2.2. Réforme de l’hygiène publique dans la Concession française après 1930

A partir de 1927, date où le Conseil d’administration municipal est remplacé par une Commission municipale provisoire, les services municipaux sont réorganisés et le secrétaire du Conseil devient responsable de tous les services, voyant son titre remplacé, en juillet 1928, par celui de Directeur général des Services municipaux, lui-même étant placé sous les ordres du président de la municipalité, à savoir le consul. Cette réorganisation s’accompagne d’un renouvellement et d’une augmentation du personnel, avec pour mot d’ordre l’efficacité et la compétence des employés alors qu’auparavant la municipalité était peu regardante sur la qualité des candidats.

Dans ce contexte de modernisation, est créé en 1930 le Service d’hygiène et d’assistance publique, désormais indépendant du service médical. Pour le diriger, la municipalité engage un médecin français, ainsi qu’un capitaine des pompiers de Paris pour gérer le service d’incendie ; face aux nombreux risques d’incendies sur la concession, les améliorations s’imposent également dans ce secteur. En 1931, la création du service d’hygiène et d’assistance est complétée par la mise en œuvre d’un service de vaccinations, d’un dispensaire, d’un laboratoire rattaché au service sanitaire, accompagnée d’une réglementation pour contrôler la pratique de la médecine sur la concession. Pour surveiller le personnel chinois, un règlement est mis en œuvre, avec une échelle de solde dans le but d’accroître sa motivation ; des fiches individuelles sont établies, qui comportent des informations sur les congés pris, les promotions, les arrêts maladies, l’hospitalisation, les démissions ou les licenciements. Corollairement, la municipalité décide de renvoyer 700 employés qu’elle considère comme incompétents et effectue une démarche similaire avec le personnel européen, licenciant les employés dont le sérieux et la qualité du travail font défaut. 491 La police, elle-même, est ‘assainie’ de ses inspecteurs corrompus.

En décembre 1932, est créé le poste de directeur administratif pour contrôler l’ensemble des services municipaux. L’année suivante, les écoles municipales et privées de la concession sont surveillées par un inspecteur de l’enseignement. En 1934, un Bureau des Etablissements Classés voit le jour, ainsi que l’infirmerie spéciale du dépôt qui assure les premiers soins à des malades amenés par la police avant d’être transférés vers de plus grandes structures hospitalières. L’année suivante est fondé le laboratoire municipal tandis que le service des Travaux est perfectionné. Pour 1936, est entérinée l’augmentation du salaire des chefs de services, Secrétariat administratif, Finances et Contentieux, Hygiène et Assistance, Instruction publique, et leur titre est remplacé par celui de directeur ; la raison invoquée est que ces services ont pris de l’importance depuis 1930, ce qui entraîne un accroissement des tâches. La municipalité envisage également de développer le service des Etablissements classés et de l’Inspection du travail qui appartiennent au service de l’Hygiène et de l’Assistance publique ; la volonté de développer ces deux domaines découle, entre autres, de la politique du gouvernement chinois qui exige l’application dans les concessions de sa législation sur le travail : la municipalité française cherche à jouer au bon élève et à valoriser la rigueur de sa propre réglementation pour limiter les velléités de contrôle du gouvernement municipal chinois.

La guerre de 1937 freine la transformation de la municipalité. La prochaine étape prévue était la création, en parallèle avec la direction administrative, de la direction des services d’utilité sociale qui aurait regroupé les services d’Hygiène et d’Assistance ainsi qu’un nouveau service spécialisé dans les fraudes alimentaires, le service de l’Instruction publique, le service des Etablissements classés et de l’Inspection du travail, désormais indépendant du service d’Hygiène publique, et un service d’état-civil ; était également envisagée la création d’usines d’incinération assurant le traitement des vidanges et des eaux d’égout. 492 La guerre met un terme à ces projets et la municipalité se trouvera confrontée, dans les années 40, à un service d’évacuation des ordures ‘archaïque’, selon les termes du docteur Palud. 493

Notes
491.

ADN, Fonds Shanghai, Série A Noire, n°113, Rapport du directeur général des services municipaux au Consul générla de France, le 30 décembre 1935.

492.

ADN, Fonds Shanghai, Série A Noire, n°113, Rapport du directeur général des services municipaux au Consul général, le 30 décembre 1935.

493.

AMS, U38 5 1494, Lettres du docteur Palud au directeur des services municipaux, le 14 septembre 1940 et le 6 décembre 1940. Il précise également dans sa lettre de septembre 1940 qu’ » au point de vue de l’hygiène, le système actuel d’enlèvement des vidanges est un anachronisme. »