Dans la cité chinoise

Afin d'étendre la distribution d'eau potable à la cité chinoise, par souci d'hygiène publique mais aussi pour le profit espéré, la ‘Shanghai Waterworks Company’ soumet des propositions au Daotai de Shanghai. Les autorités et la population chinoises ne sont toutefois pas prêtes à un tel changement ; le prix de l'eau proposé est trop élevé pour la population chinoise et la guilde des transporteurs d'eau s’oppose à ce système qui entraînerait la perte de sa source de revenu et fait obstacle à l’installation des canalisations. Ces conflits, inhérents à tout processus de modernisation, se retrouvent aussi à Tianjin : les porteurs d’eau y font pression sur la société anglaise en refusant d’évacuer les eaux sales de leurs clients ; ils parviennent à maintenir leur travail en transportant l’eau des bornes-fontaines, installées par la société, aux résidents chinois. 419

La municipalité chinoise de Shanghai défend les avantages du système d'eau potable à l’aide de publicités publiées dans le Shen Bao 420 , lorsqu’une entreprise chinoise prend ce marché dans la ville chinoise. En 1902, est construite une usine assurant la distribution en eau potable, financée par un homme d’affaires chinois. Nanshi est la première zone à être approvisionnée ; en 1911, la zone de Zhabei possède à son tour une usine qui fournit de l'eau potable aux foyers et on installe des fontaines d'eau à l'extérieur des maisons, plusieurs foyers pouvant ainsi s'y approvisionner. En 1928, la zone de Jiangwan est incluse dans le réseau et en 1937, dans la zone de Pudong, est installé un système de distribution d’eau potable. Dans les années 30, le réseau de distribution en eau potable s’étend à la majorité du territoire de la ville de Shanghai. Cette amélioration des conditions de vie est principalement le fait des ports ouverts où les notables chinois sont influencés par les infrastructures installées sur les concessions. Sous le régime nationaliste, ils sont sollicités par la municipalité du Grand Shanghai pour financer l’usine de traitement des eaux de Pudong. 421 Selon un ingénieur hong-kongais, l'approvisionnement en eau potable a un rapport direct avec l'allongement de l'espérance de vie moyenne enregistrée chez les Shanghaiens. 422 La création, au sein de la municipalité du Grand Shanghai, du Bureau des Utilités Publiques marque un tournant dans l’amélioration du système de distribution d’eau. Son directeur, Huang Bai-qiao, prend l’initiative en lançant une enquête sur la qualité de l’eau produite par les deux usines chinoises ; celle-ci étant mauvaise, un laboratoire de contrôle des eaux est installé dans chaque entreprise où des analyses sont effectuées tous les jours afin de vérifier la pureté de l’eau ; les résultats sont transmis au Bureau des Utilités Publiques qui les compare aux résultats des analyses venant des laboratoires des concessions, ce qui permet de présenter les mêmes critères de qualité que les services sanitaires voisins. Grâce à l’action de la municipalité, qui fait pression sur les deux entreprises, la qualité de l’eau peut ainsi s’améliorer. 423

Notes
419.

Delphine Spicq, ‘La politique de l’eau et de l’hydraulique urbaine dans la plaine du Nord de la Chine: le cas de Tianjin, 1900-1949’, p 96 et 120.

420.

Xin Ping, Cong Shanghai faxian lishi : xiandaihua jincheng zhong de Shanghairen ji che shehui shenghuo 1927-1937, (Découvrir l’histoire à partir de Shanghai : la vie social des shanghaiens dans le processus de modernisation), Shanghai, Renmin Chubanshe, 1996, Article du Shen Bao, le 15 février 1884, p 380.

421.

Christian Henriot, Shanghai 1927-1937 , Elites Locales et Modernisation dans la Chine Nationaliste , Paris, Editions de l’EHESS, 1991, p 205.

422.

Christian Henriot, op.cit., p 380.

423.

Christian Henriot, Shanghai 1927-1937 , p 206.