QUATRIÈME CHAPITRE : Autres approches récentes

1. L’approche de Ludo Melis

L’idée de départ de Melis est de considérer qu’« un circonstant ne peut être un terme d’un terme de la phrase ; le verbe constructeur de phrase doit être directement impliqué » 1 . Les circonstants qui font partie du groupe nominal de type : Le palais de Naples est vétuste, sont donc exclus. Si l’implication du verbe constructeur est une condition nécessaire, elle ne constitue toutefois pas une condition suffisante, sinon Pierre dans la phrase Pierre vient, serait à considérer comme un circonstant.

Pour Melis, la distinction entre actants et circonstants est nette. Par une analyse détaillée des compléments du verbe « aller », il a pu conclure que les actants sont des termes qui contribuent à l’interprétation du verbe et de la phrase. Le sujet est considéré toujours comme un actant vu sa construction obligatoire et par un changement des constituants avant (le sujet) et après le verbe (aller), par exemple, on peut obtenir des interprétations différentes de la phrase : Cette pendule va mal = fonctionne mal.

L’absence des compléments après le verbe entraîne aussi des changements dans l’interprétation : Le jardin va jusqu’à la rivière….* Le jardin va. En bref, les actants sont donc définis :

‘ « […] comme un groupe remplissant une place d’argument dans la structure sémantique ou syntaxique, du verbe, comme un groupe impliqué par la sous-catégorisation stricte ou comme un groupe auquel le verbe est incident, […] on fait appel, d’une manière ou d’une autre, à l’idée que le verbe est fondamentalement incomplet et qu’il appelle pour pouvoir fonctionner comme constructeur de phrase un ou plusieurs autres constituants » 2 . ’

Melis soutient l’idée que les circonstants sont des éléments contraints dans la phrase comme les actants, mais cette contrainte ne fonctionne pas de la même manière:

‘179. On a construit cette usine en trois mois. ’ ‘180. *On a construit cette usine pendant trois mois. ’ ‘181. On a travaillé à cette usine pendant trois mois.’ ‘182. *On a travaillé à cette usine en trois mois. ’ ‘183. On a occupé l’usine pendant trois jours. ’ ‘184. On a occupé l’usine en trois jours.

Les compléments de durée dans ces exemples sont sélectionnés par le verbe, comme les actants. Mais, contrairement à ce qui s’observe pour les actants, ils ne co-déterminent pas le sens du verbe 3 . Après la distinction fondamentale entre actants et circonstants, il passe à la distinction entre circonstants et opérateurs. Ceux-ci sont des éléments, des termes de la phrase qui ne sont pas sélectionnés par le verbe, ils pourront figurer librement dans toute phrase, quelle que soit sa construction.

On a deux sortes d’opérateurs : les opérateurs de négation et les opérateurs de restriction. Ceux-ci ne sont en effet ni des prédicats ni des circonstants.

‘« L’opposition des opérateurs et des circonstants se fonde sur le fait que ces derniers sont sélectionnés par le verbe et que leur apparition est donc conditionnée par le verbe » 4 . ’
Notes
1.

Ludo Melis, Les circonstants et la phrase : étude sur la classification et la systématique des compléments circonstanciels en français moderne, Belgique, Presses universitaires de Louvain, 1983, p. 17.

2.

Ibid., p. 18.

3.

Cf. Ludo Melis, 1983, p. 28.

4.

Ibid., p. 29.