4.2.4.2. Une facture luxueuse.

La facture particulièrement luxueuse de la carte reflétait sa conception comme un portait du massif et une œuvre de prestige (annexe 2, figure 17). Après la restitution au 1 : 10 000 de la première stéréominute, le directeur de l’IGN, Hurault lui-même, avait décidé la mise à l’étude d’une carte spéciale au 1 : 10 000 de tout le massif du Mont Blanc. Dans une note de novembre 1942, il donnait les grandes orientations à suivre dans l’étude de ses spécifications, en particulier pour la représentation du relief :

‘« En ce qui concerne la représentation à effet, il serait semble-t-il désirable de donner (en dehors des effets d’estompage) une teinte générale brun rougeâtre aux aiguilles, brune aux rochers, jaune aux éboulis, vert clair aux prairies, vert foncé aux bois, bleu verdâtre très clair à la neige et aux glaciers. Les effets d’ombre donnés par l’estompage resteraient dans les tonalités générales qui précèdent […]. Les courbes de niveau ne seraient pas maintenues dans les rochers escarpés, ou de formes tourmentées, ni dans les séracs ou zones de nombreuses crevasses. Elles seraient très fréquemment cotées. Elles devraient partout être traitées légèrement, pour que leur tracé ne nuise pas à l’effet général donné par l’estompage. Les cotes devraient être nombreuses en particulier sur les sommets. Les écritures se rapprocheraient de celles du 20 000e, mais beaucoup seraient assez fines (en particulier les chiffres des cotes seraient plus fins que ceux du 20 000e). »1670

Il prévoyait alors une carte en sept ou huit couleurs. Tout en restant dans l’orientation fixée en 1942 par le directeur, la facture adoptée fut encore plus luxueuse. La carte comporta finalement dix à onze planches différentes1671. Cinq planches de trait permettaient de représenter la planimétrie et la lettre (noir), les bâtiments (rouge), l’hydrographie et les glaciers (bleu), les courbes de niveau (bistre) et le rocher (brun-rouge). Entre trois et quatre planches de teintes étaient utilisées, le jaune pour le terrain dénudé, le vert clair pour les pâturages, le vert bois pour les feuillus, le vert foncé pour les conifères, ainsi que deux planches d’estompages, en bleu pour les glaciers et en violine pour le terrain normal. La lettre était entièrement réalisée à la main, selon une gamme de huit types de caractères différents. La représentation du relief combinait le dessin au trait et l’estompage au pinceau, l’artiste pouvant s’aider des photographies aériennes, des croquis effectués par la brigade de complètement, des photographies documentaires prises par l’artiste-cartographe Le Méné et d’un plan-relief au 1 : 10 000 décoré à la main et exécuté spécialement entre 1942 et 1947.

Notes
1670.

HURAULT. Note pour les 3 ème et 4 ème direction (suite aux notes 7307 IGN/C du 10 août 1942 et 7448 IGN du 26 août. Objet : A/S de la carte au 10.000 e du Mt Blanc. Paris : Institut géographique national, 4 novembre 1942. Notes 8.169 IGN/C de la 1ère direction.

1671.

DUPUIS Jean-Claude. La carte du Mont-Blanc. Op. cit., p. 2.