3.2.3. La formalisation problématique des méthodes de levé topographique.

3.2.3.1. La Commission de 1828.

La Commission de topographie de 1802 n’avait pas abordé les questions pratiques liées aux méthodes de levés topographiques du terrain. Dans la Commission royale de 1817, l’influence prépondérante des scientifiques n’avait pas non plus favorisé l’examen des questions topographiques qui avaient été totalement ignorées. Dans les controverses soulevées entre la Commission royale et le Comité du Dépôt de la guerre, ces questions n’avaient également jamais été traitées : les militaires s’étaient en effet concentrés sur le problème de l’éclairage 334. Elles ne furent finalement abordées qu’en 1826, après huit ans de travaux qui avaient souligné à quel point les instructions étaient peu suivies, au sein d’une nouvelle commission réunie pour « établir de l’uniformité dans le mode de figurer le relief du terrain »335 avant que ne commencent les travaux de gravure de la carte de France – mais dont les décisions devaient s’appliquer à tous les travaux cartographiques.

Les discussions portèrent essentiellement sur les problèmes de représentation cartographique du relief, mais ceux-ci avaient une influence directe sur les méthodes de levé. En particulier, le texte définitif adopté par la Commission en 1828 stipulait que, sur les minutes, le terrain devait être représenté par des courbes de niveau équidistantes. Ces courbes devaient être tracées à l’encre sur les mises au net et n’étaient complétées qu’à cette étape-là par des hachures perpendiculaires, tracées selon la loi du quart – sauf que par dérogation spéciale, le Dépôt de la guerre obtint le droit d’utiliser un diapason pour régler l’espacement des hachures, alors que la Commission s’y était fermement opposée. Les courbes disparaissaient ensuite du dessin définitif336.

Mon hypothèse selon laquelle la méthode employée pour les premiers levés de la carte de France dénaturait le principe des hachures normalisées se trouve confirmée par les décisions de la Commission de 1828, qui constituaient ce que j’appellerai un retour à la pureté originelle de ce principe. En effet, la Commission imposait explicitement le tracé des courbes de niveau au moment du levé sur le terrain, alors que celui des hachures n’intervenait qu’au moment de la mise au net au bureau. La suppression des courbes sur le dessin final répondait même directement à leur nature approximative et à leur seul rôle d’appui pour la construction des hachures.

Cependant, cette formulation plus « orthodoxe » n’aidait pas à supprimer les difficultés techniques qui avaient en grande partie provoqué la déviation de la méthode de levé au début des travaux de la carte de France. Pendant encore deux décennies, les opérations sur le terrain continuèrent d’être confrontées à un manque de précision des instructions et à des problèmes d’application de leurs prescriptions.

Notes
334.

Voir infra, partie 1, chapitre 3.3.1.

335.

Il s’agit du titre informel de la Commission, auquel je préférerai celui parfois employé de Commission de 1826-1828 ou plus brièvement Commission de 1828 qui prend comme année de référence celle de la rédaction définitive des décisions de la Commission.

Mémorial du Dépôt Général de la Guerre. T.V. Années 1827 et 1828. Paris : Ch. Picquet, 1829. Suite du résumé des discussions et délibérations de la Commission qui a été chargée, par S. Ex. le Ministre de la Guerre, d’établir de l’uniformité dans le mode de figurer le relief du terrain, p. 458-485.

336.

Ibid..