3.2.3. L’Institut prophylactique

Pour le docteur Rabaute, le traitement des maladies vénériennes nécessite la création d’une structure adaptée pourvue par les pouvoirs publics. En décembre 1934, le directeur des services administratifs se rallie à l’opinion du docteur et soutient sa démarche ; grâce à l’investissement assuré par la COIP l’Institut prophylactique est ouvert : son nom est choisi par le médecin pour assurer une certaine discrétion aux patients qui veulent se faire soigner au centre. ⁶⁶¹

L’Institut est rattaché au Service d’hygiène et d’assistance publique de la municipalité et s’adresse aux personnes de faibles revenus qui ne peuvent payer les consultations d’un médecin privé. Les malades peu fortunés paient leurs injections spécifiques au prix uniforme de 0,60 $, alors que s’ils se rendaient chez un médecin l’injection intraveineuse leur reviendrait entre 3 et 5 $ ; ceux qui ne peuvent pas payer sont également soignés, sous réserve d’un contrôle de leur situation financière par la police. ⁶⁶² Le docteur Viéron, précédemment chef de la mission médicale de Chongqing, est nommé responsable de la section des prostituées. Aucune donnée n’apparaît cependant sur cette section ni le traitement préconisé.

Le docteur Palud, adjoint du directeur du Service d’hygiène et d’assistance, est responsable du dispensaire ; il est secondé par les docteurs Guttierez et Moltchanoff, une infirmière russe et deux infirmières chinoises ; l’infirmière russe partage son temps entre l’Institut prophylactique et le Dispensaire municipal pour recevoir les malades étrangers. Le personnel de nationalité russe est indispensable pour recevoir les patients russes qui constituent la majorité des malades étrangers reçus par l’institut les mardi, jeudi et samedi matin tandis que les lundi, mercredi, et vendredi sont consacrés aux malades chinois. Après la consultation du matin, le personnel prépare la consultation du lendemain, met à jour les dossiers des malades, stérilise les compresses et les instruments. Le docteur Palud gère le Dispensaire municipal et l’Institut prophylactique le matin, et consacre ses après-midi au Service d’hygiène et d’assistance.

Fonctionnement comparé du Dispensaire municipal et de l’Institut prophylactique :

Le Dispensaire municipal est un service qui appartient à la ‘sous-direction Hygiène et Assistance publique’ de la municipalité française ; il est placé sous la direction du docteur Rabaute, directeur du Service d’hygiène et d’assistance publique tandis que son directeur-adjoint, le docteur Palud, est chargé à la fois du fonctionnement du Dispensaire et de l’Institut prophylactique.

Le Dispensaire comprend un service d’assistance de consultations et traitement pour les malades indigents chinois, avec un médecin chinois assistant et également un service d’assistance pour les malades indigents russes avec un médecin russe assistant, le caractère d’indigence des malades russes étant stipulé par une attestation établie par les Œuvres françaises d’assistance aux familles russes ; les malades doivent avoir résidé au moins six mois dans la Concession française. Un service de consultations dentaires pour les malades indigents chinois ou russes est assuré par un dentiste russe.

L’Institut prophylactique s’adresse aux malades indigents chinois et russes et offre un traitement contre les affections vénériennes. Un médecin russe, le docteur Moltchanoff, assure les soins aux malades russes tandis que le docteur Guttierez s’occupe des malades chinois. Les médecins sont assistés d’un personnel infirmier de nationalité chinoise et russe. Des élèves-infirmières russes viennent en outre compléter l’enseignement théorique qu’elles reçoivent à l’École professionnelle française par la pratique au sein du Dispensaire et de l’Institut. ⁶⁶³

En 1941 le docteur Palud fait le constat des limites de l’Institut prophylactique qui ne soigne qu’une minorité de patients affectés ; de surcroît, les patients chinois qui se présentent au centre ne poursuivent pas leur traitement dès qu’une amélioration de leur état de santé s’ensuit. En 1941, un étudiant russe de la faculté de médecine de L’Aurore est formé par le docteur Palud pour assurer à sa place les consultations à l’Institut car il souhaite être remplacé en raison de ses fonctions de directeur du Service d’hygiène et d’assistance publique depuis 1938 ; ⁶⁶⁴ la nationalité du médecin a été un critère de sélection en raison des nombreux patients russes.