4.1.2.1. Loreilhe et la triangulation de 2e ordre le long de la frontière.

En 1823, en même temps que Durand recevait l’ordre d’exécuter les opérations sur le parallèle de Rodez, un autre officier, le lieutenant Loreilhe, était chargé d’effectuer une triangulation de 2e ordre le long de la frontière des Alpes. Comme pour les opérations primordiales, le travail demandé à Loreilhe était excessif par rapport à ses conditions de réalisation. Dans son style sec et concis si particulier, Béraldi le décrivit plus tard par un commentaire laconique : « besognes excessives – on les donnait telles alors »378. Confronté à la neige, aux difficultés d’approvisionnement, au prix des indispensables guides, à des conditions de vie et d’hébergement spartiates, comme en témoignait sa correspondance avec sa hiérarchie, Loreilhe ne put terminer son travail avant la mauvaise saison. Il livra cependant dix-huit cahiers de mise au net, dans lesquels s’égrenaient comme une litanie les mentions de « sommets inaccessibles » aux altitudes calculées par des visées éloignées. Doté d’un budget réduit, il construisit les signaux les plus économiques possibles, « pyramides en pierres sèches de 6 à 8 pieds de diamètre sur 8 à 14 de haut », « malgré cela assez solides pour les retrouver dans huit à dix ans »379. Dernier signe d’un souci d’économie généralement partagé par l’administration et les officiers de la carte de France, il concluait ainsi son rapport : « campagne des plus pénibles, et de plus, très peu lucrative »380.

Tout comme la triangulation des Pyrénées exécutée deux ans plus tard, cette campagne soulignait les difficultés du travail en haute montagne : surface à couvrir excessive, budget insuffisant, mauvaises conditions climatiques, difficulté d’accès des sommets accentuée par la nécessité de construire des signaux. Elle montrait surtout le refus de la direction de prendre en compte ces difficultés, du moins jusqu’à l’achèvement des opérations de 1er ordre.

Notes
378.

Ibid., p. 92.

379.

Ibid., p. 96.

380.

Ibid., p. 96.