En conservant son personnel qualifié dans un cadre permanent, le service cartographique disposait d’un socle stable pour adapter son activité aux conditions politiques difficiles de l’occupation, puis de la libération et de la paix. Cette stabilité facilita grandement la transition entre le Service géographique de l’armée et l’Institut géographique national, un organisme civil qui réalisait, selon sa direction, « le grand Service d’Etat, entièrement spécialisé et convenablement étoffé, dont la nécessité était reconnue depuis longtemps »1234. Si les transformations opportunistes effectuées au moment de l’armistice favorisent un regard purement évènementiel, elles s’inscrivaient pourtant, en effet, dans une évolution sur le long terme dont j’ai déjà souligné les deux grandes orientations : la stabilisation du personnel spécialisé et la plus grande autonomie administrative. Le statut civil du nouvel organisme, instauré par des impératifs très pragmatiques, ne remettait pas en cause cette évolution pratique, et dans ce sens il est possible de parler d’« héritage » comme le font tous les auteurs traitant de la naissance de l’IGN. Mais ce statut civil participait aussi au renforcement de la conception utilitariste et de l’orientation industrielle de la cartographie en détachant le service cartographique de la sphère très spécifique du militaire. Même si elles furent limitées par les problèmes que posait une réorganisation structurelle conçue dans les conditions particulières de l’occupation, les conséquences de cette évolution étaient bien plus importantes, et le maintien du statut civil fut l’objet d’un débat agité entre 1944 et 1946 qui permit la confirmation de ces options.
Rapp. IGN 1940-42, p. 9.