4. Présentation du plan de la thèse

L’ambition de ce travail ne consiste pas, toutefois, à construire, à travers l’approche hédonique, une méthode d’évaluation alternative en milieu urbain, au sens de l’analyse coûts-avantages. Il s’agit surtout de proposer un cadre méthodologique permettant d’appréhender conjointement les dimensions spatiales et temporelles du processus de capitalisation des gains d’accessibilité dans les valeurs immobilières.

En nous appuyant sur l’ouvrage du boulevard périphérique Nord de Lyon, nous tentons de mettre en évidence les effets à la fois spatiaux et temporels de l’amélioration du réseau de transport au sein de l’agglomération lyonnaise sur les prix de l’immobilier durant la période 1990-2002.

Une première série d’interrogations concerne la forme spatiale de la zone de capitalisation. Les premières générations d’étude de l’impact foncier des infrastructures de transport s’appuyaient sur une définition a priori de la zone d’impact de l’infrastructure, cette dernière prenant la plupart du temps la forme d’un corridor de capitalisation formé de deux bandes étroites bordant le tracé de l’ouvrage (Ryan, 1999). Cette méthode est largement insatisfaisante, d’autant plus que les schémas de déplacement propres aux villes contemporaines, liés aux structures urbaines polycentriques, peuvent induire une distorsion non négligeable entre gains d’accessibilité et distance d’accès à l’infrastructure. L’un des enjeux de ce travail consistera à déterminer l’emprise spatiale du processus de capitalisation, en mobilisant des outils d’analyse spatiale récents permettant de détecter la présence éventuelle de multiples discontinuités spatiales.

La seconde série d’interrogations est liée à la dynamique temporelle du processus de capitalisation. L’hypothèse d’une capitalisation précoce des gains d’accessibilité potentiels, précédant l’ouverture effective de l’ouvrage est à cet égard centrale, compte tenu de la durée importante qui sépare généralement l’annonce d’un nouvel équipement de sa mise en service effective. Les anticipations quant aux bénéfices futurs de l’infrastructure peuvent donc enclencher, bien avant l’ouverture effective, des modifications importantes des valeurs immobilières, notamment sous l’impulsion des promoteurs immobiliers. Les méthodes traditionnelles de mesure de la capitalisation immobilière des bénéfices liés à une infrastructure, fondées sur une comparaison des valeurs foncières ou immobilières prévalant avant et après sa mise en service, peuvent donc conduire à une sous-estimation importante du phénomène. Enfin, une attention particulière sera portée au développement d’une approche spatio-temporelle : seule une approche croisant ces deux dimensions permet en effet d’appréhender la modification du schéma spatial de capitalisation au cours des différentes étapes de mise en œuvre des projets d’infrastructure, depuis l’annonce du tracé jusqu’à la mise en service. L’ouverture effective de l’ouvrage permet en effet aux différents acteurs d’appréhender directement des caractéristiques n’ayant fait l’objet, jusque là que d’anticipations : non seulement la nature exacte des gains d’accessibilité procurés par l’ouvrage, mais également l’intensité et l’étendue des nuisances occasionnées. Les corrections éventuellement apportées aux anticipations formulées dans la période précédant l’ouverture de l’infrastructure sont par conséquent susceptibles de modifier substantiellement l’intensité et/ou l’emprise spatiale du phénomène de capitalisation.

Dans un premier chapitre, nous reviendrons sur la méthode généralement retenue pour appréhender l’évaluation d’une infrastructure de transport en milieu urbain fondée sur l’analyse traditionnelle de la théorie du surplus et nous présenterons les limites d’application d’une telle méthode pour évaluer un ouvrage de transport dans le contexte urbain.

Dans le chapitre 2, après avoir rappelé les fondements de l’économie urbaine qui ont mis en évidence les arbitrages entre coûts de transport et coûts de logement en fonction des revenus des ménages, nous reviendrons et expliciterons plus précisément la théorie de la capitalisation des biens publics locaux. Puis nous introduirons la méthode des prix hédoniques qui, malgré ses limites, est à la base de la conceptualisation de notre modèle de valorisation des bénéfices engendrés par la mise en service du périphérique nord de Lyon dans les prix des logements du marché immobilier de l’agglomération lyonnaise.

Le chapitre 3 s’attachera à affiner et à compléter la présentation de la capitalisation en s’appuyant essentiellement sur les diverses études de cas récentes menées sur le thème de la capitalisation des gains d’accessibilité, ce qui nous permettra de poser les bases de notre approche méthodologique du phénomène de la valorisation immobilière des effets induits par le périphérique Nord de Lyon.

Enfin, les chapitres 4 et 5, nous conduirons principalement à approfondir les deux phénomènes de structure temporelle et spatiale de la capitalisation immobilière. Nous chercherons à déterminer d’une part à quelle vitesse s’effectue la valorisation immobilière des bénéfices engendrés par la mise en service d’une nouvelle infrastructure de transport en nous appuyant sur le cas du périphérique Nord de Lyon. D’autre part, nous montrerons que l’ouverture de l’ouvrage a un effet sur la forme spatiale de la capitalisation immobilière qui n’est pas toujours linéaire.