III.1- Détermination du concept 

Qu’est-ce que la mondialisation ? Est- elle un phénomène récent ? Quelle est la différence entre ce concept et celui de la globalisation ?

En fait, au début, la mondialisation désigne une configuration nouvelle de l’économie mondiale et du système international. Elle signifie l’intégration progressive des différentes parties du monde sous l’influence de l’accélération des échanges, de la production des nouvelles technologies de l’information et de la communication, des moyens de transports « la MONDIALISATION, c’est d’abord un processus de transactions, né des échanges qui s’établissent entre les différentes partie du globe » 278 .

L’historique de la notion ‘’ mondialisation’’ reflète l’opposition des opinions à son propos. En fait, selon la perspective où l’on se place, ce phénomène touche des processus bien spécifiques qui, pour les uns, perpétuent des dispositions anciennes, pour les autres, marquent une ère nouvelle. Ceux qui la considère un phénomène économique ancien et continu, la relient avec les échanges commerciaux et l’existence des économies-monde : « il y a eu des économies-monde depuis toujours, du moins depuis très longtemps. De même qu’il y a eu des sociétés, des civilisations, des Etats, et même des empires, rappel Braudel, pour qui les vastes réseaux commerciaux des phéniciens jusqu’au XVIII° siècle constituèrent tour à tour des économies-monde » 279 . Pourtant ceux qui la considèrent un fait nouvel, nous remarquons que « dans cette perspective, la vision de la mondialisation actuelle est réinscrite dans la longue durée du capitalisme européen qui, à partir des XVI° et XVII° siècles, a étendu ses tentacules aux dimensions de la planète…cette nouvelle avancée s’est produite […] en raison d’abord de l’effondrement de l’union soviétique, de l’expansion capitaliste dans des zones jusque-là rétives (en premier lieu l’Asie – pacifique), et, enfin, de l’action volontariste des instances internationales de régulation des économies et du marché » 280 .

Déterminer la différence entre les concepts : la mondialisation, la globalisation et l’universalisme, nous semble être une question nécessaire pour garder la clarification d’une notion décrite souvent comme ambigu.

En réalité, ces trois concepts n’ont pas la même signification. « La mondialisation renvoie aux techniques de communication qui, en ceinturant le monde, ont donné le sentiment d’un village globale. La globalisation renvoie à l’économie et au rêve d’un capitalisme sans entrave de 6,5 milliards de consommateurs » 281 .

Souvent utilisé dans le même sens de la mondialisation, la globalisation représente aussi une notion à plusieurs définitions. La première en 1983 : ce terme a été proposé par Théodore Levitt, pour désigner la convergence des marchés dans le monde entier. Les principales régions du monde constituent une entité indivisible, elle vend la même chose, de la même manière partout. En ce premier sens, « le terme s’applique surtout à la gestion des multinationales et concerne exclusivement les échanges internationaux » 282 .

Cette notion a subit un développement en 1990 avec Kenichi Ohmae, elle renferme « l’ensemble de la chaîne de création de la valeur [R-D], ingénierie, production, marchandisation, service et finance » 283 . La globalisation signifie alors, (2ème sens), une manière de gestion, entièrement intégrée à l’échelle mondiale, de la grande firme multinationale. Dès lors, la globalisation devient le processus à travers lequel les entreprises les plus mondialisées tentent de redéfinir à leur profit les règles du jeu auparavant imposées par les Etats-nations (3ème sens). Enfin, la globalisation peut signifier une nouvelle apparence caractérisée par une rupture avec les étapes précédentes de l’économie internationale dont l’évolution était déterminée par l’interaction de processus opérant fondamentalement au niveau des Etats-nations. Actuellement, nous vivions la période « d’une économie globalisée dans laquelle les économies nationales seraient décomposées puis articulées au sein d’un système de transactions et de processus opérant directement au niveau internationale » 284 (4ème sens).

Supposés avoir une fonction d’interpréter l’aboutissement de l’interpénétration des économies et des cultures, les termes mondialisation/globalisation devraient rendre compte de la question de l’avenir des cultures, spécialement dans notre période où « l’américanisation devient synonyme de modernisation » 285 .

A la différence de la mondialisation qui renvoie, aussi, à la dimension géographique, la globalisation en tant que concept anglais exprime ouvertement la perspective des stratèges de la géo-économie.  Elle interprète une orientation cybernétique de l’organisation de la planète. « La notion originelle de globalisation renvoie donc, d’abord à une logique managériale de l’organisation des entreprises sur un marché aux dimensions du monde, sur la global marketplace » 286 .

Alors, avec la globalisation, les entreprises sont organisées en réseaux et leur mot d’ordre stratégique est l’intégration des espaces à la fois locaux, nationaux et globaux. Et cette structuration en réseaux, ne se limite pas aux entreprises « ces réseaux-associations peuvent être des natures diverses et se structurer à partir de valeurs ou d’intérêts » 287 . En fait, c’est cette optique en réseaux (issue d’une réflexion sur la notion d’ordre et de désordre dans les systèmes politiques, surtout, le domaine des relations internationales) qui a particulièrement participé à l’élaboration de la notion de globalisation au-delà d’une définition exclusivement économique.

Avec cette nouvelle situation mondiale mouvante, guidée par l’organisation en réseaux, des conjonctures et des interdépendances de toutes sortes sont, donc, possibles. D’emblée, une nouvelle conjonction spatiale et temporelle, de nouvelles règles du jeu s’imposent au niveau mondial, supranational et même national, ce qui en résulte un « nouveau cadre des activités et des communications humaine. Ce cadre détermine des relations internationales croissantes et des rencontres internationales et interculturelles entre porteurs de cultures semblables et différentes » 288 . D’où la nécessité de d’aborder la problématique de la culture en étudiant la mondialisation.

Notes
278.

Dollfus, O., Les espaces de la mondialisation, in La mondialisation, Sciences Humaines, Auxerre, 1997, n° 17, P : 11.

279.

Rouano-Borbalan, J-C., Un seul monde, in La mondialisation, Sciences Humaines, Auxerre, 1997, n° 17, P : 5.

280.

Ibid., Un seul monde, P : 5.

281.

Wolton, D., (2003), L’Autre mondialisation, Paris, Flammarion, P : 81.

282.

Boyer, R., (2000), Globalisation : Quatre définitions pour un mot fétiche, in La mondialisation au-delà des mythes, Paris, La Découverte / Poche, P : 15.

283.

Ibid., Globalisation : Quatre définitions pour un mot fétiche, P : 15.

284.

Ibid., Globalisation : Quatre définitions pour un mot fétiche, P : 16.

285.

Mattelart, A., (2000), La nouvelle idéologie globalitaire, in La mondialisation au-delà de mythe, Paris, La Decouverte/ Poche, P : 82.

286.

Ibid., La nouvelle idéologie globalitaire, P : 86.

287.

Colonomos, A ., Le pouvoir des réseaux, in La mondialisation, Sciences Humaines, Auxerre, 1997, n°17, P : 38.

288.

Demorgon, J., (2000), Complexité des cultures et de l’interculturel, Paris, Anthropos, P : 1.