I-2-1- Les flux de capitaux intra régionaux

Dans ce paragraphe, nous allons expliquer comment les marchés émergents peuvent attirer certains investissements plutôt que d'autres, et notamment les IP.

D'un point de vue géographique, on peut penser que les pays d'Amérique Latine attirent les capitaux privés américains et les pays d'Asie du Sud Est attirent les capitaux privés japonais. Les tableaux 3 et 4 (annexe) présentent entre 1989 et 1994 les flux de portefeuille intra régionaux, respectivement en Amérique Latine et en Asie. On remarque que les pays d’Amérique Latine attirent principalement les flux en provenance des Etats Unis d’Amérique. A l'inverse de ce qu'on peut penser, seule une petite partie des entrées de capitaux à destination des marchés asiatiques est d'origine asiatique, le reste est plutôt américain. Les pays asiatiques en développement sont ainsi moins vulnérables à des reversements soudains des flux de capitaux en provenance du Japon que ne le sont les pays d’Amérique Latine quand il s’agit de capitaux d’origine américaine. Ce sont les capitaux américains qui ont le plus tendance à aller vers les autres pays. Ils sont en général attirés par les pays qui offrent les meilleures perspectives de croissance économique. Pour mesurer l’évolution de ces flux d’origine américaine vers d’autres pays, on distingue quatre groupes de pays 18  : les économies récemment industrialisées en Asie, les marchés émergents d’Asie, les pays d’Amérique Latine et les pays en transition.

Les graphiques I.7 (a et b) présentent respectivement en 1994 et 1995 la distribution des flux nets de portefeuille (titres et actions) dans les différents groupes de pays susmentionnés. La plus grande partie des actions est destinée aux pays d'Asie récemment industrialisés. La baisse du taux d’intérêt américain à cette période peut expliquer l'intérêt que portent les investisseurs américains à ces pays (tableau 5 19 annexe). Dès lors une croissance élevée des pays avec marchés financiers raisonnablement développés peut attirer les capitaux des pays développés avec un taux de croissance faible lorsque le taux d’intérêt mondial diminue au-dessous d’un seuil minimum.

Les pays d'Amérique Latine et les pays émergents asiatiques ont ensemble cumulé en 1994 la plus grande part d'actions et de titres. En 1995 en revanche, cette composition a changé pour les pays d'Amérique Latine. Cela peut s'expliquer éventuellement par le climat incertain qu'a véhiculé la crise du Mexique de 1994 dans cette région. Les pays émergents d'Asie ont enregistré en 1995 plus de titres que d'actions. Par ailleurs, on a vu que pour les pays asiatiques les flux de capitaux peuvent aussi être asiatiques et la part de ces flux , même si elle n'est pas majoritaire, est tributaire du niveau de croissance et du potentiel économique des différents pays.

Théoriquement, il est possible pour un pays d’attirer les flux de capitaux de portefeuille d’un autre pays avec un potentiel de croissance identique, à la seule condition, que celui-ci soit suffisamment élevé dans ces deux pays. Cela permet d’expliquer les flux de portefeuille intra- régionaux en Asie et le manque de tels flux en Amérique Latine (Chen et Khan 1997). Par exemple, en 1994, le Mexique a dû faire face à une hausse marquée des taux d’intérêt internationaux. Cette évolution s'explique par la reprise de l’expansion dans les pays industrialisés et en particulier par son accélération marquée aux Etats Unis ce qui a conduit les autorités monétaires à resserrer leur politique. Les resserrements des conditions de crédits sur les principaux marchés de capitaux et l’augmentation des rendements, qui les ont accompagnés, ont amené les investisseurs internationaux à remettre en question la part de leur portefeuille investie sur les marchés émergents.

Graphique I.7 : Flux nets de portefeuille en provenance des Etats-Unis (en millions de dollars)
Graphique I.7 : Flux nets de portefeuille en provenance des Etats-Unis (en millions de dollars)

Nous étudierons dans ce qui suit l'évolution de la part des IP parallèlement à la part des autres investissements et des IDE.

Notes
18.

Ces quatre groupes sont :

les marchés émergents d’Asie : Chine, Inde, Indonésie, Philippines et Thaïlande ;

les pays d’Asie récemment industrialisés : Hong Kong, Corée du Sud, Singapour et Taiwan ;

les pays d’Amérique Latine : Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Mexique, Uruguay et Venezuela ;

les pays en transition : Bulgarie, Tchécoslovaquie, Hongrie, Pologne et Russie.

19.

Le tableau 5 représente les flux nets d’investissement de portefeuille en Thaïlande classés par pays en 1994 et 1995, et il apparaît que Ong Kong et Singapour sont les fournisseurs les plus importants de la Thaïlande pendant ces deux années en matière de flux de portefeuille.