2.1.2.4. La dynamique de l’investissement du SGA dans les Alpes.

Ce nouvel investissement du SGA dans la cartographie des Alpes procédait d’une double dynamique : d’un côté, les nouveaux besoins militaires imposaient une représentation plus détaillée des régions de haute montagne dans les plans directeurs ; d’un autre côté, la fondation de la nouvelle carte de France sur les levés de précision modifiait considérablement la conception de ces plans directeurs en introduisant une logique de prestige, inséparable de toutes les entreprises de cartographie à grande échelle des territoires nationaux. Selon moi, cette logique de prestige s’ancrait dans l’aspect symbolique de l’acte cartographique : en essayant de donner une représentation cartographique la plus « parfaite » possible, selon les critères de tous les utilisateurs potentiels, le SGA cherchait à réaliser une carte qui s’imposerait comme la seule représentation du territoire national, c’est-à-dire qui rendrait inutile le développement de productions indépendantes alternatives. Elle expliquait particulièrement la volonté de répondre aux besoins des savants et des alpinistes, qui ne pouvait s’inscrire dans une logique de rentabilité, le « marché » scientifique et touristique n’étant pas suffisamment important (en quantité de clients potentiels et en quantité de feuilles concernées) pour peser significativement sur les ventes de la carte. L’investissement croissant du service officiel dans les Alpes au cours des premières décennies du 20e siècle était donc en partie une conséquence de son opposition structurelle avec la Commission topographique du CAF, répondant à une logique de prestige et de monopole qui se traduisit par un développement quantitatif et qualitatif considérable des levés de haute montagne.