Introduction. Chapitre 1. La tonotopie

1.1. Au niveau périphérique

Avant d’étudier en détail l’organisation tonotopique de la cochlée il est nécessaire de rappeler brièvement le mécanisme de transduction d’un message acoustique en signal interprétable par le cerveau.

1.1.1. Codage d’un son

Le codage d’un son implique toute une série de processus débutant au niveau de l’oreille externe, partie visible de l’oreille constituée du pavillon et du conduit auditif externe. L’anatomie du pavillon permet d’une part d’amplifier les pressions aériennes de l’ordre de 5 à 20 dB pour les fréquences de 1,5 à 7 kHz, mais fournit également des indices sur la localisation de la source sonore. Le signal sonore est dirigé vers le tympan qui marque la limite entre l’oreille externe et l’oreille moyenne et va transformer la conduction aérienne du son en conduction osseuse.

L’oreille moyenne est constituée du tympan et de la chaîne des osselets (marteau, enclume et étrier) et relie la membrane tympanique à la fenêtre ovale de l’oreille interne. Son rôle est de résoudre les problèmes d’impédance entre l’oreille externe, située en milieu aérien, et l’oreille interne, en milieu liquidien. Une pression exercée sur la membrane tympanique provoque des vibrations de la chaîne des osselets ainsi qu’une concentration de l’énergie à transmettre. La fenêtre ovale subit alors une augmentation de pression proportionnelle à la différence de diamètre entre la membrane tympanique et la membrane de la fenêtre ovale (cette dernière étant environ 20 fois plus petite).

L’oreille interne est une structure complexe qui possède des fonctions dans le maintien de l’équilibre grâce aux canaux semi-circulaires et aux structures otolithiques (utricule et saccule), et dans l’audition avec la cochlée (Figure 1).

Figure 1 : appareil auditif périphérique schématisé
Figure 1 : appareil auditif périphérique schématisé

La cochlée peut être considérée comme un transducteur qui convertit le son (stimulus vibratoire) dans une forme interprétable par le système nerveux. Localisée à l’intérieur de l’os temporal, la cochlée mesure environ 35 mm et est séparée en trois canaux délimités par deux membranes qui s’étendant sur presque toute sa longueur. Deux de ces canaux sont le canal vestibulaire et le canal tympanique. Remplis d’un liquide appelé perilymphe, ils sont en connexion par une ouverture située à l’apex de la cochlée appelée hélicotrème. Si le canal vestibulaire est bordé à son extrémité par la fenêtre ovale, le canal tympanique aboutit quant à lui à la fenêtre ronde, qui maintient la pression liquidienne en compensant les mouvements de la fenêtre ovale. Le troisième canal, appelé canal cochléaire, est rempli d’un liquide appelé endolymphe. Dans ce canal se situe l’organe récepteur de l’audition : l’organe de Corti (Figure 2).

Figure 2 : Coupe de la cochlée permettant de visualiser les trois canaux présents à l’intérieur.
Figure 2 : Coupe de la cochlée permettant de visualiser les trois canaux présents à l’intérieur.

L’organe de Corti est constitué des cellules sensorielles, réceptrices de l’information auditive, qui reposent sur la membrane basilaire. Ces cellules sont dites ciliées car des terminaisons apicales, nommées stéréocils, sont présentes à leur sommet et sont en contact avec la membrane tectoriale. Selon leur localisation, morphologie et connections, deux types de cellules ciliées peuvent être distinguées : les cellules ciliées internes (CCI) et les cellules ciliées externes (CCE).

Les CCI sont réparties sur une seule rangée et sont au nombre d’environ 3500 chez l’humain. Chaque CCI est innervée par plusieurs fibres nerveuses afférentes transportant l’information dans les voies auditives centrales jusqu’au cerveau. Des fibres efférentes innervent ces fibres afférentes. Les CCE sont au nombre de 12000 et sont réparties sur 3 ou 4 rangées, parallèlement aux CCI. Les CCE ont très peu de connections nerveuses avec les fibres afférentes, mais sont directement innervées par des fibres efférentes.

Lors d’une stimulation auditive, la force de pression exercée sur la fenêtre ovale va provoquer un mouvement de la perilymphe. Les parois assez souples du canal endolymphatique vont suivre ce mouvement de façon ondulatoire et induire un déplacement relatif de la membrane basilaire par rapport à la membrane tectoriale. Ce déplacement va provoquer un fléchissement rythmique des stéréocils en direction de l’axe de la cochlée. Des canaux potassiques vont ainsi s’ouvrir à l’extrémité des stéréocils. Des neurotransmetteurs vont être libérés à l’intérieur de la cellule, provoquant la dépolarisation des cellules ciliées et une augmentation de la décharge vers les fibres du nerf auditif et les voies auditives centrales.