3.2.2. Les circonstants qui expriment une fréquence élevée

Ce sont des circonstants du temps de type toujours, souvent et chaque + un syntagme nominal exprimant un moment temporel. On peut constater de même que dans cette catégorie, il y a les circonstants qui expriment une fréquence absolument élevée et les circonstants qui expriment une fréquence moins élevée. Les circonstants qui expriment la fréquence absolument élevée sont du type : toujours, chaque + un syntagme nominal temporel. Les circonstants de ce type supposent que le procès soit réalisé dans le temps dans tous ses moments.

Constatons aussi que la position préférentielle de toujours dans la phrase est après le verbe. Cela correspond le plus souvent, notamment quand cet adverbe détermine un verbe d’état, à une continuité dans le comportement des personnages qui peut être un des traits qui composent leur portrait physique ou moral. Mais parfois toujours prend le sens de l’adverbe aspectuelencore :

‘« Avec son patrimoine qu'il allait toucher bientôt, il pouvait, d'abord, fonder un journal ; ce serait le début ; ensuite, on verrait. Quant à lui, il ambitionnait toujours une chaire à l'École de droit ; et il soutint sa thèse pour le doctorat d'une façon si remarquable, qu'elle lui valut les compliments des professeurs. Frédéric passa la sienne trois jours après ». (ES, p. 152.)’ ‘« Frédéric fit un signe d'assentiment. Il attendait que Des­lauriers parlât. Au moindre mot d'admiration, il se serait épanché largement, était tout prêt à le chérir ; l'autre se taisait toujours ; enfin, n'y tenant plus, il lui demanda d'un air indifférent ce qu'il pensait d'elle ». (ES, p. 122.)’ ‘« Il se tenait sans avancer ; les deux petits chiens jap­paient toujours. Enfin Rosanette parut, enveloppée dans une sorte de peignoir en mousseline blanche garnie de dentelle, pieds nus dans des babouches ». (ES, p. 207.)’

Dans les autres cas, il prend le sens de l’adverbe duratif continuellement :

‘« Ses yeux délaissant à gauche le pont de pierre de Notre‑Dame et trois ponts suspendus, se dirigeaient tou­jours vers le quai aux Ormes, sur un massif de vieux arbres, pareils aux tilleuls du port de Montereau ». (ES, p. 123.)’ ‘« Dès que Frédéric entrait, elle montait debout sur un coussin, pour qu'il l'embrassât mieux, l'appelait un mignon, un chéri, mettait une fleur à sa boutonnière, arrangeait sa cravate ; ces gen­tillesses redoublaient toujours lorsque Delmar se trouvait là ». (ES, p. 228.)’

Mais les circonstants composés avec le mot chaque occupent de préférence les positions initiales dans la phrase :

‘« Bien qu'il connût Mme Arnoux davantage (à cause de cela, peut‑être), il était encore plus lâche qu'autrefois. Chaque matin, il se jurait d'être hardi ». (ES, p. 254.)’ ‘« Chaque fois, il éprouvait une angoisse, une peur indéterminée. Puis il entendait claquer, sur le sable, les pantoufles de la bonne ; ou bien Mme Arnoux elle‑même se présentait. Il arriva, un jour, derrière son dos, comme elle était accrou­pie, devant le gazon, à chercher de la violette ». (ES, p. 369.)’ ‘« Il arriva dès deux heures au bureau du journal. Au lieu de l'attendre pour le mener dans sa voiture, Arnoux était parti la veille, ne résistant plus à son besoin de grand air. Chaque année, aux premières feuilles, durant plusieurs jours de suite, il décampait le matin, faisait de longues courses à travers champs, buvait du lait dans les fermes, batifolait avec les villageoises, s'informait des récoltes, et rapportait des pieds de salade dans son mouchoir. Enfin, réalisant un vieux rêve, il s'était acheté une maison de campagne ». (ES, pp. 144-145.)’

Les circonstants qui expriment une fréquence moins élevée, sont du type souvent. Ils supposent que le procès puisse ne pas être réalisé une fois, au moins, au cours de sa fréquence dans le temps :

‘« Frédéric, dès lors, multiplia ses visites. Il promettait au cocher de gros pourboires. Mais souvent, la lenteur du cheval l'impatientant, il descendait ; puis, hors d'haleine, grimpait dans un omnibus ; et comme il examinait dédai­gneusement les figures des gens assis devant lui, et qui n'allaient pas chez elle ! ». (ES, p. 369.)’ ‘« Frédéric, ayant épuisé tous les prétextes, assura qu'il avait été chez Mme Arnoux plusieurs fois, inutilement. Arnoux en demeura convaincu, car souvent il s'extasiait devant elle sur l'absence de leur ami ; et toujours elle répondait avoir manqué sa visite ; de sorte que ces deux mensonges, au lieu de se couper se corroboraient ». (ES, p. 422.)’ ‘« La pauvre Maréchale n'en avait jamais connu de meilleure. Souvent, quand elle considérait Frédéric, des larmes lui arrivaient aux paupières, puis elle levait les yeux, ou les projetait vers l'horizon, comme si elle avait aperçu quelque grande aurore, des perspectives de félicité sans bornes. (ES, p. 442.)’ ‘« Deux ou trois fois, en rentrant à des heures inaccoutumées, il crut voir des dos masculins dis­paraître entre les portes ‑, et elle sortait souvent sans vou­loir dire où elle allait. Frédéric n'essaya pas de creuser les choses. Un de ces jours, il prendrait un parti définitif ». (ES, p. 477.)’ ‘« Il s'était marié par tendresse pour sa fille, et ne voulait pas qu'on la tourmentât. Souvent elle portait une robe blanche en lambeaux avec un pantalon garni de dentelles ; et, aux grandes fêtes, sor­tait vêtue comme une princesse, afin de mortifier un peu les bourgeois, qui empêchaient leurs marmots de la fré­quenter, vu sa naissance illégitime ». (ES, p. 161.)’