3.1.1.2. Organisation et déroulement des travaux.

Les travaux commencèrent sous la direction de la Commission royale299. Celle-ci avait « divisé la France par des chaînes primordiales, méridiennes et parallèles, en grands quadrilatères de 200 kilomètres de côté environ. Dans l’intérieur de ces quadrilatères, [elle avait] établi, pour asseoir les triangulations de 2e et 3e ordre, un enchaînement de 1er ordre, se rattachant aux grandes chaînes précitées, mais observé avec moins de précision que ces dernières »300 (figure 3). Une partie des chaînes primordiales avait déjà été mesurée selon les méthodes adoptées pour la nouvelle description géométrique de la France :

  • la méridienne de France, par Delambre et Méchain (1792-1798) ;
  • la méridienne de Strasbourg (jusqu’à Genève), par le colonel Henry (1804) ;
  • la partie du parallèle moyen comprise entre la méridienne de France et le côté Granier-Colombier, à la frontière de la Savoie, par le colonel Brousseaud (1811-1813).

Quand les travaux débutèrent en 1818, les opérations primordiales prenaient donc la suite des opérations exécutés sous la Révolution et l’Empire. Quatre nouvelles bases mesurées avec les règles de Borda complétèrent les deux bases de Delambre et la base d’Ensisheim mesurée par Henry. « Les chaînes primordiales furent achevées en 1827 par le parallèle des Pyrénées, le réseau de 1er ordre complémentaire en 1843 »301.

Une partie des travaux de 2e et 3e ordre furent entrepris en même temps que ceux du 1er ordre pour pouvoir débuter le plus tôt possible les levés topographiques. Ils concernèrent la région de Paris et de Melun, dont une partie avait déjà été triangulée entre 1810 et 1814 durant les travaux d’extension de la carte des Chasses. Globalement, le travail du 2e ordre – qui intéressait moins le milieu scientifique – était plus rapide : les officiers ne devaient pas « trop chercher à former un bel enchaînement, mais s’attacher surtout à déterminer un grand nombre de points, et, autant que possible, les répartir dans toutes les régions de la feuille »302.

Figure 3 : Carte de la triangulation des ingénieurs géographes.
Figure 3 : Carte de la triangulation des ingénieurs géographes.

Source BERTHAUT Col. La carte de France. T.2. Op. cit., p. 24.

Ainsi, « le réseau entier, à l’exception de la Savoie et de la Corse, était terminé en 1854 »303. La Savoie et le Comté de Nice se trouvaient alors en dehors du territoire français. Après leur annexion en 1859, leur triangulation fut rapidement exécutée : pour la Savoie, le réseau de 1er ordre reprit les sommets de triangles existants, issus majoritairement des travaux de l’Empire, et seules les triangulations de 2e et 3e ordres furent exécutées entre 1861 et 1863304. La Corse avait été triangulée et levée entre 1770 et 1791 par l’ingénieur géographe Tranchot selon des méthodes suffisamment proches des principes édictés par la Commission royale pour qu’il ne soit pas jugé nécessaire d’entreprendre rapidement de nouveaux travaux. En 1862, le Dépôt de la guerre décida finalement de dresser une carte de la Corse au 1 : 80 000 pour l’intégrer à la carte de France, et une nouvelle triangulation fut alors effectuée par les capitaines Bugnot, Perrier et Proust en 1863.

Notes
299.

Les travaux, les calculs et les résultats de la nouvelle description de la France sont décrits en détail dans les tomes VI, VII et IX du Mémorial du Dépôt de la guerre.

300.

BERTHAUT Colonel. La Carte de France. T.2. Op. cit.,, p. 1.

301.

Le Service Géographie de l’Armée. Son histoire, son organisation, ses travaux. Paris : Imprimerie du Service géographique de l’armée, 1938, p. 38.

302.

PEYTIER Colonel, « Notes sur les opérations géodésiques », op. cit., p. 449.

303.

Le SGA. Op. cit., p. 38.

304.

Voir infra, partie 1, chapitre 4.2.3.