L’adoption du 1 : 80 000 comme échelle de gravure avait déjà fait l’objet d’une vive controverse entre la Commission royale et le Comité du Dépôt de la guerre au début des années 1820. Elle répondait essentiellement aux besoins tactiques des militaires et à une représentation assez générale du territoire français pour les administrations centrales. L’ordonnance royale de 1824 avait d’ailleurs explicitement affirmé qu’il s’agissait des seuls points de vues adoptés pour la réalisation de la carte. Mais l’industrialisation de la France et le développement des administrations locales avaient donné une importance nouvelle à des utilisations cartographiques qui nécessitaient une échelle supérieure. Le succès croissant des reproductions des minutes de la carte d’état-major montrait à l’évidence que l’échelle du 1 : 40 000 répondait à un plus grand nombre de besoins, même si dans certains cas comme l’aménagement industriel par exemple, les minutes tendaient à n’être utilisées que comme base pour des plans topographiques encore plus détaillés.
Pour les régions de haute montagne, la question de l’échelle s’inscrivait moins dans le registre de la pratique que dans celui du prestige. J’ai montré que les échelles employées dans les cartes indépendantes des Alpes du nord répondaient à un désir de concurrencer la carte de France jugée insatisfaisante690. Selon moi, l’utilisation d’échelle supérieure ne répondait pas tant à un besoin pratique qu’à la volonté de couvrir une surface toujours très restreinte avec un maximum de détails figuratifs et dans un format suffisamment grand pour se rapprocher d’un tableau. Mais quelle qu’en soit la raison, la publication de carte à une échelle supérieure au 1 : 80 000 fut perçue et souvent justifiée par l’insuffisance de l’échelle de la carte de France.
Voir supra, partie 2, chapitre 2.1.2.3.