4.2.1.2. La complexification de l’habillage, conséquence de la technicisation et de la normalisation cartographique.

Le graphique suivant montre l’évolution du nombre moyen d’items de chaque catégorie pour les feuilles publiées entre 1837 et 1987 (graphique 31). L’augmentation globale du nombre d’items de tous les niveaux témoigne d’une complexification générale mais lente de l’habillage. De multiples facteurs peuvent expliquer cette évolution, mais je considère que les plus importants sont l’adoption de procédés de reproduction plus souples permettant de mettre plus d’informations dans les marges de la carte sans trop augmenter le coût de revient (contrairement à la gravure sur cuivre), et la diversification des utilisations des cartes nécessitant plus d’informations différentes. J’explique la baisse entre 1880 et 1920, plus marquée pour les items complexes, par les nombreuses publications de plans directeurs en petites coupures dénudées ne comportaient que les informations strictement éditoriales. Ensuite, l’augmentation plus importante du nombre d’items de complexité 3 est d’autant plus marquant qu’il devient nettement supérieur aux nombres d’items de complexité 1 et 2.

Graphique 31 : Evolution du nombre moyen d’items dans l’habillage des cartes, de 1837 à 1987.
Graphique 31 : Evolution du nombre moyen d’items dans l’habillage des cartes, de 1837 à 1987.

L’évolution du nombre d’items traduit une complexification de l’habillage qui reflète bien la complexification de l’édition cartographique elle-même, induite par la diversification des utilisations et la technicisation du processus cartographique, mais aussi par la pression normative des institutions nationales et internationales. En particulier, l’accroissement du nombre de références géodésiques entre 1945 et 1955 (graphique 31, complexité 3) s’explique par la coexistence sur les feuilles de la carte de France de normes nationales et internationales, sous la pression de l’OTAN et des Etats-Unis qui finançaient une grande partie des travaux cartographiques français. Cette période vit la généralisation sur les feuilles du quadrillage kilométrique UTM, dérivé du système de projection Universal transverse mercator, en plus du quadrillage kilométrique basé sur le système de projection Lambert généralisé en France après la première guerre mondiale (graphique 32). De la même façon, les informations géodésiques étaient de plus en plus souvent données à la fois en coordonnées de la nouvelle triangulation de la France et en coordonnées du système géodésique européen unifié1636. Les deux graphiques suivants montrent l’utilisation croissante de ces normes multiples sur les feuilles publiées par le service officiel français et le service cartographique américain (graphiques 32 et 33).

Graphique 32 : Evolution de la proportion des quadrillages utilisées sur les feuilles publiées entre 1897 et 1987*.
Graphique 32 : Evolution de la proportion des quadrillages utilisées sur les feuilles publiées entre 1897 et 1987*.

* La proportion parfois supérieure à 1 s’explique par le chevauchement des différentes zones des quadrillages dans les Alpes (zones centre et sud pour le quadrillage Lambert, fuseaux 31 et 32 pour le quadrillage UTM).

Graphique 33 : Evolution de la proportion des triangulations citées sur les feuilles publiées entre 1897 et 1987*.
Graphique 33 : Evolution de la proportion des triangulations citées sur les feuilles publiées entre 1897 et 1987*.

* Le spectre plus large pour la Nouvelle triangulation de la France (NTF) s’explique par les multiples références à d’autres triangulations ramenées à la NTF.

De façon particulièrement nette, l’application du type 1972 marque la généralisation des quadrillages Lambert et UTM, ainsi que l’arrêt des mentions du réseau géodésique européen unifié. Avec l’achèvement de la nouvelle triangulation de la France dans les Alpes, les références à d’autres triangulations ramenés à la NTF diminuent régulièrement au cours des années cinquante et soixante. Là encore, l’adoption du type 1972 marque une normalisation de la présentation : la stabilisation de la courbe de la NTF à une référence par feuille montre la généralisation des références uniques à cette triangulation.

Notes
1636.

Les cartes de France étaient toujours établies dans le système de projection Lambert et sur la base de la nouvelle triangulation. Les références à d’autres systèmes, y compris le quadrillage UTM en surimpression sur les feuilles, n’étaient données qu’à titre complémentaire. Elles étaient d’ailleurs déterminées par un transfert dans les systèmes officiels de la carte de France.