1.3.3.3. Cartes-esquisses et croquis topographiques, une rupture avec l’orientation imposée par Henri Vallot.

En dehors des quatre cartes suscitées, la majeure partie des réalisations cartographiques liées à la Commission de topographie consistait en des croquis topographiques ou des cartes-esquisses. Celles-ci couvraient une surface plus importante que les « grands œuvres » purement topographiques de la Commission (carte 10), en s’intéressant soit à des massifs déjà cartographiés dont elles complétaient la représentation par de nouvelles données topographiques (massif des Ecrins et du Pelvoux), soit à des massifs pour lesquels aucune carte n’existait et qu’elles représentaient de façon très simple (massifs de Belledonne, du Faucigny, de la Vanoise). Leur principale caractéristique commune était justement cette simplicité de la représentation : le relief était généralement traité dans un mode très schématique, l’orographie étant le plus souvent rendue par le seul dessin des lignes de faîtes, avec parfois le contour des glaciers.

Au-delà de cette proximité de la forme, l’imprécision du vocabulaire utilisé et des notes jointes à ces cartes ne permettent pas d’en faire une typologie plus précise : les deux termes de carte-esquisse et de croquis topographique désignaient des cartes dressées à partir d’une proportion très variable d’informations originales, obtenues par des levés sur le terrain, des tours d’horizon ou de simples observations, et d’informations dérivées d’autres cartes, généralement les plans directeurs du SGA quand ils existaient. A ce titre, les indications données sur les différents croquis topographiques réalisés par le commandant Boell au cours des années vingt sont très révélatrices de l’extrême hétérogénéité des sources utilisées :

Le propre d’un croquis topographique ou d’une carte-esquisse était d’utiliser les informations topographiques d’autres cartes en les complétant par des corrections d’« erreurs » topographiques ou toponymiques, et éventuellement par de nouvelles données. Dans une note manuscrite sur la carte-esquisse du Valgaudemar dressée par Brun, Maurice Barrère explicitait cette caractéristique : le croquis devait apporter quelque chose aux cartes dont il s’inspirait932. Une telle orientation était très proche de l’idée de révision des cartes officielles existantes qu’avaient défendue Henri Duhamel ou Maurice Paillon lors de la création de la Commission de topographie. Ce dernier donna d’ailleurs dans les années vingt ou trente (la carte n’est pas datée) une Carte esquisse orohydrographique du massif du Péclet au 1 : 100 000, probablement dérivée des cartes officielles, tout à fait dans cet esprit.

Dans leur principe même, ces cartes-esquisses et croquis topographiques s’opposaient à l’orientation plus ambitieuse qu’avait imposée Henri Vallot à la Commission de topographie. En définitive, cette orientation ne fut appliquée que dans les œuvres rares et remarquables réalisées par les topographes-alpinistes qui disposaient des compétences, de l’ambition et du temps pour réaliser des cartes entièrement originales. Les méthodes d’Henri Vallot ne furent donc majoritairement employées que dans leurs expressions les plus simples, pour réviser et compléter le contenu topographique des cartes officielles sous la forme schématique des cartes-esquisses et croquis topographiques.

Notes
931.

Les abréviations des grades militaires sont celles utilisées par Boell lui-même.

932.

BARRERE Maurice. Observations sur la manuscrit de la 2e édition de la carte-esquisse du Valgaudemar de M. R. Brun. Paris : [sn], 16 mars 1945. Note manuscrite agrafée à l’exemplaire de la carte de Brun conservé à la cartothèque de l’IGN.