5.3.4. La création de la faculté de médecine et son évolution

C’est le docteur Ricou (1909-1919) qui crée la section médicale de l’université l’Aurore ; les premiers cours de médecine y sont dispensés en 1912 à deux étudiants chinois et les premiers diplômes délivrés en 1917. L’ouverture de la Faculté de Médecine offre de nouvelles perspectives aux médecins français : le docteur Sibiril, major de première classe, auparavant professeur à l’école de médecine de Tianjin, y enseigne de 1916 à 1931 ; les médecins de marine peuvent y être détachés tout en conservant leurs avantages sociaux.

Faculté de médecine
Faculté de médecine

La Faculté de médecine fonctionne d’abord avec quatre médecins français et un médecin chinois : le docteur Sibiril est chargé de l’enseignement de la thérapeutique et de l’hygiène en même temps que de la gynécologie, le docteur Allary (1925-1935), ancien professeur à l’école de médecine de Guangzhou, enseigne la clinique médicale et dirige le laboratoire de séro-microbiologie, le docteur Brugeas (1924-1938), arrivé en Chine comme médecin-major, demande sa mise en disponibilité pour occuper la chaire d’anatomie et de chirurgie, 1058 le docteur Arraud (1925-1930), de ‘la Firme’, se charge des cours d’histologie et la dote d’un équipement radiologique ; l’enseignement de la physiologie et de la bactériologie est assuré par un médecin chinois.

Le corps professoral va être progressivement renforcé. Le docteur Santelli (1927-1962), interne des hôpitaux et assistant de physiologie à la faculté des Sciences de Marseille de 1920 à 1923 puis chef de clinique chirurgicale à l’école médicale de cette ville de 1923 à 1927 part ensuite vers l’Amérique du Sud et l’Extrême-Orient ; travaillant pour les Messageries maritimes, il parcourt l’intérieur de la Chine et effectue des voyages au Japon ; à partir de 1927, il construit sa vie à Shanghai où il occupe le poste de chirurgien à l’hôpital Sainte Marie, en remplacement du docteur Fresson, entre au sein de la Firme et enseigne la chirurgie à la faculté de médecine de l’Aurore ; très apprécié par la communauté française pour sa bonne humeur héritée peut-être de ses origines marseillaises, il obtient la croix de la Légion d’honneur en 1936 ; 1059 après la rétrocession de la Concession française, il tente de s’installer en France mais, sans famille, il préfère retourner vivre à Shanghai où il possède une maison et, malgré les pressions et les exactions des communistes, y restera jusqu’à sa mort en 1962. Le docteur A. Richer (1927-1938), diplômé de la Faculté de Paris en 1924, exerce la radiologie et professe à l’Aurore ; en 1929, il demande à la municipalité d’être désigné comme radiologiste officiel de la municipalité au sein de l’hôpital Sainte Marie et de recevoir un revenu mensuel à l’exemple des médecins de la Firme, 1060 demande à laquelle la municipalité n’accède pas ; le service de radiologie de l’hôpital Sainte Marie est modernisé en 1935, avec l’achat de nouveaux appareils. Le docteur L. Viéron (1928-1946), d’origine bordelaise, a pratiqué à Chongqing et à Hankou, avant de travailler à Shanghai en tant que gynécologue au service municipal. Le docteur A. Paris (1929-1936) appartient au groupe Fresson et s’occupe du service ORL de l’hôpital Sainte Marie ; avant d’arriver à Shanghai, il a passé six ans au Sichuan où il s’est familiarisé avec la médecine tropicale. 1061 Le docteur Calame (1929-1937) inaugure la chaire d’ophtalmologiste et de laryngologie et crée un dispensaire et une clinique d’ophtalmologie à l’hôpital Sainte Marie où il assure à titre bénévole des soins aux réfugiés russes. Le docteur C. Le Goaer (1933-1938) occupe la chaire de stomatologie ; le docteur Mazières (1931-1934) enseigne l’obstétrique et J. Malval (1934-1946) lui succède : entré en 1920 à l’École principale du Service de santé de la marine et des colonies de Bordeaux, il intègre l’armée coloniale, est envoyé au Tchad de 1925 à 1929 et arrive en Chine où, de 1930 à 1933, il sert au 104ème Bataillon indochinois détaché à Shanghai ; médecin commandant, il est mis hors cadres de l’infanterie coloniale en 1934 pour enseigner à l’université l’Aurore, 1062 en même temps qu’il est chef de service à la maternité de l’hôpital Sainte Marie et soigne les blessés civils qui y sont transportés pendant la guerre sino-japonaise de 1937 ; à partir de 1938 il appartient à la Firme où il partage son temps entre ses cours, les consultations privées et son travail pour la municipalité ; dans ce cadre il soigne les indigents chinois au pavillon St Vincent et les indigentes russes envoyées par la municipalité à la maternité ; 1063 il est décoré de la Légion d’Honneur, de l’Étoile noire du Bénin, et de la Médaille des Epidémies. Le docteur A. Genin (1935-1946) est professeur de radiologie et s’occupe de ce service à l’hôpital Sainte Marie après le départ de A. Richer ; il dirige en outre l’Institut sino-belge du Radium qui prend de l’importance durant la guerre en raison du besoin accru de lits d’hôpitaux. Le docteur E. Martin (1935-1945), ancien chef de clinique à Lyon, est un chirurgien renommé qui collabore avec la municipalité à l’hôpital de la Confraternité orthodoxe russe. Le docteur J. Raynal, après avoir occupé des missions au Guatemala et aux Indes anglaises, est nommé à Shanghai où il fonde l’Institut Pasteur ; il étudie le typhus qu’il contracte au cours de ses recherches ; il obtient la médaille d’Or de la Concession française, la plus haute récompense de la municipalité. Les pharmaciens français à Shanghai sont représentés par L. Feissole (1937-1946), pharmacien-chimiste à l’Institut Pasteur, MM. Julien, Estublier et Chatel, ce dernier professeur à l’Institut Franco-chinois et auteur d’une ‘Pharmacognosy.’

Notes
1058.

AMS, Q244 8, Bulletin de l’University l’Aurore n°37, 1937-1938, Biographie du docteur Brugeas et Le Journal de Shanghai, article de juillet 1938 sur la nomination du docteur au grade d’officier de la Légion d’Honneur. Le docteur Brugeas sert pendant la première guerre mondiale dans les Troupes coloniales. Il est transféré par la suite aux chasseurs alpins. Blessé le 20 juillet 1915, il reçoit à cette occasion la Médaille militaire et la Croix de guerre. A la fin de la guerre, il entre dans la marine et sert sur un navire hôpital. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1920. En 1928, il prend sa retraite comme médecin principal de la marine de réserve. Il est correspondant national de l’Académie de chirurgie de Paris.

1059.

AMS, U38 1 95 (2), Article du 18 octobre 1936 du Journal de Shanghai.

1060.

AMS, U38 1 110, Lettre du docteur Richer du 15 juin 1929.

1061.

AMS, U38 1 95 (2), Lettre du docteur Arraud au Président du CAM, le 11 septembre 1929.

1062.

Le Journal de Shanghai, Article de juillet 1938 présentant la nomination au grade de chevalier de la Légion d’Honneur du docteur Jean Malval.

1063.

M.A.E., Mémoires du docteur Malval et Biographie établie par Louis Malval, son fils : « Ne pouvant revenir en France, il reste à Shanghai et sera rapatrié avec sa femme et ses deux fils en mai 1946 (…). A son retour, il est désigné à la Direction du Service de santé de la 1 ère Région de Paris. A sa demande, il est admis à la retraite pour ancienneté de service et s’établit comme médecin de campagne à la Roche-Vineuse dans le Mâconnais jusqu’en 1961. Il y rédige ses mémoires. Il est promu au grade de Médecin Colonel de Réserve en 1954. Puis il se retire à Dijon, y mène une vie d’études, de recherche en bibliothèque, de conférences. Il participe aux séances de l’Académie de Dijon et en devient Vice-Président. Il décède à l’Hôpital Militaire de Dijon, le 18 août 1973. »