Dès la première séance de la Commission de topographie, Franz Schrader s’était prononcé pour « la création d’un école, ou tout au moins de cours de topographie », et Prudent pour la rédactions d’« instructions précises » pour guider les topographes-alpinistes volontaires et débutants « dans l’exécution des itinéraires, des tours d’horizon à l’alidade et à la planchette, et enfin des levés complets ». Moins enthousiaste, Henri Vallot se disait « sceptique sur la valeur actuelle, comme opérateurs, des alpinistes-topographes » et affirmait que les former serait « d’autant plus délicat [qu’ils ne disposaient] que de bonnes volontés qu’on peut conseiller, et non commander, comme l’[avait] maintes fois constaté le colonel Prudent [dans les Pyrénées] »875.
Cependant, sa compétence technique irréfutable et son influence majeure dans la Commission lui donnaient nécessairement un rôle central dans tout projet de formation et d’instruction des topographes-alpinistes876, dont il se chargea avec la même autorité et la même persévérance que pour imposer sa conception de l’activité de la Commission. Déjà lors de la première séance, il annonçait préparer une notice qui lui avait été demandé pour le Manuel de l’alpinisme 877. Dès la séance suivante du 27 mars, il présentait les soixante-dix pages de son Instructions de topographie alpine. Celle-ci fut finalement publiée en avril 1904 sous la forme d’un Manuel de Topographie alpine 878 de cent soixante-douze pages, dont un exemplaire fut envoyé à chaque membre titulaire ou correspondant. En juin de la même année, Henri Vallot publiait un deuxième manuel intitulé Instructions pratiques pour l’exécution des triangulations complémentaires en haute montagne 879, qui achevaient de décrire les bases de la méthode qu’il proposait aux topographes-alpinistes à partir de celle qu’il avait conçu pour ses propres travaux dans le massif du Mont Blanc.
Reprenant l’idée de Schrader, Henri Vallot mit également en place « des exercices pratiques sur le terrain […] aux environs de Paris, pour familiariser les opérateurs avec les instruments et les procédés dont ils auraient à faire usage sur le terrain »880. Plus tard, il perfectionna les méthodes présentées dans ses deux premières instructions en publiant en 1907 un troisième manuel co-écrit avec son cousin Joseph sur les Applications de la photographie aux levés topographiques en haute montagne 881, qui exposait la méthode de levés photographiques dite Laussedat-Vallot qu’ils avaient spécialement développée pour leur carte du massif du Mont Blanc882, puis en 1909 un quatrième manuel sur les Levés à la planchette en haute montagne 883, qui complétait le Manuel de topographie alpine. Il assura plus généralement un rôle d’encadrement fondamental, conseillant et aidant tous les topographes-alpinistes, exécutant certains calculs, mettant à disposition des instruments modifiés selon ses indications ou des aides pratiques, comme « les carnets d’observation et cahier de calculs modèle H. Vallot »884.
PV Com. Topo. CAF. Séance du 2 février 1903, p. 6.
Sa vocation de diffusion des méthodes topographiques n’était pas nouvelle : il avait déjà publié en 1888 un article sur l’emploi de la règle à éclimètre Goulier, dans lequel il présentait entre autres les méthodes suivies dans les Pyrénées par Schrader, Wallon, de Saint-Saud et les autres pyrénéistes.
VALLOT Henri. Emploi de la règle à éclimètre du colonel Goulier dans les excursions topographiques. Annuaire du Club Alpin Français, 1888, p. 472-519, et 1890, p. 485-497.
Si elle amorçait une rationalisation de la pratique dans certains chapitres concernant la manière de réaliser les ascensions, la première édition du Manuel de l’alpinisme en 1904 contenait essentiellement des contributions scientifiques sur la connaissance scientifique des montagnes, parfaite illustration de la prédominance du modèle de l’excursionnisme cultivé. Voir : CLUB ALPIN FRANÇAIS. Manuel d’alpinisme. Paris : Ed. Lucien Laveur, 1904 ; HOIBIAN Olivier. Les Alpinistes en France. Op. cit., p. 81.
VALLOT Henri. Manuel de topographie alpine. Paris : Barrère, 1904, 172 p.
VALLOT Henri. Instructions pratiques pour l’exécution des triangulations complémentaires en haute montagne. Paris : G. Steinheil, 1904, 132 p.
PRUDENT Lieutenant-Colonel, VALLOT Henri. La Commission de Topographie. [avril 1905] Op. cit., p. 195.
VALLOT Henri, VALLOT Joseph. Applications de la photographie… Op. cit.
Voir infra, partie 3, chapitre 3.2.
VALLOT Henri. Levés à la planchette en haute montagne. Paris : Barrère, 1909, 193 p.
PV Com. Topo. CAF. Séance du 26 janvier 1910, p. 2.