II-1-2-La mise en place des réformes structurelles dans les marchés émergents

La libéralisation des entrées et sorties de capitaux varie en fonction des priorités de chaque pays.

En Corée, le système financier a été développé à travers un certain nombre de mesures, dont le développement du marché monétaire, le renforcement des régulations et la transparence de la sécurité du marché local. Les améliorations opérationnelles ont été introduites sur le marché de capitaux avec l’introduction d’un système qui vise à informatiser les transactions en bourse. Plusieurs étapes ont été poursuivies pour améliorer et renforcer la régulation et la supervision du secteur financier. Le processus de libéralisation financière en Corée a touché particulièrement les flux de capitaux à travers de multiples interventions d'une part, sur les règles qui régissent les entrées et sorties d'IDE et d'IP et d'autre part, sur la gestion du solde du compte courant dans la balance des paiements. La Corée a poursuivi une politique progressive pour libéraliser le système financier domestique et le compte de capital, et promouvoir les sorties de capitaux en libéralisant petit à petit les limites sur les investissements sortants.

La politique monétaire a d’abord été conduite à travers des instruments directs (dont le plafonnement des taux prêteurs et l’orientation vers les secteurs prioritaires). L'évolution de la balance des paiements, en particulier celle du compte courant, a conduit le gouvernement à intervenir sur les marchés de la monnaie et du change. Entre 1986 et 1989, le compte courant a enregistré un excédent de plus en plus important reflétant ainsi des entrées massives de capitaux. Face à cet excédent, les autorités ont progressivement libéralisé le régime des importations. Plusieurs mesures ont été introduites au cours de cette période pour accompagner une libéralisation sans heurts des marchés de la monnaie et des capitaux en particulier. Parmi ces mesures : le relâchement des restrictions sur les paiements des transactions courantes ; l'introduction d'une égalité d'échange entre les titres ; l’élargissement de l’ensemble des institutions financières capables d’investir à l’étranger et la permission aux résidents d’investir directement dans les bons étrangers ; l'introduction d'un plafonnement des crédits en devise accordés par les banques étrangères ; et l'introduction progressive des banques étrangères et l'augmentation de leur champ d'action.

Par ailleurs, la libéralisation des investissements directs a encouragé les sorties de capitaux. Certains privilèges fiscaux destinés à attirer les IDE ont été réduits en 1987, et après le relâchement des contrôles sur les investissements, il n'y a plus de différences entre les entreprises d'investissement étrangères et leurs semblables domestiques. En parallèle, la banque centrale a entrepris des mesures afin de réduire les entrées nettes de capitaux en encourageant le remboursement des emprunts externes. Dans ce contexte, la position budgétaire a été consolidée pour pouvoir faciliter le remboursement de la dette publique en devise.

A partir de 1989, le compte courant a commencé à faiblir reflétant ainsi une dégradation de la situation budgétaire, une appréciation du taux de change réel et une augmentation de l’inflation. Les autorités ont répondu en encourageant les entrées de capitaux. Certaines des mesures précédentes, dont l’objectif est de limiter les entrées de capitaux ont été inversées, les banques off shore ont été autorisées à augmenter les fonds off shore et les limites des montants en devises qui peuvent être importés et vendus sur le marché local ont été diminuées. Les autorités ont aussi accéléré la libéralisation des entrées des investissements directs en supprimant tout plafond sur les montants des IDE approuvés automatiquement. Entre 1988 et 1996, plusieurs réformes visant le développement de la monnaie domestique, la sécurité du marché des changes et de la bourse ont été mises en place. En 1988, les autorités ont permis la libéralisation de quelques taux d’intérêt et un bon nombre d’entre eux ont été libéralisés en 1993. Les taux d’intérêt sur les dépôts ont été libéralisés en 1994, suivis par une libéralisation des dépôts à court terme en deux étapes en 1995.

Concernant les entrées de capitaux, en 1992 les non-résidents ont été autorisés à un accès limité à la bourse. En Corée, malgré l'instabilité des investissements de portefeuille par rapport aux investissements directs étrangers, il y a eu libéralisation sur les investissements de portefeuille, mais pas sur les IDE. Les entrées nettes de portefeuille ont doublé en 1992 reflétant ainsi l'ouverture partielle du marché de la bourse aux investisseurs étrangers. Le total des investissements nets étrangers dans le marché des actions domestiques est passé de 10% en 1992 à 12% en 1994, à 15% en 1995 et à 20% en 1996. En 1996, les non-résidents pouvaient investir dans les actions et titres domestiques à travers les fonds du pays et les titres coréens ont figuré à la bourse de Londres. La Corée a continué à être un exportateur net d'investissements directs pour finalement devenir un pays receveur d'entrées nettes au titre des investissements de portefeuille.

La Thaïlande a privilégié la promotion active des entrées de capitaux tout en limitant les sorties avec l'objectif d’augmenter l’épargne domestique, de promouvoir l’investissement et d'encourager une croissance économique rapide. Pour ce faire, la Thaïlande a entrepris plusieurs ajustements au début des années quatre-vingt telle que la dévaluation du baht de 14,8% en 1984 et le début d’une importante consolidation budgétaire. Elle a aussi mis en place des taxes et des réformes institutionnelles tout en développant ses marchés financiers. Cette politique, en plus d’un important écart positif des taux d’intérêt et d’un taux de change fixe, a considérablement promu les entrées de capitaux. De telles entrées ont contribué à améliorer et renforcer la performance économique et à augmenter l’ouverture de l’économie. Pendant les années quatre-vingt-dix, les entrées en devises ont été encouragées à travers plusieurs mesures tels que : l’élimination des restrictions sur les investissements étrangers, la garantie d'un plafonnement des taxes pour encourager les investissements directs dans certains secteurs, la réduction des taxes sur les dividendes rapatriés à l’étranger, le libre rapatriement des fonds investis, le remboursement des prêts et le paiement des intérêts par les investisseurs étrangers. En 1992, les autorités ont approuvé la mise en place d’une mesure bancaire internationale qui facilite l’accès au financement étranger et aux entrées à court terme. A contrario, avec la promotion des entrées de capitaux et la libéralisation du système de change, les contrôles sur les sorties de capitaux par les résidents ont été progressivement libéralisés. En 1990, les banques commerciales ont obtenu l'autorisation d'accorder des prêts pour des sommes limitées aux non-résidents en devise. En 1991, les résidents thaïlandais ont donc pu investir à l’étranger. Les taux d’intérêt et les contrôles de crédit ont été progressivement libéralisé, et en 1992, les plafonds des dépôts d'épargne et les taux de prêt ont été modifiés. La promotion thaïlandaise pour les entrées de capitaux combinés à une rapide croissance économique a contribué à des entrées massives de capitaux de l’ordre de 9 à 13% du PIB entre 1989 et 1995. La composition de ces entrées de capitaux a évolué dans le temps et s’est montrée représentative des réformes effectuées à ce sujet. Avec la mise en place de ces réformes, les entrées nettes d’investissements de portefeuille sont devenues plus importantes et les entrées nettes d’investissements directs ont contribué à renforcer le compte de capital. En 1996, les niveaux d’investissement et de croissance se sont détériorés face à une appréciation du taux de change et les entrées de capitaux et les exportations ont largement baissé. L’important déficit du compte courant, les taux d’intérêt élevés et l’augmentation de l’inflation ont rendu le pays vulnérable aux chocs externes.

L’Indonésie a cherché à maintenir un régime relativement libéral pour les sorties de capitaux et à libéraliser progressivement les entrées avec l’objectif d’attirer des capitaux étrangers pour favoriser la restructuration de l’économie. Dans cet esprit, l’Indonésie a ainsi concentré ses réformes économiques sur la réduction de la dépendance de l'économie à l'égard du secteur pétrolier. En plus de ces réformes, cette stratégie a entraîné la poursuite des politiques financières et de taux de change coordonnés, ayant pour objectif la création d'un environnement macroéconomique stable, et ce afin de promouvoir une croissance durable et une diversification économique. Les éléments clés de ces réformes depuis 1985 comportent :

En 1983 les taux d’intérêt ont été libéralisés et les contrôles des crédits directs sur le système bancaire partiellement éliminés. Les instruments du marché monétaire ont été introduits en 1984. Le 27 octobre 1988, un premier ensemble de mesures de politique financière a été introduit parmi lesquelles : l’exportation des matières premières non pétrolières, l'efficacité des banques et des institutions financières et l'efficacité de la gestion monétaire. Le 20 décembre de la même année, d'autres mesures ont été introduites afin d’encourager le développement du marché des capitaux et le financement des entreprises pour mobiliser, à long terme, davantage de fonds nécessaires au financement de l’investissement.

Ces changements ont été préparés en 1986 par les réformes sur le régime de change. En effet, en septembre 1986, la rupiah a été dévaluée d’environ 31% par rapport au dollar américain, passant de 1134 à1644 rupiahs par dollar. Tout au long de cette période, les réformes se sont focalisées sur l’ouverture de l’économie réelle à travers une libéralisation progressive des entrées des investissements directs. Celles-ci ont été libéralisées par l’augmentation des champs d'action de ces investissements, en allongeant la période après laquelle une entreprise doit revenir à des propriétaires locaux. L’Indonésie a aussi libéralisé les paiements et transferts pour les transactions internationales courantes, le marché de change a été développé et la vente des swaps sur le marché de change en devise a été libéralisée. Ces réformes ont été associées à une grande ouverture de l’économie et une croissance économique plus rapide.

Les réformes ont touché les secteurs financiers et réels. Elles ont été avant tout entreprises afin d’établir les marchés financiers, des institutions et des instruments favorables à un système fondé sur le marché. En 1983, les taux d'intérêt ont été libéralisés et les contrôles directs sur les crédits bancaires ont été partiellement allégés. Les instruments du marché monétaire ont été introduits en 1984. En 1987 les réformes structurelles prévues pour renforcer les opérations des marchés de capitaux ont été engagées, y compris celles qui portent sur les actions en devise et l’introduction de nouveaux instruments du marché des capitaux. Les autorités ont modifié leur contrôle monétaire en adoptant un ciblage des réserves internationales. Elles ont introduit une vente aux enchères quotidienne des instruments du marché monétaire et ont permis aux taux d’intérêt et aux taux de change d’être déterminés sur le marché. Les taux d'intérêt ont alors permis une plus grande flexibilité des actions de la banque centrale (BI), et les modifications apportées au niveau de la procédure du marché monétaire ont renforcé la capacité de la BI à réguler la liquidité. Il est important de signaler aussi que les réformes ont été entreprises pour améliorer le fonctionnement du marché de capital, étendre le rôle du marché en augmentant les fonds pour les investissements, en allongeant la maturité des instruments du marché et en élargissant la portée des marchés monétaires.

En 1989, les autorités ont libéralisé les entrées des investissements de portefeuille en éliminant les limites quantitatives sur les emprunts bancaires par les non-résidents. Les étrangers ont été autorisés à investir en bourse et à acquérir plus de 49% des actions en leurs noms. Les restrictions sur les entrées des investissements directs ont aussi été relaxées, notamment par la permission donnée aux non-résidents de vendre les devises directement aux banques commerciales au lieu de passer par la banque centrale. Par ailleurs, dans le contexte du maintien d’un taux de change réel stable, l’augmentation des taux d’intérêt s’est accompagnée d'une entrée substantielle de capitaux étrangers. Les flux nets de capitaux privés 20 ont ainsi enregistré un excédent en 1990 pour la première fois depuis 1985.

Les entrées de capitaux étrangers ont été essentiellement sous forme d’emprunts des banques commerciales convertis en monnaie nationale grâce aux swaps de la banque centrale, contribuant ainsi à la croissance de la masse monétaire. La restriction monétaire a été soutenue par un resserrement de la politique budgétaire dans le but de comprimer les pressions de la demande domestique. Cependant l’inflation a continué à augmenter. Les entrées liées au secteur bancaire étant excessives et compliquant dès lors la gestion macroéconomique, les autorités ont réimposé en 1991 des contrôles quantitatifs sur les emprunts off shore par les banques et les entreprises étatiques.

L’important écart des taux d’intérêt dans le contexte d’un taux de change stable et d’une rapide croissance du marché boursier a continué à promouvoir les entrées nettes de capitaux entre 1992 et 1996. Ces entrées ont pris la forme combinée de flux d'IDE et de portefeuilles nets. Elles ont été en partie compensées par une baisse des entrées de capitaux officiels et par une aggravation du déficit du compte courant. Les entrées ont aussi été stérilisées à travers des ventes publiques de titres de la banque centrale et à travers des opérations swap sur le marché des devises. En plus les autorités ont permis une large flexibilité du taux de change entre 1994 et 1996.

Conformément à son programme de restructuration économique, le Chili a libéralisé les entrées et les sorties de capitaux pour répondre aux considérations de la balance des paiements. Cela a nécessité une approche progressive des réformes. En matière d'instruments du marché monétaire, les mesures les plus importantes ont été effectuées en 1991 et en 1995. En 1991, les crédits garantis par les banques commerciales étrangères ont été exemptés des 20% des réserves obligatoires. A la place, un contrat de vente à réméré sur les emprunts étrangers en accord avec la Banque du Chili a été mis en place. En 1995, les institutions financières et bancaires ont obtenu la permission d’ouvrir des comptes de dépôt liquide au sein de la Banque Centrale du Chili (CBC). La CBC a cependant limité l’accès aux institutions financières à sa ligne de crédit et a baissé les taux d’intérêt indexés quotidiennement sur cette ligne de crédit.

Les réformes suscitées par la libéralisation du compte de capital au Chili ont aussi porté sur le régime de change. Tout au long des années quatre-vingt-dix et même avant, le régime de change a subi quelques changements tels qu’une dévaluation du peso en 1985 et un élargissement de la bande de fluctuation du taux de change, mais les réformes les plus marquantes ont eu lieu en 1992 et en 1996.

En 1992, le système de change est passé d’un ancrage par rapport au dollar américain à un ancrage par rapport à un panier de monnaie constitué du dollar américain, du deutsche mark et du yen japonais. Le taux de change central et la bande de fluctuation sont fixés quotidiennement en fonction de l’évolution de la valeur du panier de monnaie et des taux de change des monnaies au sein du panier en question.

En 1996, d’une part, les pondérations au sein du panier de monnaie ont changé, le dollar est passé de 45% à 80%, alors que le deutsche mark et le yen sont passées respectivement de 30% à 15% et de 15% à 5%. D’autre part, la marge de fluctuation du taux de change est passée de plus ou moins 10% à plus ou moins 12,5%.

En matière de libéralisation des entrées au titre des investissements de portefeuille et des investissements directs, d'importantes réformes ont été réalisées. En 1985, l'échange d'une obligation en devise contre une obligation en monnaie domestique a été autorisé. Concernant les entrées d’investissement en portefeuille, une autorisation a été accordée pour les résidents et les non-résidents d'acheter des « selected debt instruments » en utilisant de la devise non obtenue sur le marché de change officiel pour la conversion en peso. Cette autorisation a été retirée deux ans plus tard. En 1989, le compte financier de la balance des paiements a montré un renforcement remarquable et a enregistré un excédent qui reflète les entrées des investissements directs. La politique monétaire a été resserrée pour compenser l’accélération de l’inflation, et les entrées des investissements de portefeuille ont augmenté mettant ainsi en évidence l’importance de l'écart du taux d’intérêt. Dans ce contexte, les autorités ont abandonné leur politique de recherche d’une appréciation réelle du taux de change et ont élargi la bande de fluctuation du taux de change. Avec une parité glissante (crawling peg), le peso a été déprécié quotidiennement sur la base de la différence entre l’inflation domestique pendant les mois précédents et l’inflation étrangère prévue. La bande de fluctuation du taux de change a aussi été "élargie"  entre 1985 et 1988. En 1993, les impôts payés par les investisseurs étrangers ont été réduits à 42% alors qu’ils étaient d’environ 49,5%, et les impôts sur le revenu brut des non-résidents ont aussi été baissés de 40% à 35%. Au Chili, la libéralisation du compte de capital a été combinée à l’évolution des politiques et instruments macroéconomiques : les instruments pour le contrôle monétaire indirect ont été renforcés, les dispositions de change ont été modifiées pour permettre une plus grande flexibilité du taux dans une bande de change.

Les autres économies d’Amérique Latine ont procédé de manière différente que le Chili au niveau de l’application des réformes structurelles. Pendant les années quatre-vingt, leurs économies reposaient essentiellement sur les exportations de matières premières, les entreprises ont souvent été propriété de l'Etat, ce qui rendaient les investissements très peu rentables et le choix des investisseurs quelque peu douteux. La situation économique des pays d'Amérique Latine n'a pas été des plus brillantes, et la récession américaine a accentué la crise d'endettement de 1982 de ces pays. Au cours de la décennie suivante, l'important déclin des déficits publics et l' accélération de cette politique dans la seconde moitié des années quatre-vingt-dix ont bien marqué ces pays. Depuis, les autorités cherchent à changer de politique dans la mesure où, contrairement à ce qui s'est passé lors des récessions des décennies précédentes, les récessions des années quatre-vingt-dix ne les ont pas incité à assouplir les politiques macroéconomiques.

Les réformes entreprises par ces pays dans ce contexte visent à la fois la baisse de l'inflation, qui a constitué un problème majeur pendant les années quatre-vingt ; une plus grande efficacité économique ; l’entrée d’investissements directs étrangers ; et dans un certain nombre de pays, une croissance de la productivité.

Une partie non négligeable des réformes a été réalisée à travers les privatisations et au détriment de l’investissement public avec le risque de fragiliser le taux de croissance potentiel de l’économie. D'autres transformations structurelles ont été entreprises tel que le renforcement du secteur bancaire. Celui-ci a été largement ouvert désormais aux investisseurs étrangers, notamment en Argentine et au Brésil.

Comme d’autres pays d’Amérique Latine en ont déjà fait l’expérience avant lui, au Brésil l’ouverture de l’économie, bien que nécessaire, a peut-être été trop précipitée. En effet, les importations et les entrées de capitaux ont dans un premier temps permis au gouvernement d’atteindre plus facilement ses objectifs en matière de lutte contre l’inflation, toutefois elles ont contribué à la déstabilisation de l’économie, à travers l'aggravation du déficit extérieur et en créant un manque de compétitivité. Le Mercosur 21 a permis au Brésil de compenser en partie ces effets négatifs, du moins jusqu’à ce que avec la dévaluation du real, il prenne davantage conscience de ses faiblesses institutionnelles. Les tensions au sein du Mercosur ont également été aggravées par une conjoncture économique internationale défavorable et les difficultés économiques auxquelles ont été confrontés ses deux piliers l’Argentine et le Brésil.

Pour l'Argentine, les réformes structurelles entreprises pendant le années quatre-vingt-dix ont réussi à la mettre sur la voie d'une croissance durable. En dépit des programmes de stabilisation qui ont caractérisé les années quatre-vingt-dix, l'Argentine a connu des réformes du système financier fondées sur la libéralisation des échanges et des mouvements de capitaux. Les droits d'exportation et la plupart des contingents d'importation ont été éliminés. Les droits des entrées de capitaux ont été révisés à la baisse dans le but d'instituer la libre circulation des capitaux liés aux investissements directs et aux investissements de portefeuille. Par ailleurs, le phénomène de privatisation a touché environ toutes les grandes entreprises de la place. L'accès au marché intérieur de nouvelles entreprises, souvent internationales a été facilité, et les restrictions à l'établissement des banques étrangères ont été levées.

Au Mexique, les réformes structurelles se sont essentiellement fondées sur la dévaluation du peso dans l'objectif de stabiliser les prix. Dans le cadre de la dérégulation de l'économie intérieure le contrôle étatique des prix a été supprimé. Quant à la dérégulation de l'économie extérieure, elle s'est traduite d'une part, par la libéralisation du commerce extérieur, qui a coïncidé avec l'entrée du Mexique au GATT en 1986, et d'autre part, par la levée des restrictions sur les investissements étrangers, à la suite de l'entrée du Mexique dans l’ALENA en 1994.

Il est à noter qu'en Amérique Latine, pendant les années quatre-vingt-dix, les pays qui ont suivi un processus agressif de libéralisation, à travers une réduction de leurs taux d'inflation et le maintien ou l'établissement d'un système commercial et financier libre, ont davantage reçu des capitaux que ceux qui n’ont pas opté pour ce même processus.

En se référant à l’approche générale de la libéralisation du compte de capital, l'ouverture des marchés de capitaux doit être préparée avec soin. En particulier, s’assurer que le système financier est suffisamment bien géré, que le pays dispose d’une réglementation adéquate et des instances de supervision nécessaires pour que ce système se conforme de plus en plus aux normes internationales et soit en mesure d’absorber les chocs auxquels il est exposé.

L'expérience des différents pays en matière de libéralisation du compte de capital montre qu' à l'exception du Chili, dont l'expérience est plus ancienne que les autres pays de la région, les pays d'Amérique Latine ont fondé leurs réformes en majorité sur la privatisation du secteur public. De leur côté, les pays d'Asie du Sud-Est 22 ont accordé plus d'importance à la libéralisation des entrées d’investissements directs. Celle-ci s’inscrit en général dans le cadre de la stratégie de la restructuration des secteurs réels de l'économie. Cette stratégie comprend l’élimination des barrières au commerce, les ajustements du taux de change, et la libéralisation des restrictions sur les paiements et les transferts courants.

La libéralisation des flux de capitaux est généralement coordonnée avec les réformes du secteur financier domestique, en particulier la libéralisation des taux d’intérêt domestiques et les réformes sur le marché de change.

Au Chili et en Corée, les réformes du secteur financier tendent à précéder la libéralisation du compte de capital. Ils ont tous deux opté pour une approche progressive des réformes. En revanche, l’Indonésie a libéralisé les sorties de capitaux au début du processus, la libéralisation des entrées de capitaux a eu lieu bien plus tard et progressivement. Celle ci a été réalisée dans le cadre de la libéralisation du compte de capital qui a aidé à promouvoir la restructuration, et l’amélioration de la compétitivité du système financier domestique. De son côté, la Thaïlande a ouvert son économie aux entrées de capitaux, plus particulièrement les entrées d’investissement de portefeuille, plus rapidement que les autres pays mais la libéralisation des sorties de capitaux s’est faite par étapes. La crise de change en Thaïlande a illustré les risques lorsque l’approche de la libéralisation ne couvre pas toutes les réformes nécessaires. Dans ce cas, la force des institutions financières et le développement des instruments monétaires indirects a causé un ralentissement au niveau de la libéralisation du compte de capital.

En Amérique Latine, la privatisation des sociétés d’Etat et les stratégies de diversification industrielle ainsi que l'ouverture du marché local ont davantage encouragé les investissements directs étrangers qui ont constitué une grande part des entrées de capitaux.

Dans tous les pays, les entrées nettes des capitaux privés ont accompagné la libéralisation du compte de capital et tous les pays ont enregistré un excédent dans leur balance des paiements. Les flux d’investissements de portefeuille ont dominé les flux d’investissement directs étrangers. La balance des paiements a été moins affectée en Indonésie que dans les autres pays par la libéralisation du compte de capital, peut être parce que les restrictions sur les sorties de capitaux étaient libéralisés beaucoup plus tôt. 

Notes
20.

les flux nets de capitaux privés sont assimilés aux portefeuille nets directs, et autres investissements diminués des capitaux officiels nets plus les erreurs et omissions nettes dans la balances des paiements.

21.

Le Mercosur est le troisième plus grand bloc d'intégration économique au monde après l'ALENA et l'Union Européenne. Il comprend entre autre l'Argentine et le Brésil.

22.

La Corée constitue ici une exception dans la mesure où elle a libéralisé les investissements directs étrangers à court terme seulement, et non pas à long terme.