1.1.2.4. La primauté de la triangulation dans le travail cartographique.

La carte de Paris confirmait l’intérêt de Picard pour la cartographie, mais il ne croyait pas à la réalisation rapide de cartes de province sur ce modèle. Avant de commencer d’éventuels levés, il lui semblait préférable de disposer d’un châssis général formé par une triangulation couvrant tout le territoire. Dans un mémoire présenté en 1681 à Colbert puis à l’Académie, il se positionnait pour l’extension de la triangulation qu’il avait amorcée, faisant remarquer que « ce châssis estant premièrement fait, il seroit facile ensuite de le remplir »168, et proposait de commencer par prolonger la méridienne jusqu’à Dunkerque et Perpignan.

Il formulait ainsi la position qui fut celle de l’Académie jusqu’au milieu du 18e siècle : la carte de France devait être dressée à partir de cartes régionales d’origines diverses, mais s’appuyant sur les travaux géodésiques de l’Académie, dont la qualité était garantie par la compétence de ses membres dans des opérations jugées plus délicates que le levé ou le dessin des cartes. Si l’exécution de levés directs était finalement envisagée, elle se plaçait dans une dépendance totale du travail de triangulation. Accepté par Colbert, le projet de Picard affirmait le rôle central des savants dans le domaine de la cartographie civile, en imposant leur contrôle sur une cartographie dont ils jugeaient que la précision dépendait essentiellement des opérations géodésiques qu’ils réalisaient.

Notes
168.

Cité par PELLETIER Monique. La Carte de France. Op. cit.