3.3.1. Le nombre de couleurs utilisées.

Le nombre de couleurs utilisées dans la représentation cartographique d’une zone d’une feuille est renseignée par l’attribut nbcouleur de l’entité GroupeCouleur – conçue pour faciliter la saisie en évitant de devoir renseigner systématiquement pour chaque feuille toutes les couleurs utilisées. Il pourrait également être calculé à partir de l’association entre les entités GroupeCouleur, Couleur et UtilisationCouleur, qui définit les couleurs utilisées dans un groupe de couleur spécifique et qui est traduite dans le schéma relationnel par la table groupecouleur_couleur, mais des imprécisions dans le détail des couleurs utilisées pour certaines cartes m’ont amené à créer un attribut plus général pouvant être renseigné à partir de sources indirectes. Pour l’ensemble de mon corpus, la répartition du nombre de couleurs utilisées est donnée par le tableau suivant (tableau 3).

Tableau 3 : Répartition du nombre de couleurs utilisées.
Nombre de couleurs utilisées Nombre de zones Pourcentage du nombre total de zones
0 (zone non représentée) 217 7,56 %
1 1096 38,19 %
2 34 1,18 %
3 693 24,15 %
4 699 24,36 %
5 106 3,69 %
6 2 0,07 %
8 14 0,49 %
9 9 0,31 %
Total 2870 100 %

Pour une analyse globale, les très faibles pourcentages de zones utilisant deux ou plus de six couleurs pouvaient être négligés. Sur l’ensemble des zones des feuilles de mon corpus, la moyenne du nombre de couleurs utilisées est 2,55, la médiane 3, le premier quartile 1 et le troisième quartile 4. En prenant en compte la signification cartographique du nombre de couleurs, j’ai donc utilisé trois classes différentes pour mon analyse générale : noir seul ; deux ou trois couleurs ; plus de quatre couleurs, ce qui signifiaient dans la majorité des cas l’adoption d’au moins une planche de vert pour représenter la végétation en plus des planches destinées à la planimétrie, à l’orographie et à l’hydrographie. Le graphique suivant représente l’évolution du nombre de couleurs utilisées, soit par classe, soit en moyenne – une valeur qui n’a pas plus de signification que l’échelle moyenne mais qui se révèle remarquablement illustratrice de l’évolution générale (graphique 4).

Graphique 4 : Evolution du nombre de couleurs utilisées pour le dessin cartographique.
Graphique 4 : Evolution du nombre de couleurs utilisées pour le dessin cartographique.

La représentation par classe reproduit logiquement des profils proches de l’évolution du nombre de feuilles publiées, mais la répartition globale montre bien une évolution vers l’utilisation d’un nombre plus important de couleurs, particulièrement à partir des années cinquante. La courbe du nombre moyen de couleurs illustre encore plus clairement cette tendance. Les différentes variations avant 1880 s’expliquent par des applications artisanales – parfois même manuelles – de couleurs sur une base en noir seul : la faible production annuelle entraîne un impact disproportionné de ces expérimentations sur le nombre moyen de couleurs utilisées, à l’exception des années 1870 normalement marquées par la publication de la carte de la frontière des Alpes en couleur. Dans les périodes 1880-1900 et 1927-1940, la publication de nombreux plans directeurs est particulièrement visible sur le graphique représentant les zones en noir seul. Cependant, sur la courbe moyenne, la période 1910-1930 est marquée par la rupture de la première guerre mondiale (qui provoque un pic artificiel de la courbe qui relie directement les valeurs de 1912 et 1917) et l’influence de la luxueuse carte de France au 1 : 50 000 type 1900, en huit couleurs, dont les dernières publications pour la région des Alpes datent de 1926. Ensuite, à partir de la fin des années vingt, la moyenne augmente presque régulièrement avant de se stabiliser aux environs de quatre vers la fin des années cinquante : cette augmentation régulière montre un effort de normalisation plus formelle qu’avant 1930, c’est-à-dire le début d’une industrialisation de la production.

On retrouve donc une périodisation proche de celle des techniques de levés (1830-1870, 1880-1910, 1910-1940, 1930-1980), même si le changement autour de 1930 est bien plus marqué dans le nombre de couleurs utilisées que dans les techniques de levé pour lesquelles les années vingt et trente correspondent plus à une transition progressive, principalement en raison des modalités de changement dans ces domaines : dans la production sérielle du service officiel, le nombre de couleurs utilisées est défini par les spécifications relativement stables des cartes de France, alors que les techniques utilisées nécessitent d’importants efforts d’équipement et de formation du personnel.