Après les premières conclusions du Comité d’expériences photo-topographiques, l’adoption de la photographie aérienne pour les opérations régulières de révision du cadastre et de levé et révision des plans directeurs fut particulièrement rapide. Alors que d’autres essais étaient plus ou moins fructueusement menés en 1921 pour la révision des levés à grande échelle, de la nouvelle carte de France au 1 : 50 000 et de la carte d’état-major1359, le SGA s’accorda avec la direction de l’Aéronautique militaire pour faire photographier chaque année les régions concernées par le programme des levés. Le service affirmait qu’il était en mesure d’utiliser les photographies aériennes « pour préparer le travail des topographes et […] pour en contrôler les résultats », mais que « les clichés [étaient] précieux surtout [pour les] parties, telles que les localités, où les détails planimétriques [étaient] très denses, le dessin de ces éléments sur la mappe s’en [trouvant] alors facilité, ce qui [abrégeait] sensiblement la durée des opérations sur le terrain »1360. Puis en 1922, le SGA systématisa sa collaboration avec l’aviation militaire1361.
Le graphique suivant illustre la surface photographiée chaque année en France métropolitaine pour appuyer les levés planimétriques du SGA entre 1920 et 1939 (graphique 17). Cette utilisation concernant surtout le levé des agglomérations, les surfaces couvertes dépendaient beaucoup des régions concernées par les levés : les pics de 1933 et 1934 correspondent par exemple à la révision du plan directeur au 1 : 10 000 de Paris. Le graphique montre bien que jusqu’à la fin des années vingt, malgré l’enthousiasme de la direction du SGA, l’utilisation de la photographie aérienne restait limitée. Au cours des années trente, l’augmentation des surfaces couvertes procédait d’ailleurs plus de la diminution des échelles de prise de vue que de l’augmentation du nombre de clichés réalisés, à l’exception de 1933-1934 pour les raisons suscitées. A partir de 1937, la baisse de la surface couverte est imputable au développement des levés aériens destinés à restitution complète, qui accaparaient une partie de plus en plus grande des ressources consacrées aux prises de vue.
L’utilisation uniquement planimétrique des photographies aériennes avait évidemment moins d’intérêt dans les Alpes, d’autant qu’une partie assez importante était déjà couverte par des levés de précision. Les photographies aériennes ne furent donc que peu employées dans cette optique, à l’exception d’une couverture assez importante de la région de Thonon en 1927 (graphique 18).
* L’unité utilisée pour quantifier la surface n’est pas la même que sur le graphique précédent (graphique 17). Seule la répartition des levés peut donc être comparée.
Cette adoption rapide mais limitée de l’exploitation planimétrique des photographies aériennes s’explique par des facteurs conjoncturel, économique et technique. Tout d’abord, les autorités avaient besoin de plans détaillés pour la reconstruction des zones urbaines des régions dévastées. Cette nécessité avait participé à la constitution rapide du Comité d’expériences photo-topographiques et au soutien matériel raisonnable accordé au SGA. Ensuite, la reprise des activités normales du SGA dans les années vingt s’était faite autour d’une nouvelle volonté d’accélérer la réalisation de la carte de France1362, notamment par un investissement important dans la recherche photogrammétrique. Enfin, l’adoption de cette technique pour des travaux réguliers s’inscrivait dans une politique d’amélioration des techniques par l’usage, comme l’avait explicitement exprimé le Comité d’expériences photo-topographiques en affirmant qu’« il [était] nécessaire de l’employer, non seulement en raison de ses avantages immédiats, mais encore dans le but de réaliser les progrès indispensables »1363. Cependant, conçues comme des compléments aux opérations de levé ou de révision, les méthodes employées restèrent relativement artisanales jusqu’à la fin des années vingt.
Voir infra, partie 4, chapitre 3.3.4.
Rapp. SGA 1920-21, p. 22.
Rapp. SGA 1922-23, p. 4.
Voir supra, partie 3, chapitre 2.2.1.1.
Rapp. SGA 1920-21, p. 21.