Etape n°2 : étude de la plasticité des cartes tonotopiques lors d’une réhabilitation auditive

De nombreuses études conduites chez l’animal ont mis en évidence la capacité de réorganisation du cortex auditif primaire en cas de perte auditive abrupte. Les travaux réalisés par Mc Dermott et al. (1998), puis par Thai Van et al. (2002, 2003) tendent à prouver qu’une perte d’audition peut également engendrer une réorganisation chez l’humain. L’amélioration de la capacité à discriminer des fréquences aux alentours de la fréquence de coupure (fc) de la perte auditive de sujets cochleo-lésés serait le reflet de cette réorganisation et aucune hypothèse périphérique, comme la présence d’otoémissions ou de zones mortes cochléaires, n’est parvenue à expliquer cette amélioration (Thai Van et al., 2003). Ces études chez l’humain n’ont toutefois pas déterminé tous les paramètres liés à la plasticité des cartes tonotopiques. Si le caractère abrupte d’une perte est certainement un critère essentiel à l’apparition de cartes réorganisées (Rajan et al., 1998 ; Thai Van et al., 2002), en revanche aucune information n’est fournie sur la durée nécessaire à l’apparition de cette plasticité ni sur sa capacité continuelle de remodelage : est-ce que la réorganisation des cartes est unique ou bien peut elle survenir à plusieurs reprises, notamment lors d’un appareillage auditif ?

Pour répondre à ces questions, nous avons testé des sujets présentant une perte auditive abrupte sur les hautes fréquences et candidats à un appareillage. Nous les avons suivis avant puis tout au long de leur réhabilitation. Est-ce que la réhabilitation des fréquences perdues peut modifier leur représentation centrale, jusqu’à retrouver une organisation semblable à celle d’un sujet sain ? Nous avons mesuré si l’amélioration locale à discriminer des fréquences observée à la fréquence de coupure de la perte avant appareillage se dégradait ou non et déterminé l’éventuel décours temporel de ce phénomène. La connaissance de ce dernier paramètre apporterait des indications supplémentaires sur les phénomènes de plasticité qui se mettent en place. Selon qu’ils interviennent à court ou à long terme, des processus centraux différents seraient impliqués.

Ainsi, cette étude présente une grande importance tant à un niveau fondamental qu’à un niveau plus pratique puisqu’elle permet à la fois de mieux objectiver les mécanismes centraux de plasticité et de mettre l’accent sur l’utilité d’un appareillage auditif chez les sujets cochleo-lésés.