IV-Les recherches interculturelles et l’enjeu méthodologique 

En déterminant la culture en tant qu’itinéraire vers l’interculturel, nous avons abordé l’évolution scientifique de la psychologie, de l’anthropologie psychologique (en exposant les grands courants en recherches culturelles), la naissance de la psychologie sociale étant une introduction, ou acclimatation à la recherche en psychologie interculturelle.

Le survol historique de la psychologie classique et son développement montre que ce domaine relève d’intérêts, quelquefois distincts, pour les comportements, les situations mentaux et les mécanismes mentaux.

En élargissant le cadre de la psychologie classique, la psychologie sociale a vu le jour en étudiant les conduites humaines, les états cognitifs aussi bien que les processus mentaux en tant qu’ils se développent et se réalisent chez un acteur en interaction avec son environnement et ses éléments constitutifs, que se soit des individus, des institutions, des systèmes (matériels et symboliques). Plus précisément, «  le champ de la psychologie sociale met en relation les dimensions cognitive, motivationnelle, émotionnelle ainsi que le soubassement physiologique du psychisme et du comportement humain avec l’insertion sociale des individus (relations interindividuelles, groupes, institutions, cultures, idéologies) dans un environnement matériel délimité » 406 .

En fait, c’est une optique double qui essaye de sonder, d’un côté, l’influence du facteur sociale sur les processus cognitifs, et, les comportements humains, et d’autre côté, de savoir si ces conduites et ces mécanismes mentaux agissant-ils sur le contexte sociale dans lequel ils s’évoluent et s’effectuent. Bref, on remarque que le visé de cette perspective est de dévoiler la réalité de l’interaction dialectique entre l’individu et son milieu environnante.

En continuant son trajet évolutionniste, les sciences humaines ont vu la naissance de la psychologie interculturelle, une nouvelle discipline relativement qui développe la notion classique de la culture en proposant une perspective dynamique (traduite par le concept contact des cultures) qui met en relief la réciprocité et la complexité de ce fait exclusivement humain, en dépassant la finalité comparative entre les cultures.

A ce propos, Claude Clanet considère que la notion ‘’interculturel’’ « introduit donc les notions de réciprocité dans les échanges et de complexité dans les relations entre cultures. Idées dont se trouve inducteur le préfixe’’ inter’’…inter/entre qui, tantôt traduit la liaison, la réciprocité (inter-pénétration, inter-action, inter-disciplinarité…) et tantôt la séparation, la disjonction (inter-diction, inter-rogation, inter-position…) ce sont d’interpénétrations, d’interférences, d’interactions que sont faits les contacts de cultures…dynamiques paradoxales, que,…peut signifier le terme interculturel» 407 .

Pour cette nouvelle approche caractérisée par une dynamique paradoxale occupant le carrefour où s’enchevêtrent plusieurs disciplines des sciences humaines, l’enjeu méthodologique est crucial puisque « la recherche (…en sciences sociales) suit une démarche analogue à celle du chercheur du pétrole. Ce n’est pas en forant n’importe où que celui-ci trouvera ce qu’il cherche…il importe avant tout que le chercheur soit capable de concevoir et de mettre en œuvre un dispositif d’élucidation du réel, c’est-à-dire, dans son sens le plus large, une méthode du travail » 408 . La question qui s’impose ici, est, comment les méthodes des sciences humaines ont servi la psychologie interculturelle au niveau méthodologique?

La construction de la connaissance est une question de nature conceptuelle, la simple étape descriptive ne suffit pas. Elle a besoin des règles scientifiques qui développent le savoir vers le but déterminé, sans efforts superflus, afin d’atteindre l’objectivité et dévoiler la réalité du fait étudié.

Ces règles scientifiques sont appelées  méthodes. Concept que le philosophe René Descartes en (1619) a essayé de déterminer en tant que « règles certaines et faciles, grâce auxquelles tous ceux qui les observent scrupuleusement ne supposeront jamais vrai ce qui est faux, et parviendront, sans se fatiguer en efforts inutiles, mais en accroissant régulièrement leur savoir, à la connaissance exacte de ce qu’ils peuvent atteindre suivant en cela un ‘’plan réfléchi et déterminé d’avance’’ susceptible d’indiquer les errements à éviter afin de parvenir à l’objectif que l’on s’est fixé» 409 .

Alors, c’est une stratégie du travail adoptée par les sciences humaines que la psychologie interculturelle peut s’en servir afin de mieux sonder la réalité que se soit sociale, psychique, culturelle ou interculturelle…etc.

Notes
406.

Delhomme, P., Meyer, T., (1997), Les projets de recherches en psychologies sociale, Paris, Armand Colin, P : 19.

407.

Clanet, C., (1990), L’interculturel : introduction aux approches interculturelles en éducation et en sciences humaines, Toulouse, Presses Universitaires de Mirail, P : 21.

408.

Quivy, R., Campenhoudt, L.V., (1995), Manuel de recherche en sciences sociales, Paris, DUNOD, P : 3.

409.

Férrol, G., Deubel, Ph., (1993), Méthodologie des sciences sociales, Paris, Armand Colin, P : 5.