PREMIÈRE PARTIE : Le cadre théorique et méthodologique

CHAPITRE PREMIER : Historique de la notion

1. Définition du complément circonstanciel dans la tradition classique

1.1. Le circonstanciel dans les grammaires depuis le XVIe siècle

Il faut signaler tout d’abord qu’au seizième siècle, la grammaire française était profondément influencée par la grammaire latine. C’est avec la première grammaire scolaire de Lhomond que commence une première tentative d’introduire la grammaire dans les écoles. À l’époque, on n’enseignait que le latin aux élèves dans les classes. Mais il faut savoir que la rupture définitive avec le latin ne s’est faite qu’en 1780 1 .

Quant à la notion de circonstance et de complément circonstanciel, elle semble remonter à une origine très ancienne. Jean-Claude Chevalier souligne qu’on attribue généralement à l’abbé Girard la paternité de la dénomination « circonstanciel » 2 . Il voit aussi que cette dénomination se trouvait dans la tradition grammaticale latine mais sous des dénominations différentes. Par exemple, elle prend le nom de régime secondaire ou complément secondaire chez Palsgrave (p. 160.), elle prend le nom d’adjoinct dans la Gramère de Ramus (p. 255.), elle peut être trouvée aussi dans l’analyse logique des fonctions essentielles de la langue ou de l’oratio chez Sanctius et Scioppius (p. 362.).

Il est à noter aussi qu’après la grammaire de Port-Royal, on a assisté à de nombreuses tentatives grammaticales toutes fondées sur la logique. Circonstances et circonstanciel se trouvaient donc soumis à l’analyse uniquement logique des propositions. C’est ce que dit J.-C. Chevalier à propos de la grammaire du Père Buffier (1709) :

‘« Se fondant sur la vieille notion logico-grammaticale decomplétude, elle va fixer les fonctions essentielles de la proposition par le moyen de la commutation. Elle va aussi décrire les éléments circonstanciels qui modifient les éléments de fonction essentielle et peuvent être tenus pour des expansions. Ces deux types répondront à deux classes différentes de complémentation » 3 . ’

Malgré ces différentes appellations linguistiques de circonstanciel, on ne peut guère lui reconnaître un statut grammatical évident. Tantôt il est rangé parmi les constituants habituels de la phrase « régimes directs ou indirects », tantôt il est rejeté parmi les éléments logiques de la phrase. Mais on peut constater que dans la rhétorique de cette époque, circonstance et circonstanciel avaient toutefois d’autres définitions.

Notes
1.

Cf. André Chervel, …et il fallut apprendre à écrire à tous les petits français, histoire de la grammaire scolaire, Paris, Payot, 1977, p. 62.

2.

Cf. Jean-Claude Chevalier, Histoire de la syntaxe , naissance de la notion de complément dans la grammaire française (1530-1750), Genève, Droz, 1968, p. 611, n. 23.

3.

Ibid., p. 610. Voir aussi pp. 611-614.