Comment les entrées de capitaux affectent-elles la conduite de la politique monétaire dans les marchés émergents ?

C’est la question à laquelle nous essaierons de répondre tout au long de ce travail de recherche. Les modèles théoriques, notamment les modèles de crises ont pu démontrer que la mobilité des capitaux a, en effet, soumis les politiques économiques à des contraintes plus fortes et plus immédiates et a sensiblement resserré les marges de manœuvre des différents gouvernements. De bons fondamentaux limitent le risque de contagion de la crise et permettent aux gouvernements de disposer des marges de manœuvre nécessaires pour intervenir en cas de crise. Vouloir maintenir des fondamentaux sains semble nécessaire pour assurer une bonne conduite de la politique monétaire.

Les entrées de capitaux ont montré qu’elles peuvent financer les investissements et stimuler la croissance économique. Néanmoins, les capitaux étrangers peuvent provoquer une hausse des agrégats monétaires et créer par conséquent des pressions inflationnistes. Par ailleurs en induisant un dérèglement des fondamentaux, ces capitaux peuvent éventuellement conduire à une crise. Or, comme le montrent certains modèles de crise, lorsqu'un pays est sujet à une crise, il peut être amené à changer de régime de change affectant ainsi la conduite de la politique monétaire. Une bonne politique macroéconomique est alors de rigueur pour assurer le succès de la déréglementation.

Tous ces éléments permettent de conclure à un lien entre la nouvelle ligne dans laquelle s'inscrit la politique monétaire et les entrées de capitaux ayant caractérisé les marchés émergents.

A travers ce travail, nous essayons d'apporter les éléments qui peuvent éventuellement déterminer comment l’entrée massive de capitaux affecte l’efficacité de la politique monétaire dans les pays émergents retenus, et quelles sont les actions entreprises par ces pays pour y faire face ?

Cette question soulève deux importantes interrogations concernant :

Pour répondre à ces questions, ce travail de recherche comporte une étude en quatre étapes :

La première, fait l’objet du premier chapitre qui comporte une analyse de l’évolution des mouvements de capitaux depuis 1880, et tout particulièrement les entrées de capitaux dans les marchés émergents à partir de 1990. Nous exposons dans ce contexte les déterminants internes et externes des entrées de capitaux, ainsi que les différentes réformes structurelles mises en place par les pays émergents en question.

La deuxième étape (chapitre 2), retrace l’impact des entrées de capitaux sur les différentes variables macroéconomiques dans les marchés émergents, de manière à mettre en évidence les difficultés qui peuvent toucher leur politique monétaire. Cela est d’autant plus important pour les pays d’Amérique Latine qui ont mis en oeuvre des plans de stabilisation destinés à baisser leurs taux d’inflation élevés.

Dans les deux dernières étapes, nous abordons les stratégies de politique économique utilisées par les autorités des pays en question pour essayer de résoudre les problèmes générés par les entrées de capitaux.

Ainsi, le chapitre 3 porte sur les contrôles des entrées de capitaux. Dans ce contexte, nous exposons dans un premier point les mesures de contrôle les plus utilisées dans notre échantillon de pays, et dans une second point l’efficacité de ces mesures de contrôle.

Dans le chapitre 4, nous étudions la nouvelle conduite adoptée par la politique monétaire de chaque pays. Celle ci consiste à choisir une ancre nominale faisant office de cible et à mettre en œuvre les dispositifs et conditions nécessaires pour atteindre cette cible. Dans ce contexte, les marchés émergents ont opté dans un premier temps soit pour un objectif du taux de change, soit pour un objectif d'agrégat monétaire, pour se fixer finalement sur l'objectif d'inflation. Les caractéristiques de ce ciblage qui semble répondre le mieux aux attentes des pays émergents sont traitées plus longuement dans ce chapitre.