La vie psychique de l’individu n’est pas à l’abri de l’influence des attitudes personnelles à l’égard des stratégies d’acculturation qui auront des effets quand à l’adaptation, et également, à l’ajustement psychologique des membres de sociétés en contact.
En (1997), Berry remarqua que l’air positif vis-à-vis de la stratégie d’intégration, sera suivi d’un meilleur ajustement psychologique. « C’est d’ailleurs cette stratégie qui est habituellement la plus fortement endossée » 114 . Pour lui, l’influence de ces attitudes personnelles sur les stratégies d’acculturation a un impact important sur les individus appartenant aux groupes minoritaires.
En fait, le contact culturel crée des conflits identitaires produisant «le stress d’acculturation ». Celui-ci est un état physiologique de l’organisme dont les réactions répondent à des exigences environnementales tel que le processus d’ajustement, afin d’avoir une adaptation satisfaisante à la situation vécue et ses conditions. Ce stress d’acculturation « se manifeste par des problèmes de santé mentale (confusion, dépression, angoisse, etc.), de marginalité (Stonquiste, 1932), d’aliénation et des difficultés identitaires » 115 . D’où l’importance de prendre en compte les attentes des membres de groupes minoritaires, confrontés à l’acculturation ainsi que les facteurs contrôlant les relations entre le stress et l’acculturation. Quels sont, donc, ces facteurs ?
D’après l’auteur, le stress d’acculturation est probable et non inéluctable ; il est toujours sous l’influence des facteurs intervenant dans les différents contextes d’acculturation. Il est dépendant des éléments suivants :
Berry illustre cette idée dans le tableau suivant :
Acculturation | Stresseurs (conditions d’environnement) | Stress d’acculturation |
Beaucoup | Plusieurs | Elevé |
Peu | Peu | Bas |
Au début, Berry remarque que les trois notions : Acculturation, stresseurs et stress d’acculturation, sont reliées entre elles par un lien unidirectionnel : « Antérieurement, on croyait que les expériences d’acculturation étaient inévitablement source de ‘’stresseurs’’ et que les ‘’stresseurs ‘’étaient inévitablement sources de stress d’acculturation » 116 .
Selon les données d’une recherche effectuée en (1987), l’auteur a remarqué que les liens entre ces trois notions sont plutôt influencés par les facteurs déjà mentionnés. Si ces facteurs sont avantageux, il est possible d’avoir une forte participation au processus d’acculturation, sans trop de stresseurs et avec un taux minimum de stress d’acculturation. A l’inverse, si ces facteurs sont défavorables, le processus d’acculturation sera atteint de plusieurs problèmes et le taux de stress sera élevé.
Pour Berry, ces cinq facteurs sont tous très importants pour l’adaptation psychologique.
Pour le premier facteur (caractéristiques de la société dominante), l’auteur a remarqué que les résultats recueillis, comme ceux de Morphy (1965), montrent que la probabilité d’un niveau de stress élevé beaucoup plus marqué dans les sociétés monistes et assimilationnistes que dans les sociétés pluralistes et tolérantes.
Pour le deuxième facteur (type de groupe d’acculturation), ce sont les groupes non volontaires, des autochtones et les communautés des réfugiés, qui expriment le taux de stress d’acculturation le plus haut.
Pour le troisième facteur (mode d’acculturation), le niveau du stress le plus élevé se trouve chez les groupes marginalisés ou chez les acteurs qui vivent des situations de conflits dans leurs tentatives de séparation. A l’inverse, ce sont les sujets qui cherchent l’Intégration qui ont le niveau de stress le plus bas. Ceux qui visent l’assimilation se situent entre les deux limites.
Pour le quatrième facteur (caractéristiques socio démographiques de l’individu), plusieurs caractéristiques psycho sociaux peuvent influencer le taux de stress telles que les expériences de famine, de torture, l’age, le sexe, le statut civil, le niveau socio-économique.
Pour le cinquième facteur (caractéristiques psychologiques des individus), l’auteur a remarqué qu’il est très importants, comme par exemple le sens de contrôle, les stratégies d’ajustement «coping » (Lazar et folkman, 1984), les attitudes à l’égard du processus d’acculturation, les motivations et le sens d’identité culturelle, qui ont une très grande influence sur le taux de stress.
Pour conclure, nous pouvons dire que les thèses théoriques de Berry, et la psychologie interculturelle montrent nettement que les conduites et les traits psychologiques des acteurs sont fortement influencés par l’ enculturation (Processus d’acquisition de la culture de l’endogroupe) aussi bien que par l’ acculturation (Processus d’adoption de la culture de l’exogroupe).
Par conséquence, ce qui différencie les immigrés des autochtones n’est pas la différence culturelle d’origine, mais le regard qu’ils adoptent sur la ’’culture-métisse’’ à laquelle ils adhèrent, un regard porté sur deux cibles : l’appartenance et l’origine. Ce qui les distingue est cette expérience exceptionnelle qui débouche au carrefour rejoignant une double voie différente.
L’importance de l’apport de Berry consiste aussi à démontrer que les changements qui accompagnent l’acculturation sont multiples. Ils ne sont pas seulement physiques tels que le changement de milieu, d’habitat, la pollution ou l’urbanisation, mais aussi biologiques (une nouvelle alimentation, nouvelles maladies, métissages), des changements politiques (perte d’autonomie), de même que des changements économiques (emploi, salarié) ; des changements culturels (la langue, la religion, l’éducation), et enfin des changements sociaux puisque l’individu tisse de nouvelles relations interindividuelles et intergroupales.
De plus, Berry a attiré l’attention sur l’importance du rôle du groupe dominant et ses institutions à influencer les stratégies d’acculturation qu’adoptent les groupes d’immigrés et leurs attitudes à l’égard de la société d’accueil.
L’auteur ne présente pas l’individu comme passif à l’égard des processus d’acculturation, à l’inverse, il le présente comme un acteur actif, c’est lui qui décide de la manière dont il veut s’acculturer.
Pour mieux comprendre leur différents choix d’adaptation, l’auteur nous conseille de bien connaître la politique d’acculturation du groupe dominant et les attitudes qu’ont les individus eux-mêmes à l’égard de l’acculturation.
Il ne faut donc pas négliger l’impact des projets officiels et l’application d’une idéologie multiculturelle ainsi que leurs effets sur les stratégies d’acculturation, car ils déterminent la marge de mouvement des groupes immigrés dans leur interaction sociale et dessinent les frontières de leur horizon en tant que groupes dominés.
Cependant, le modèle théorique de Berry a ses limites, il réduit l’acculturation à une forme de comportement et d’attitudes. Pourtant, la réalité sociale montre que l’acculturation est un ‘’fait complexe‘’ à plusieurs dimensions : politiques, sociales, juridiques, éducatives…etc.
Malgré le rôle actif accordé au sujet en choisissant la stratégie d’acculturation qu’il préfère, le modèle de Berry n’a pas abordé le contact des cultures au niveau psychique de l’individu, c’est-à-dire au niveau identitaire. D’emblée, l’auteur ne présente pas la négociation identitaire que fait le sujet avant de choisir la stratégie d’acculturation qui lui convient.
Ajoutons que ce modèle théorique a un risque de considérer l’intégration comme une conservation de la culture du pays d’origine, d’un côté, et comme multiplication des contacts avec la culture de la société d’accueil, d’autre côté. En fait, nous considérons que l’intégration n’est pas une simple adaptation culturelle liée à une activité sociale, mais elle est avant tout liée à un équilibre psychique. D’où, l’importance de prendre en considération la singularité de chaque individu en choisissant certaines stratégies d’acculturation. Elles représentent une création propre à chaque individu répondant à ses exigences psychologiques et sociales…etc.
Clément, R., (2001), Contribution à une problématique de l’interculturel : Communication, Identité et adaptation, Limonest, L’Interdisciplinaire, P : 32.
Berry, J.W., Processus d’acculturation et adaptation, site : Perso.wanadoo.fr/chevrel/berry.html, P : 4.
Ibid., Site: Perso.wanadoo. fr, P : 4