2.1. La lutte d’influence pour les spécifications de la nouvelle carte de France, 1802-1824.

Le territoire français n’avait fait l’objet d’aucun projet cartographique important entre la fin des levés de la carte de Cassini en 1789 et la Restauration. Sous l’Empire, les nombreux travaux cartographiques n’avaient concerné que les pays annexés et l’extension de la carte de Cassini aux régions limitrophes (carte des départements réunis). La publication des dernières feuilles de la carte de Cassini avait été retardée par Napoléon pour des raisons stratégiques, mais l’absence d’une carte détaillée de la France s’était faite cruellement sentir lorsque la guerre avait touché le territoire français entre 1813 et 1815. La carte de Cassini achevait à peine d’être dressée et finalement publiée, mais la situation était propice pour la formulation d’un nouveau projet de carte de France qui soit véritablement topographique et adapté aux besoins militaires. La place donnée dans les premiers projets aux préoccupations scientifiques et administratives révélait aussi l’évolution des besoins cartographiques dans d’autres domaines et la nécessité de justifier l’ampleur des travaux en dehors de la seule sphère militaire. La multiplicité des besoins et des points de vue provoqua une véritable lutte d’influence pour la définition des spécifications de la carte, dont les militaires sortirent certes « vainqueurs », mais sans diminuer la place prépondérante occupée par la géodésie dans la conception générale du projet.