II-1-1- Les réformes structurelles externes

La libéralisation du compte de capital, un des piliers de la libéralisation financière, peut avoir plusieurs avantages pour la croissance économique. Parmi ces avantages, nous citons : l'amélioration de la capacité d’exploitation de l’épargne (à des coûts plus faibles que lorsqu’on exploite uniquement l’épargne domestique), le fait que les agents économiques domestiques puissent avoir la liberté de choisir où et comment emprunter et investir, une meilleure allocation des ressources à travers l’augmentation de la compétitivité des ressources financières, et l'augmentation de la capacité et de la disponibilité des ressources pour soutenir l’investissement et financer le commerce et les échanges.

Cependant, l’ouverture du compte de capital comporte certains risques si elle n’est pas accompagnée de réformes structurelles et de politiques macroéconomiques cohérentes.

Une analyse complète du rôle de la libéralisation du compte de capital nécessite une compréhension des engagements en matière de politique macroéconomique. Nous allons mettre l’accent sur certaines relations et variables clés considérées critiques, notamment, les interrelations entre, d'une part, la libéralisation du compte de capital et, d'autre part :

  • le développement des marchés financiers, des instruments et des institutions domestiques ;
  • les réformes sur les systèmes d’échange et du régime de change ;
  • le développement de la balance des paiements des pays ;
  • le rôle de la politique monétaire et de la politique du taux de change.

Dans ces relations, notre attention est d'abord portée sur la libéralisation des investissements directs qui représente une part importante des réformes du secteur réel. En second lieu, nous abordons la libéralisation des investissements de portefeuille, souvent associée aux réformes du secteur financier et au développement des marchés et des instruments financiers.

La libéralisation des IDE va souvent de pair avec les réformes ayant pour objectif de renforcer le secteur réel et le potentiel économique à l’exportation. Cela inclut : (i) les réformes des régimes d’investissement et des échanges ; (ii) les ajustements du taux de change pour améliorer la compétitivité ; et (iii) la libéralisation des contrôles de change sur les transactions internationales courantes. Une telle libéralisation du compte de capital, tend entre autres à soutenir le développement et la restructuration des différents secteurs à travers des injections de capitaux étrangers et une libéralisation de l’accès aux échanges financiers. Quant à la libéralisation des investissements de portefeuille, elle tend à être en phase avec les réformes et la libéralisation du système financier domestique, la libéralisation des taux d’intérêt, le développement des procédures indirectes de contrôle de monnaie et le renforcement des marchés bancaires et de capitaux.

Plusieurs raisons peuvent expliquer l’adoption d’une approche coordonnée et complète des réformes du secteur financier et de la libéralisation du compte de capital :

  • D’un point de vue macroéconomique, et étant donné les perspectives de la balance des paiements, la recherche de la stabilité du système financier domestique a une influence clé sur la croissance et la composition des mouvements de capitaux. De tels facteurs, sont généralement importants pour expliquer le volume et la nature des flux de capitaux. Les pays dont les marchés et les institutions financières sont développés attirent plus les flux de capitaux en portefeuille que les pays où ces marchés sont en voie de développement ;
  • L’ouverture du compte de capital peut avoir des implications positives dans la mesure où cette libéralisation aide à mieux développer la compétitivité et la diversification des marchés financiers. La complexité des marchés financiers domestiques peut être aussi améliorée si les banques étrangères sont autorisées à opérer directement sur le pays en question. L’important volume d’intermédiation et l’accroissement de la compétitivité qui peuvent accompagner la libéralisation du compte de capital peuvent cependant accroître la pression sur la protection des institutions financières domestiques et les affaiblir. Certains pays ont été confrontés à des crises bancaires ainsi qu’à des entrées soudaines de capitaux;
  • L’efficacité de l’utilisation des flux de capitaux pour améliorer la performance économique dépend du niveau de développement et de l’efficacité du système financier domestique. Ceci dépend à son tour de l’existence d’un système financier bien régulé et contrôlé et de l’élimination des sources d’échec des marchés. C’est pourquoi la libéralisation du compte de capital doit être compatible avec les réformes des marchés et des institutions financières domestiques ;
  • La réussite de l’ouverture du compte de capital nécessite l’existence d’un minimum d’instruments, des institutions et des marchés financiers pour assurer l’efficacité de la gestion de la politique monétaire et de la politique du taux de change. Une grande mobilité des capitaux rend les différents instruments monétaires mis en place pour atteindre les objectifs de la politique monétaire moins efficaces. Les instruments qui génèrent un coût élevé ou imposent des contraintes administratives aux banques (tel que le plafonnement des crédits ou des taux d’intérêt, ou d’importantes réserves non rémunérés) peuvent être plus facilement contournés via la désintermédiation à travers le compte de capital et deviennent ainsi moins efficaces ;
  • Les réformes peuvent aussi favoriser une synchronisation entre les réformes du secteur financier et la libéralisation des mouvements de capitaux. Les réformes du secteur financier incluent souvent une rapide monétisation de l’économie, et une période pendant laquelle la croissance des crédits dépasse les ajustements monétaires destinés à éliminer la répression financière. La libéralisation financière est souvent associée à un surplus initial du compte de capital de la balance des paiements reflétant l’amélioration des investissements et le retour des flux de capitaux.

La libéralisation du compte de capital doit être intégrée avec les schémas des politiques macroéconomiques et structurelles. L'idéal est d'arriver à maximiser les avantages de la libéralisation du compte de capital tout en minimisant les risques nécessaires à une approche de réforme complète. Par approche complète, on entend généralement la coordination de la libéralisation des flux de capitaux de portefeuille avec la libéralisation du secteur financier domestique et les réformes (la libéralisation du taux d’intérêt, le développement des procédures de contrôle indirect de la monnaie).

Le manque de coordination entre le secteur financier domestique et les réformes du compte de capital peut créer des distorsions et des incitations à réguler les mouvements de capitaux qui sont sans rapport avec les conditions économiques soulignées, ainsi les mouvements de capitaux risquent de créer une importante instabilité. D’un autre côté, il peut y avoir de bonnes raisons pour coordonner la libéralisation des investissements directs avec les réformes dont l’objectif est de renforcer le secteur réel et le potentiel d’exportation de l’économie, incluant les réformes des régimes d’investissement et des échanges, les ajustements des taux de change à l’amélioration de la compétitivité et la libéralisation des contrôles de change sur les transactions commerciales internationales.

Nous présentons dans ce qui suit les expériences des pays d’Asie du Sud Est et ceux d’Amérique Latine en matière de réformes dans le cadre de la libéralisation du compte de capital.