1.1. Le glissement vers une perspective centrée sur l’utilisateur

De manière générale, on justifie le recours à une étude statistique lorsque l’on manque de connaissances dans un domaine, manque qui est attesté par la littérature dudit domaine (Colin, Lavoie et al. (1992 : 11-12)). Or, s’il est bien un aspect de la lexicographie où celles-ci font toujours défaut, c’est celui de l’utilisation qui est réellement faite des dictionnaires : l’étude des besoins des utilisateurs et, plus globalement, la perspective lexicographique centrée sur l’utilisateur est un phénomène assez récent, qui a certes pris beaucoup d’ampleur depuis le temps où Hartmann (1989 : 103) affirmait “research into dictionary use needs to be further encouraged”, mais qui reste à développer et à affiner. C’est ce qu’a constaté Mackintosh (1995 : 5) :

‘Dictionary use is becoming an increasingly important issue requiring more research, and, in particular, research on specific user groups  such as version translators.’

La remarque suivante faite par Humbley (2002 : 95) va dans le même sens :

‘Le rapport entre le dictionnaire et ses utilisateurs est en train d’évoluer sous la pression conjuguée d’une demande plus exigeante et d’une offre stimulée par les nouveaux outils, avant tout informatiques.’

Celui-ci cite (p. 96) ainsi l’exemple d’une étude concernant les utilisateurs des dictionnaires spécialisés (« études approfondies menées au Danemark (« conférence de Sandbjerg »), dans le cadre d’un grand projet sur la traduction de textes spécialisés » (Humbley (2002 : 96)).

Ainsi, le bien-fondé d’une enquête qui porte, comme nous l’avons précisé en introduction, sur l’utilisation des dictionnaires par trois groupes distincts d’utilisateurs (professionnels de la langue, scientifiques, grand public cultivé) pour un type bien précis d’unités lexicales (les mots scientifiques et techniques) n’est guère à démontrer.