d. Memoria rerum et memoria uerborum

Cicéron envisage le même partage que le maître d’Herennius entre la memoria rerum et la memoria uerborum ; la seconde complète l’apprentissage d’un texte par cœur, et exige autant d’images que de mots. Antoine juge que, trop variée, elle est moins utile à l’orateur :

‘Sed uerborum memoria, quae minus est nobis necessaria, maiore imaginum uarietate distinguitur. 178

En revanche, la première lui paraît indispensable dans le travail de l’orateur, ce que reconnaissait déjà le maître d’Herennius, malgré son attachement à la memoria uerborum ; elle est même inscrite dans sa nature :

‘Rerum memoria propria est oratoris 179

Mémoire des idées, elle permet à l’orateur de se souvenir de ses arguments grâce aux images, ainsi que de leur organisation grâce aux emplacements : voilà définies l’inuentio et la dispositio, les deux premières divisions de la rhétorique, dont la memoria rerum se trouve dépositaire — nous avons évoqué les termes custos, thesaurus, fundamentum, qui trouvent ici leur pleine application ; c’est pour cette raison que la memoria apparaît à la troisième place dans l’exposé du De oratore, après l’inuentio et la dispositio, et avant les ornements, l’elocutio et l’actio :

‘eam singulis personis bene positis notare possumus, ut sententias imaginibus, ordinem locis comprehendamus. 180
Notes
178.

Ibid. II, 359 : « La mémoire des mots, moins nécessaire à nous autres, se distingue par une plus grande variété d’images. »

179.

Ibid. II, 359 : « La mémoire des choses est la mémoire propre de l’orateur. »

180.

Ibid. II, 359 : « Nous pouvons signaler chaque chose par une caractéristique spécifique bien disposée de manière à ressaisir les pensées grâce aux images et l’ordre des pensées grâce aux emplacements. » (trad. E. Courbaud modifiée, Paris, CUF, 1928).