Les régions de haute montagne française furent couvertes par les opérations de géodésie primordiale et de 1er ordre entre 1823 et 1834. Que ce soit dans les Pyrénées ou dans les Alpes, ces opérations furent marquées par l’extrême difficulté d’un travail déjà dur dans un milieu encore pratiquement inconnu. Les officiers géodésiens, aidés d’adjoints, de porteurs et de guides, devaient non seulement transporter des instruments très lourds sur des sommets suffisamment élevés pour permettre des visées lointaines satisfaisantes, mais ils devaient également y construire des signaux en pierre et en bois puisque le simple pointé d’un pic rocheux n’était pas suffisamment précis. Surtout, la nécessité de répartir de façon régulière les sommets des triangles de 1er ordre les obligea à gravir des cimes souvent invaincues, par des routes méconnues ou entièrement nouvelles. Pourtant, la direction de la carte de France, assurée par le Dépôt de la guerre, n’adapta jamais le travail aux conditions particulièrement difficiles de la haute montagne. Aucun enseignement n’ayant été tiré des expériences précédentes, les opérations géodésiques dans les Alpes se transformèrent en une véritable épreuve, qui resta volontairement ignorée des milieux officiels. Ce ne fut qu’à la fin du 19e siècle que le milieu des alpinistes en pleine structuration découvrit les exploits d’ascensionnistes des ingénieurs géographes, reconstruisant alors une histoire tragique et quasi-mythologique dont l’exemple le plus complet reste l’ouvrage consacré par Henri Béraldi aux « officiers de la carte de France »368.
BERALDI Henri. Balaïtous et Pelvoux. Notes sur les officiers de la carte de France. Paris : [s.n.], 1907, 205 p.