II-2- L'impact sur le taux de change

L'objectif des contrôles de capitaux est d'arriver à réduire l'appréciation du taux de change réel. Plusieurs études ont été faites pour montrer l'impact des contrôles sur le taux de change.

Certains économistes tels que Cowan et De Gregorio (1997) 75 ont remarqué que l'augmentation de l'inflation et la pression sur le taux de change liée aux entrées de capitaux ont conduit les autorités monétaires à introduire des contrôles de capitaux spécifiques. Comme il a été déjà mentionné, avec la mise en place des contrôles, les autorités escomptent une diminution de l'appréciation du taux de change réel. Or d'après les données suivantes, il apparaît que pour le Chili, la baisse du taux de change n'a eu lieu qu'en 1993, en 1999 et en 2001. La plus importante a été celle de 1999 puisque le taux de change réel est passé de 111,11 à 105,37. En Malaisie, 1998 a été marquée par une baisse importante du taux de change puisqu'il est passé de 103,31 en 1997 à 82 en 1998 en terme réel, traduisant ainsi une appréciation de la valeur de la monnaie. En effet, pour stopper la dépréciation du taux de change en Malaisie, les autorités ont eu recours aux contrôles de capitaux. Pour les Philippines, un passage du taux de change effectif réel de 108,77 à 88,71 a été enregistré entre 1997 et 1998. Ceci montre que c'est bien après la mise en place de ces restrictions que les résultats en matière du taux de change se sont fait ressentir et encore cette baisse n'est que temporaire (données du tableau III.1). Toutefois, il est important de signaler qu’à cette époque, plusieurs variations de fondamentaux sont expliquées par la crise asiatique de 1997.

Pour le cas du Chili, sous une politique efficace, on peut prévoir une réponse moins prononcée du taux de change réel aux nouveaux flux de capitaux, c'est à dire que l'effet des entrées de capitaux sur le taux de change réel est moins important, ce qui traduit une efficacité des contrôles de capitaux à diminuer l'appréciation du taux de change réel. Au Chili, les contrôles de capitaux ont plutôt éliminé l’appréciation de la monnaie.

Pour évaluer l'efficacité des contrôles sur les entrées de capitaux et son impact sur le taux de change réel, Edwards (1998) a utilisé deux méthodes. Dans la première, il a utilisé des données trimestrielles et les a testées par un modèle VAR pour des périodes avec et sans contrôles. Il a testé la réponse du taux de change réel aux innovations des entrées de capitaux. Sous une politique efficace, on s'attend à ce que la réponse du taux de change réel soit moins prononcée en période de contrôles. Dans la seconde, Edwards a testé la réaction à un choc de la taxe équivalente entre 1987 et 1996. Il a divisé la durée d'observation en deux périodes : de 1987 au deuxième trimestre de 1992, et du troisième trimestre 1992 à 1996. Dans cette étude, Edwards obtient deux importants résultats :

Ainsi, pour Edwards, par rapport aux innovations en matière de flux de capitaux, le taux de change réagit de la même manière avec ou sans restrictions sur les entrées de capitaux. Une innovation au niveau des restrictions sur les entrées se manifeste par une infime dépréciation réelle. L'effet est cependant de courte durée, et disparaît au bout de quatre trimestres. Par ailleurs, le log du taux de change réel a tendance à retrouver sa position d'équilibre plus rapidement lorsqu'il y a des mesures de restrictions.

Ces résultats se heurtent cependant à une limite importante. Les contrôles de capitaux n'ont pas été établis depuis longtemps. Il peut donc sembler logique d'observer que leur impact sur le taux de change réel est limité et de courte durée. Ces résultats confirment les résultats de Valdes-Prieto et Soto (1996) 76 3 qui permettent de conclure, pour le cas du Chili, que les réserves obligatoires non rémunérées n'affectent en aucun cas le niveau du taux de change réel à long terme. En outre l'impact semble très peu significatif sur le taux de change réel à court terme. Dans d’autres pays, la portée des contrôles de capitaux a été ajustée en fonction des modifications de la maturité des flux de capitaux.

Compte tenu de l’efficacité limitée des contrôles de capitaux sur le total des entrées de capitaux, il n’est pas évident de trouver un impact à long terme de ces mesures de contrôle sur le taux de change. En effet, pour le cas du Chili, le taux de change réel a connu une appréciation de l’ordre de 4 % par an en moyenne entre 1991 et 1994. Les autorités chiliennes ont avancé que cela pouvait s’expliquer par l’aspect non rémunéré des réserves obligatoires. Cependant la littérature sous-jacente n’apporte pas de preuves que ces contrôles peuvent avoir un effet prolongé sur le taux de change réel. Edwards (1998) démontre que le comportement du taux de change réel n’est pas affecté par les contrôles de capitaux. Soto (1997) 77 3, dégage pour le cas du Chili une relation négative entre les réserves obligatoires et la volatilité du taux de change. Un taux de 30 % des réserves obligatoires devrait réduire la volatilité du taux de change d’environ 20 %. Ceci peut éventuellement s’expliquer par la procédure suivante des contrôles de capitaux adoptée par le Chili : tous les paiements courants et les transactions autorisées de capitaux doivent transiter par le marché officiel. Cette procédure permet d’isoler les flux commerciaux de la volatilité des flux de capitaux, en particulier les transactions de portefeuille.

Notes
75.

cités dans Edwards (1998 b)

76.
77.