3.3.1.4. La généralisation des instruments de restitution.

Malgré son coût élevé et son maniement particulièrement difficile, le stéréoautographe connut un grand succès. Son principe fut utilisé dans la plupart des instruments de restitution développés dans la première moitié du 20e siècle, que ce soit pour l’exploitation de clichés terrestres ou aériens1085. L’emploi d’instruments de ce type se généralisa rapidement dans les levés photographiques, à tel point que l’utilisation des méthodes graphiques devint rapidement négligée, voire méconnue. La plupart des auteurs ne signalait l’utilisation des méthodes graphiques en France que dans les travaux du capitaine Javary et des cousins Vallot. Les levés photographiques de ces derniers étaient d’ailleurs systématiquement présentés comme une œuvre ambitieuse et titanesque, réalisée avec une qualité qui forçait l’admiration, mais avec des techniques que ces auteurs jugeaient presque préhistoriques. Emmanuel de Martonne, partisan enthousiaste des instruments de restitution qu’il considérait comme le principal facteur du développement de la photogrammétrie1086, écrivit même en 1948 que ces appareils avaient notamment servi à établir « des levés de haute montagne, mis en train par des initiatives privées, en vue de favoriser l’alpinisme et la recherche scientifique »1087, alors même qu’ils ne furent jamais utilisés en France par des topographes indépendants. Cette assimilation hâtive de la méthode Laussedat-Vallot à la restitution mécanisée était d’autant plus problématique qu’Henri Vallot lui-même s’était toujours opposé à l’emploi d’appareils coûteux et complexes pour privilégier une méthode abordable tant financièrement que techniquement par les topographes-alpinistes. De fait, l’utilisation d’instruments pour restituer des levés photographiques des régions de haute montagne française se développa exclusivement dans les opérations de la carte de France menées par le Service géographique de l’armée, d’abord expérimentalement entre 1910 et 1914, puis régulièrement au cours des années vingt.

Notes
1085.

Voir infra, partie 4, chapitre 2.

1086.

La « photogrammétrie, préconisée depuis un siècle par Laussedat, s’est imposée à partir du moment où des instruments ont permis d’effectuer automatiquement la restitution (opérations longues et minutieuses par lesquelles la carte est construite d’après les photographies). » MARTONNE Emmanuel (de). Traité de géographie physique. T.2. [9e édition] Op. cit., p. 508.

1087.

MARTONNE Emmanuel (de). Géographie aérienne. Op. cit., p. 69.