimations figurant dans le BRULEX ont été reprises de la base de donnée publiée par le Centre de Recherches pour un Trésor de la Langue Française (Imbs, 1971). Elles correspondent au nombre d'occurrence d'une chaîne de caractères donnée, rapporté à un total de 100 millions, pour un corpus de textes littéraires parus dans le courant de la seconde moitié du 20eme siècle.
• Conformément aux recommandations de Zevin et Seidenberg (2003), l’adéquation des items précoces et tardifs sur le plan de la fréquence a ultérieurement été vérifiée au moyen de normes de fréquences indépendantes, tirées de bases de données LEXIQUE (New, Pallier, Ferrand et Matos, 2001) et MANULEX (Lété, Sprenger-Charolles & Colé, 2003 ?). LEXIQUE présente un comptage de nombre d’occurrence par million pour 130 000 formes orthographiques distinctes, établi à partir d’un corpus de textes littéraires publiés entre 1950 et 2000, extraits de la base textuelle Frantext développée par l'INALF-Nancy (devenu aujourd’hui l’ATILF). Une information d’usage complémentaire est en outre fournie pour chaque entrée sous la forme d’un décompte du nombre de pages Internet contenant l’item d’intérêt, sur un total de 15 millions de pages Françaises. MANULEX présente pour sa part une évaluation de la fréquence d’occurrence par million de 48 886 mots, dérivée de l’analyse de 54 manuels scolaires utilisés entre la première et la dernière année d’école primaire et pondérée par une mesure de dispersion des items à travers les ouvrages considérés. Cette base de données fournit entre autre une estimation précise de la régularité avec laquelle un mot a été rencontré par un enfant à la fin de sa scolarité élémentaire. Ces contrôles supplémentaires ont globalement confirmé l’appariement de l’ensemble de stimuli sur le plan de la fréquence, exception faite des mots de la liste 1 dont la fréquence s’est avérée significativement supérieure à ceux de la seconde liste, d’après les normes de LEXIQUE.
• Fréquence des digrammes : cette mesure représente la moyenne des logarithmes décimaux de la fréquence textuelle de tous les digrammes (i. e suite de deux lettres consécutives) constituant le mot. Ce calcul est basé sur les normes de fréquence obtenues par Content et Radeau (1988), pour chaque digramme, suivant la position initiale, interne ou finale qu'ils occupent dans les mots. Ces valeurs fournissent une estimation du degré de régularité des formes orthographiques séquentielles des mots.
• En complément de ce premier appariement, l’homogénéité des stimuli sur le plan de leur structure infra-lexicale a été vérifiée au moyen des informations disponible dans la base de donnée Lexique. Ces analyses ultérieures ont confirmé l’appariement des mots précoces et tardifs sur le plan de la fréquence des digrammes (F(3,76)=1.007 ; p=.3945), des trigrammes (F(3,76)=.846 ; p=.4730), des syllabes (F(3,76)=1.328 ; p=.2716), des graphèmes (F(3,76)=1.521 ; p=.2159).

1. Longueur des mots : cette variable a été estimée en termes de nombre de lettres, de phonèmes et de syllabes.
2. Classe grammaticale: plusieurs recherches ayant suggéré l'existence de traitements spécifiques dépendants de la classe grammaticale des items considérés (Cole & Segui, 1994 ; Deutsch, Frost & Forster, 1998 ; Munte & collègues, 2001), seuls des noms ont été introduits dans les différentes listes expérimentales. Il faut cependant noter que 8 noms de la liste 1, 7 noms de la liste 2, 6 noms de la liste 3 et 5 noms de la liste 4 sont homographes homophones d’une déclinaison verbale et/ ou d’une forme adjectivale dans de rares cas. Les normes de fréquences disponibles dans MANULEX (Lété, Spenger-Charolles et Colé, 2003 ?) établissent toutefois la supériorité systématique de la fréquence cumulée des formes nominales à la fin de la scolarité élémentaire.
3. Voisins orthographiques: des résultats robustes en faveur de l'influence du nombre de voisins orthographiques sur la reconnaissance des mots ont été rapportés, bien que la nature facilitatrice ou inhibitrice de ces effets sur les décisions lexicales reste encore discutée (Ziegler & Perry, 1998). La densité du voisinage orthographique d'un mot est définie par le nombre de mots différents qu'il est possible de créer en ne modifiant qu'une seule lettre du mot cible, tout en préservant les positions des lettres restantes (Coltheart, Davelaar, Jonasson & Besner, 1977). A partir de cette définition, la mesure des voisins orthographiques proposée dans le BRULEX a été obtenue au moyen d'un calcul effectué sur la forme orthographique de base des items, incluant les marques diacritiques.

Le tableau ci-dessous rappelle, pour chacune des 4 listes expérimentales, les valeurs moyennes de fréquence lexicale (FREQ et LOG FREQ), de fréquence des digrammes (DIGR), de nombre de phonèmes (PHON), de lettres (LETTRE) et de syllabes (SYLLABE), de voisins orthographiques (V.ORTH) et d'imageabilité (IMA). Le tableau rappelle également qu’en complément de BRULEX, la fréquence des mots sélectionnés a été ultérieurement vérifiée au moyen des normes de LEXIQUE (suivant un comptage d’occurrence basé sur des textes littéraires réunis dans le corpus de FRANTEXT, LEXIQUE 1 et suivant un comptage d’occurrence réalisé sur des pages Internet LEXIQUE 2) et de MANULEX. Les résultats des différentes analyses par items réalisées sur la base de ces données sont présentés dans la dernière colonne du tableau. Dans la majorité des cas, aucune différence significative n'a été observée entre les différentes listes. Les tests PLSD de Fisher révèlent toutefois une fréquence moyenne plus élevée pour les mots de la liste 1 que pour ceux de la seconde liste, d’après les normes de LEXIQUE (Lexique 1 : p=.0386 et Lexique 2 : p=.0432).