2.2. Discussion

Que représentent réellement les modifications des performances perceptives des sujets ?

Notre étude ainsi que celles de Thai Van et al (2002, 2003) et de McDermott et al. (1998) se basent sur l’hypothèse selon laquelle l’amélioration des performances perceptives serait le reflet indirect d’une sur-représentation des fréquences au niveau cortical. Or, il n’existe aucune preuve concrète de cela, ni d’ailleurs que ces modifications représentent véritablement une plasticité centrale. Cependant, plusieurs indices viennent étayer l’hypothèse d’une relation entre les performances discriminatives et l’organisation corticale. Premièrement, des travaux conduits chez l’animal (Recanzone et al., 1993) et chez l’humain (Menning et al., 2000) ont mis en évidence un lien entre la capacité à discriminer des fréquences et la représentation corticale. Ensuite, aucune hypothèse périphérique, comme la présence d’otoémissions acoustiques ou de zones mortes cochléaires, n’a permis d’expliquer ce phénomène local d’amélioration des performances de discrimination fréquentielle (Thai Van et al., 2003). De plus, des régions mortes cochléaires sont présentes chez ces sujets cochleo-lésés, ce qui est en accord avec l’hypothèse selon laquelle la déprivation de certaines zones cochléaires est une condition indispensable pour observer une réorganisation (Rajan et Irvine, 1998).

En dépit de tous ces indices encourageants, quelques points restent à éclaircir. En effet, il est nécessaire de déterminer les raisons pour lesquelles aucune modification ni des performances de discrimination d’intensité, ni de la détection de trous temporels, ni de la détection de variations fréquentielles n’a pu être observée chez les sujets avec une perte abrupte aux hautes fréquences (Buss et al., 1998). L’utilisation conjointe de techniques d’imagerie et de discrimination fréquentielle est donc nécessaire pour déterminer objectivement origine de l’amélioration fréquentielle.