3.2.3.3. Baisse du rendement et reconnaissance du travail de révision.

En 1889, chaque officier réviseur devait toujours couvrir un huitième de feuille en quinze jours. La persistance d’un rendement élevé montrait autant la sous-estimation du travail de révision que la sur-estimation de la valeur des révisions précédentes. Mais l’encadrement plus serré permit de mieux mesurer la difficulté et la durée du travail, provoquant un abaissement rapide du rendement demandé. Celui-ci fut successivement fixé à un huitième de feuille en vingt jours en 1890, puis en vingt-quatre jours en 1891, par les commission sur la révision de la carte de France. L’instruction du 17 mars 1892 marquait une étape décisive dans l’augmentation de la qualité des révisions, en permettant aux officiers de dépasser les délais prescrits, en accord avec leur chef.

Malgré la baisse du rendement imposé et du nombre d’officiers, la zone annuellement couverte par les révisions dans les Alpes resta équivalente aux révisions de 1875-1878, même si elle était inférieure à certaines révisions des années 1880 (carte 6). Cette rapidité ne fut permise que par une organisation radicalement différente sur tout le territoire français, avec chaque année une focalisation sur un petit nombre de régions. Les Alpes du nord purent ainsi être révisées entièrement selon la nouvelle méthode en seulement quatre années, de 1895 à 1898.

Carte 6 : Révisions de la carte de France au 1 : 80 000 dans les Alpes du nord, 1895-1898.
Carte 6 : Révisions de la carte de France au 1 : 80 000 dans les Alpes du nord, 1895-1898.

Dernier changement considérable, la Note circulaire du 3 janvier 1897 relative à la désignation des officiers réviseurs montrait une considération pour la difficulté du travail de terrain qui avait toujours été niée pendant toutes les opérations précédentes. En insistant sur la bonne condition physique des officiers recrutés, elle soulignait la prise en compte de la rigueur d’un travail qui demandait de marcher vingt à trente kilomètres par jour avec un équipement lourd et de « vivre quatre mois en plein air, dans des conditions de confort médiocres »677 et avec peu de repos. J’estime que cette mesure, si elle conserve un caractère anecdotique, montre toutefois le début d’un changement plus profond dans la perception du travail cartographique par les autorités militaires. Tout comme la création du Service géographique de l’armée, elle témoigne d’une conscience nouvelle de la spécificité de ce travail qui s’amplifia au cours du 20e siècle678.

Notes
677.

Note circulaire du 3 janvier 1897 relative à la désignation des officiers réviseurs, citée par Ibid., p. 185-186.

678.

Voir infra, partie 2, chapitre 3.4.