IV.3- Recherches interculturelles et psychologie sociale 

Situer à l’articulation de la psychologie et de la sociologie, la psychologie sociale est une discipline qui étudie les interactions humaines et leurs fondements psychologiques.

Il représente l’étude heuristique de la façon dont les individus se perçoivent, s’influencent et entrent en relation les uns avec les autres, autrement dit, entrent en contact dans ses différentes dimensions qu’elles soient psychiques ou socio-culturelles. D’où « les apports de la psychologie sociale à la compréhension des relations interculturelles sont particulièrement importants. Plus peut-être que d’autres disciplines des sciences sociales (sociologie, ethnologie, histoire…)…qui puissent rendre compte différents phénomènes relationnels que suscitent les contacts entre individus et groupes culturellement différenciés » 421 .

Dans cette partie, on va aborder les recherches interculturelles, spécialement, celles qui se focalisent sur la question des relations interculturelles à la lumière de la psychologie sociale.

D’abord, nous attirons votre attention qu’on ne va pas résumer les ensembles de travaux qui constituent la psychologie sociale, mais nous essayons de donner un certain type de connaissance : faire sentir, comprendre au lecteur la manière dont se progresse un secteur du savoir (la psychologie interculturelle) en se basant sur un autre secteur (la psychologie sociale).

De plus, nous signalons, ici, que la notion de la culture utilisée dans son sens anthropologique : Elle désigne les modes de vie d’un groupe sociale, ses façons de sentir, d’agir ou de penser, son rapport à la nature, à l’homme, à la technique, à la création artistique. Elle couvre, aussi bien les conduites effectives des individus que les modèles symboliques qui les orientent tels que le système de valeurs, les idéologies et les normes sociales…bref, les représentations sociales.

Concernant la notion des relations interculturelles, nous l’utilisons ici, en tant que concept qu’implique l’idée d’inter-relations, de rapports et d’échanges entre cultures différentes. Il faut le comprendre en tant qu’interaction entre deux cultures non homogènes en contact, en évolution permanente tout autant qu’elles communiquent et qu’elles se mutuelles que par leurs caractéristiques propres.

Ajoutons que l’expression de communication interculturelle ne signifie pas que ce sont les cultures qu’entrent en contact, mais « la communication implique toujours des personnes et ce sont elles qui véhiculent et médiatisent les rapports entre cultures » 422 .

Donc, les relations interculturelles constituent une notion désignant les relations qui s’établissent entre personnes ou groupes appartenant à des cultures différentes. C’est le phénomène relationnel qui nous intéresse dans les recherches interculturelles même s’il emporte avec lui tout un arrière-plan de jugements, stéréotypes, préjugés et de modes de penser, autrement dit, des représentations sociales.

En fait, les représentations sociales, les stéréotypes, les préjugés, l’influence sociale, la socialisation, les conflits, les processus de l’attribution et de catégorisations sociales… sont des ‘’faits fondamentaux’’ dans la vie sociale et décisifs dans l’approche de l’interaction sociale et la dynamique de groupe, en général, et les relations interculturelles voire les communications interculturelles en particulier.

Les essentielles contributions conceptuelles fournissent à la compréhension de la conduite humaine par la psychologie sociale, consistent à :

-Mise en relief le contrôle exercé sur l’acteur de la part des situations sociales.

-La puissance des indications verbales en tant que mode d’influence sur le comportement.

-Démontrer que « la réalité qui compte pour un individu, c’est souvent la représentation cognitive des événements internes et des conditions extérieures, plus que la ‘’réalité’’ physique ou biologique en soi » 423 .

Ces trois facteurs (situationnel, verbal et cognitif) ont une influence sur les relations interculturelles et le processus du contact des cultures, et chaque recherche interculturelle doit les prendre en considération.

Commençons par le contrôle qu’il subit l’individu de la part des situations sociales, on remarque dans les pratiques sociales que l’interaction entre les personnes est un processus dynamique, influencé par la situation existante et le contexte environnant, spécialement, celui socio-culturel.

Partant de l’observation de ce qui se passe dans le champ de la vie quotidienne, on remarque, aussi, que la ‘’perception’’, le  ‘’jugement’’ et ‘’l’image’’ de l’individu par rapport à soi, également par rapport à l’Autre (semblable ou différent), sont sous l’influence de la situation que se soit la situation personnelle ou celle du groupe auquel il appartient en toutes ses dimensions politiques, économiques, religieuses…etc.

Par conséquent, être membre d’un groupe majoritaire ou minoritaire, est un facteur qu’on ne peut pas nier en étudiant les relations interculturelles, également le contact entre les cultures.

La théorie de W.Berry est l’exemple qui présente bien l’influence du groupe majoritaire et ses institutions sur les groupes minoritaires (immigrés ou autochtones) dans le processus de l’acculturation, et comment les groupes minoritaires sont-le plus souvent- appelés à la conformité à cause de leur situation. Cet appel est traduit par les codes, les lois, les images prescrits par la majorité et qu’il faut atteindre de la part des minorités en tant que finalités, sinon, ils seront la proie d’une marginalisation sociale. D’emblée, des conflits identitaires et sociaux (qu’ils soientt au niveau individuel ou collectif) ne seront pas absents du théâtre de la vie quotidienne.

Notes
421.

Lipiansky, E.M., (2001), Relations interculturelles et psychologie sociale : Apport et limites, in Construire l’interculturel, de la notion aux pratiques, De Villanova, R., Hilly, M.A. et al., Paris, L’Harmattan, P : 59.

422.

Ibid., La communication interculturelle, P : 11.

423.

Zimbardo, P.G., (1972), La psychologie sociale : Une intrigue et un scénario en quête de la réalité sociale, in Introduction à la psychologie sociale, sous dir. Moscovici, S., Paris, Librairie Larousse, P : 85.