1.3.2.2. Deux approches différentes dans les Alpes et les Pyrénées.

L’objet de la Commission restait toutefois de réaliser des cartes topographiques à grande échelle des régions de haute montagne française. Même si certains travaux concernèrent d’autres régions, comme le massif de l’Esterel (De Flotte, Charles Vallot) ou la vallée de la Tinée (Lee Brossée), les régions les plus couvertes restaient les Alpes du nord et les Pyrénées. Les approches adoptées pour ces deux massifs étaient très différentes920. Malgré les travaux précoces inspirés par Schrader depuis le dernier quart du 19e siècle, les Pyrénées restaient encore méconnues, en particulier à cause du désintérêt du SGA qui se focalisait pour des raisons militaires évidentes sur les frontières orientales de la France. Les ascensionnistes et les scientifiques exprimaient un besoin pressant de cartes représentant la chaîne qui ne militait pas pour l’emploi des grandes échelles. Il fallait dresser rapidement des cartes pour « débroussailler » la connaissance de la chaîne. A l’exception de la carte fondatrice du Mont-Perdu au 1 : 40 000 par Franz Schrader, tous les travaux des pyrénéistes avaient convergé à la fin du 19e siècle vers des échelles allant du 1 : 50 000 au 1 : 200 000. La seule carte dressée au 1 : 20 000 entre 1900 et 1940 fut le Massif de Gavarnie et du Mont-Perdu du même Schrader. Surtout, même si les méthodes diffusées par Henri Vallot étaient majoritairement employées dans les Pyrénées, l’influence de Schrader restait fondamentale et orientait les travaux vers une approche plus artistique que géométrique, Schrader ne disposant pas des compétences techniques de Vallot pour assurer sur le terrain un encadrement efficace dans ce domaine.

Au contraire, dans les Alpes du nord, l’essentiel des travaux fut effectuée dans la perspective de cartes au 1 : 20 000. L’existence de nombreuses cartes détaillées, publiées par les services officiels ou des organismes privés, et l’investissement important du SGA dans cette région avec ses levés de précision et ses plans directeurs, ne faisaient pas de la rapidité d’exécution un facteur primordial des travaux engagés. Au contraire, la concurrence avec les travaux en cours du SGA plaçait très nettement les priorités au niveau de la précision et de l’apport scientifique ou touristique original susceptibles de justifier les travaux des topographes-alpinistes face aux réalisations officielles. Les conditions de travail étaient aussi beaucoup plus favorables à la mise en place méthodique de levés à grande échelle : la proximité géographique du « maître » Henri Vallot permettait un encadrement technique efficace et les travaux géodésiques d’Helbronner mettaient à la disposition des topographes-alpinistes une triangulation générale spécialement conçue pour inscrire leurs triangulations complémentaires et leurs levés.

Notes
920.

PERRET Robert. Notes de M. R. Perret. Op. cit., p. 142-144.